Pass sanitaire obligatoire à l'hôpital : pourquoi sa mise en place est critiquée par les professionnels de santé
Le Conseil constitutionnel doit se prononcer, jeudi, sur la loi sanitaire adoptée par le Parlement le 26 juillet. Mais des voix s'élèvent déjà pour dénoncer les difficultés que poserait l'instauration du pass sanitaire dans les établissements de santé.
Des difficultés à l'entrée dans les hôpitaux. Le pass sanitaire sera exigé dès le 9 août à l'entrée des cafés et des restaurants, mais aussi des Ehpad ou des établissements de soins. Une application conditionnée par l'avis du Conseil constitutionnel, attendu jeudi 5 août, sur la loi introduisant de nouvelles mesures de lutte contre le Covid-19. Mais l'extension du pass sanitaire dans les hôpitaux entraîne de nombreux problèmes logistiques, dénoncés par les professionnels de santé.
Un accès aux soins plus compliqué
Si les soins urgents ne sont pas concernés par l'obligation du pass sanitaire, les patients en soins programmés seront, eux, contraints de le présenter. Des syndicats de professionnels de santé dénoncent cette mesure, tout comme l'ordre des médecins. Ce dernier s'inquiète "vivement des conditions de mise en œuvre d'une telle disposition, qui ne doit pas priver des patients de soins", en rappelant que "les conséquences délétères de la crise sanitaire en termes d'accès aux soins et de suivi des malades, et notamment des malades atteints de pathologies chroniques, sont largement documentées".
[Communiqué]
— Ordre des Médecins (@ordre_medecins) August 2, 2021
Pour l'Ordre des médecins, la mise en place du pass sanitaire ne doit pas limiter l'accès aux soins⤵️ pic.twitter.com/KuZxA6pSxX
Les proches des patients devront également présenter un pass sanitaire, ce qui pourrait freiner les visites. "Un certain nombre de patients ont besoin de ces visites, psychologiquement, notamment", affirme à franceinfo Bertrand Guidet, chef du service de réanimation de l'hôpital Saint-Antoine, à Paris. "On a vu ce que ça a donné lors des précédentes vagues sur le moral des personnes hospitalisées", rappelle le professeur, également représentant médical de l'hôpital Saint-Antoine. Pour permettre au plus grand nombre de pouvoir accéder à l'hôpital, même sans pass sanitaire, l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) réfléchit à mettre en place des stands de dépistage par tests antigéniques devant ses établissements.
Un coût élevé pour les établissements concernés
Comme le révélait franceinfo le 22 juillet, le contrôle du pass sanitaire à l'hôpital va coûter 60 millions d'euros par mois, selon la Fédération hospitalière de France (FHF). La raison ? Les établissements de santé devront engager des bras supplémentaires pour contrôler le respect du pass sanitaire. "Que ce soit du personnel interne ou externe, le coût de cette mesure est évalué à 60 millions d'euros par mois", assure la FHF.
Une mise en application difficile
En raison des allers-retours inévitables dans les établissements de santé, ainsi que du nombre d'entrées dont ils disposent, les soignants s'inquiètent de la mise en place pratique du pass sanitaire. Un hôpital voit passer tous les jours des patients, des soignants, des visiteurs, mais aussi des agents d'entretien, des ambulanciers, des pompiers… "Le pass sanitaire à l'entrée de l'hôpital, c'est une usine à gaz", juge Philippe Juvin, chef de service des urgences de l'hôpital européen Georges-Pompidou, à Paris, interrogé mercredi 4 août par franceinfo. "Je suis, comme beaucoup de mes collègues, perplexe sur l'application de ces règles."
"Il est évident qu'il faut contrôler les hôpitaux vu les flux qu'ils brassent, notamment pour éviter les contaminations nosocomiales."
Bertrand Guidet, chef du service réanimation à l'hôpital Saint-Antoine, à Parisà franceinfo
Pour éviter au maximum la transmission du Sars-CoV-2 à l'hôpital tout en respectant la nouvelle législation, l'AP-HP envisage de contrôler les pass sanitaires via des bornes. "Nous les disposerions à l'entrée de l'hôpital pour scanner directement les QR codes", détaille Bertrand Guidet. Une manière de ne pas surcharger les vigiles, non formés à cette mission, tout en évitant d'embaucher du personnel.
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