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Mairies, écoles, transporteurs publics : ces secteurs inquiets du déconfinement du 11 mai

De nombreux professionnels de l'éducation comme des transports redoutent qu'une reprise de l'activité soit difficile à conjuguer avec les impératifs sanitaires.

Article rédigé par franceinfo
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Un employé de la RATP désinfecte une rame de métro à Vincennes (Val-de-Marne), le 2 mai 2020. (MAXPPP)

A une semaine de la date retenue par Emmanuel Macron pour assouplir le confinement mis en place dans la lutte contre la pandémie de coronavirus, la situation se tend. Elus locaux, enseignants ou encore transporteurs publics... De nombreux secteurs ont exprimé ces derniers jours des doutes sur leur capacité à reprendre une activité normale le 11 mai tout en répondant à des impératifs sanitaires renforcés pour lutter contre la propagation du Covid-19.

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Franceinfo récapitule les craintes de ceux qui redoutent que le déconfinement devienne un casse-tête quotidien.

Des maires dénoncent un déconfinement "à marche forcée"

L'une des réactions les plus spectaculaires à la réouverture des écoles le lundi 11 mai est venue de la part des maires d'Ile-de-France. Dans une lettre ouverte adressée à Emmanuel Macron, publiée sur le site de La Tribune, 329 maires ont dénoncé dimanche soir un déconfinement "à marche forcée" et demandé de repousser la date de réouverture des écoles à une date ultérieure au 11 mai, qui "permettra l'application stricte d'un protocole sanitaire".

Dans ce texte, les élus – dont la maire de Paris, Anne Hidalgo  prient le président de la République "de demander à (son) gouvernement de prioriser clairement les enfants qui pourront/devront reprendre le chemin de l'école", réclament que "des moyens financiers suffisants soient conférés aux communes" pour l'accueil périscolaire et "de faire en sorte que s'arrêtent des logiques administratives incompréhensibles en termes d'équipements du personnel éducatif".

Ce calendrier [de reprise] est, dans la plupart de nos communes, intenable et irréaliste.

329 maires d'Ile-de-France

dans une lettre à Emmanuel Macron

Les édiles franciliens soulèvent également leur crainte de voir leur "responsabilité juridique, politique et morale" engagée si des contaminations venaient à survenir dans les écoles après la levée du confinement. Les maires n'entendent "pas être des kamikazes sur une responsabilité qui n'est pas la leur au départ" quand ils "n'auront pas la possibilité, soit technique soit matérielle, de mettre en œuvre" les mesures de déconfinement, avait ainsi alerté le président de l'Association des maires de France, François Baroin, devant la commision des lois de l'Assemblée, jeudi dernier.

Pour tenter de les rassurer, quelque 138 députés et 19 sénateurs de La République en marche (LREM) ont annoncé dans le Journal du dimanche leur volonté d'ajouter dans le projet de loi prorogeant l'état d'urgence sanitaire une meilleure "protection juridique" des maires. Le gouvernement est à cet égard "prêt au dialogue", a affirmé Sibeth Ndiaye dimanche sur France Inter.

Des enseignants estiment que les "conditions sanitaires ne sont pas réunies" pour reprendre les cours

Plusieurs syndicats de l'enseignement avaient déjà dénoncé ces derniers jours une date de réouverture des écoles jugée arbitraire. La principale organisation du primaire SNUipp-FSU avait ainsi regretté que l'échéance du 11 mai n'ait été validée par aucune autorité médicale.

La publication dimanche par le ministère de l'Education nationale de la version définitive du protocole sanitaire à mettre en place dans les écoles maternelles et élémentaires n'a rien arrangé. Ce document énumère de nombreuses mesures, telles que le port du masque obligatoire pour les personnels intervenant auprès des plus jeunes, la mise en place d'un espace de 4 mètres carrés autour de chaque élève, ou encore le nettoyage quotidien et approfondi des tables, chaises, et autres équipements en contact avec les élèves.

Dans un communiqué diffusé dimanche soir, le syndicat Sud a dénoncé des "exigences intenables à mille lieues des préoccupations pédagogiques" et réclame une réouverture des établissements en septembre. "Les conditions sanitaires ne seront pas réunies et ne permettent pas une reprise en mai dans de bonnes conditions pour les élèves et le personnel : une rentrée en septembre permettrait d’avoir le temps de mieux préparer les classes et les établissements au niveau matériel ainsi que l’embauche de personnels supplémentaires", estime le syndicat.

Une inquiétude partagée par Anabel Roy. Invitée lundi de franceinfo, cette directrice d'une école élémentaire en Haute-Vienne et secrétaire départementale du syndicat SE-Unsa 87 a estimé qu'il serait "difficile de continuer à faire classe" après le déconfinement. Elle redoute notamment que tout le temps de classe disponible soit "employé à la 'formation' des enfants à tous ces gestes barrières, à toute la distanciation" au détriment de la pédagogie.

Les transporteurs publics réclament l'aide des forces de l'ordre pour réguler les flux de passagers

Les transporteurs publics regardent aussi la date du 11 mai avec anxiété. Lors de la présentation du plan de déconfinement, le 28 avril, Edouard Philippe leur a en effet demandé de "s'organiser pour permettre, même dans le métro, le respect des gestes barrières (...) au moins pour les trois semaines à venir".

Impossible, rétorquent l'Union des transporteurs publics (UTP), la RAPT, la SNCF, Keolis, Transdev et Agir. Dans un courrier adressé à Matignon et obtenu par Le Parisien/Aujourd'hui en France, ces entreprises qui assurent plus de 90% du transport public en France estiment ne pas disposer "aujourd'hui des moyens humains et des matériels de nature à satisfaire à une telle obligation". Et redoutent même que le retour des passagers dans les rames et autres bus vire au chaos.

Nous considérons de notre devoir de vous informer du risque très élevé de trouble à l'ordre public qui conduira nécessairement à l'arrêt des transports publics.

Les principales entreprises de transport public

dans une lettre à Edouard Philippe

Pour éviter une situation qu'ils jugent explosive, les transporteurs publics réclament à Edouard Philippe une "mobilisation des forces de l'ordre, nationales et municipales," afin de réguler les flux de voyageurs.

Contacté par le quotidien, le ministère de la Transition écologique et solidaire, en charge du dossier, assure que les discussions "restent ouvertes". Et promet la parution dans le courant de la semaine d'un décret permettant de préciser la manière dont l'exécutif compte conjuguer la remise en route des transports publics avec les exigences sanitaires en période de pandémie.

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