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Coronavirus : pourquoi le port du masque n'est-il pas obligatoire dans les salles de cinéma ?

Depuis lundi, porter un masque dans les espaces clos est une obligation. Pourtant, dans les cinémas, le protocole appliqué depuis le 22 juin reste inchangé. Si le masque est imposé dans les halls et les zones de circulation, il est possible de l'enlever une fois assis dans la salle. De quoi créer de la confusion.

Article rédigé par Louis San
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4 min
La caisse d'un cinéma, avec un distributeur de gel hydroalcoolique, à Paris, le 21 juin 2020. (ABDULMONAM EASSA / AFP)

Les salles de cinéma bénéficient-elles d'un régime de faveur ? Pour lutter contre la pandémie de Covid-19, le port du masque est devenu obligatoire dans les espaces publics clos, depuis le lundi 20 juillet. Mais dans les cinémas, le protocole en place depuis la réouverture des salles osbscures, le 22 juin, est maintenu : si le masque est imposé dans les halls ou les zones de circulation, il reste facultatif une fois que le spectateur est assis dans son fauteuil. Ce dernier doit en revanche se trouver à un siège de distance des personnes de groupes différents, quand les autorités chinoises demandent elles deux fauteuils d'écart.

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L'absence de changement de règles pour les cinémas a créé de la confusion chez certains spectateurs, comme l'a rapporté une journaliste de France 3 Normandie sur Twitter.

Pourtant, sur les réseaux sociaux, les professionnels ont répondu à des spectateurs sur les règles à suivre, qu'il s'agisse de grands groupes comme UGC ou Gaumont ou de structures plus modestes.

"Complètement idiot"

Mais maintenir le masque facultatif pendant la projection n'est-il pas incohérent avec les nouvelles mesures sanitaires ? "C'est complètement idiot, tranche auprès de franceinfo l'épidémiologiste à la retraite Catherine Hill. Les masques, il faut les porter le plus possible", insiste-t-elle. "Je pense franchement qu'avec l'obligation du port du masque en lieu clos, il devrait être obligatoire dans la salle", abonde Anne-Claude Crémieux, professeure spécialiste des maladies infectieuses à l'hôpital Saint-Louis, à Paris.

L'épidémiologiste Arnaud Fontanet avait relevé l'utilité du masque en espaces clos, sur France Inter, début juillet. "Le port du masque en milieu fermé, notamment quand vous ne pouvez pas maintenir la distance physique mais également parce que c'est un milieu fermé, oui, c'est une mesure qui est très utile", avait déclaré ce membre du Conseil scientifique, instance qui éclaire l'exécutif sur la pandémie de Covid-19.

Comme l'a expliqué franceinfo, de nombreuses faits et études ont montré que le virus se propageait de façon plus importante dans des lieux clos, comme les abattoirs, les bars et les discothèques. A la décharge des cinémas, ces derniers ne disposent pas de parties réfrigérées, et les spectateurs ne vont pas voir des films sur grand écran pour parler, crier ou danser. Toutefois, aux Etats-Unis, près de 80% des salles obscures demeurent fermées, ont rapporté Les Echos.

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Le spectateur est "statique"

De son côté, la Fédération nationale des cinémas français (FNCF) se veut rassurante. "Les salles de cinéma, ce sont de très grands volumes. Elles sont ventilées de façon importante, avec de l'air renouvelé qui vient de l'extérieur", se défend-elle auprès de franceinfo. Elle insiste sur le "côté fixe et statique" du spectateur pendant la projection, relevant qu'un client dans un magasin, par exemple, est mobile. 

La FNCF rappelle que le cinéma n'est pas le seul secteur concerné par un dispositif particulier, et souligne que les clients des restaurants doivent impérativement porter un masque lorsqu'ils circulent mais qu'ils sont autorisés à l'ôter au moment du repas. La Fédération fait aussi valoir que "dans les cinémas, les choses sont très organisées : dans les circulations, dans l'attente, dans la salle".

Selon le site spécialisé Boxofficepro, la FNCF a indiqué dans un e-mail à ses adhérents être intervenue "de façon très active depuis jeudi 16 juillet auprès de ses nouveaux interlocuteurs au sein des cabinets ministériels pour comprendre les intentions du gouvernement, expliquer la situation des salles de cinéma et permettre que le port du masque reste facultatif à l'intérieur de la salle, quand les spectateurs sont assis".

Interrogée sur ses échanges avec le gouvernement, la FNCF se contente de répondre qu'elle a eu "des discussions avec les pouvoirs publics comme tous les autres" corps de métier. Elle insiste sur le fait que les décisions sont prises par l'exécutif.

Ce ne sont pas les salles qui s'appliquent des mesures, ce sont les pouvoirs publics qui décident.

la Fédération nationale des cinémas français

à franceinfo

Sollicité par franceinfo pour avoir des explications sur le maintien du port facultatif du masque pendant les projections, le ministère de la Culture botte en touche. Il se contente de répondre qu'il est "obligatoire lors de l'arrivée dans les cinémas et salles de spectacle", "obligatoire lors des 'déambulations' et recommandé quand les spectateurs sont assis à leur place". Interrogée également, la direction générale de la santé renvoie simplement vers le décret du 18 juillet, sans davantage d'explications.

En dépit de la consigne générale, un cinéma parisien a tout de même décidé d'imposer le port du masque pendant la séance, comme quelques cinémas indépendants de Lyon. Pas sûr que cela suffise à rassurer les spectateurs, qui rechignent à se rendre dans les salles obscures pour des raisons sanitaires.

Catherine Hill estime qu'"au fond des choses, les masques sont une mesure [barrière] de deuxième ordre". Pour elle, l'enjeu principal réside dans le dépistage : "Il faut tester la population massivement, un maximum de monde, comme la Chine, qui a testé à Pékin 2,3 millions de personnes en dix jours". "Le nœud du problème, selon cette spécialiste, c'est qu'il faut trouver les porteurs du virus, les gens qui sont contagieux et qui crachent du virus autour d'eux."

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