Cet article date de plus de trois ans.

Déconfinement : une psychanalyste prône la "douceur" et la "tendresse" envers les personnes atteintes du "syndrome de la cabane"

Selon Sophie Braun, la peur de ressortir est normale, y compris pour les personnes qui ont été vaccinées. 

Article rédigé par franceinfo
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Des personnes se baladent place de Jaude à Clermont-Ferrand, en mars 2021.  (BOILEAU FRANCK / MAXPPP)

La psychanalyste Sophie Braun, qui a publié La tentation du repli aux éditions Mauconduit, a expliqué mardi 18 mai sur franceinfo qu’il fallait agir "avec douceur" et "tendresse" envers les personnes atteintes du "syndrome de la cabane", qui craignent le déconfinement. "Ce ne sont pas des gens qui ne veulent plus sortir. Ce sont des gens qui ne peuvent plus sortir. C'est tout à fait différent", a-t-elle expliqué.

franceinfo : D’où vient ce phénomène ?

Sophie Braun : Il faut vraiment le dire, c'est normal. Même les gens vaccinés ont peur de ressortir car on s'est habitué à être confinés. Il a fallu trouver des ressources pour rester enfermés et maintenant, il va falloir retrouver des ressources pour ressortir. C'est très différent. Cela demande effectivement un vrai changement d'attitude et un vrai changement profond à l'intérieur de nous.

Comment se manifeste le "syndrome de la cabane" ?

Des gens qui restent enfermés chez eux et qui ne sortent plus, cela existait déjà bien avant le Covid-19. Cela fait quatre ans que je vois ce développement de ce syndrome. Il y a des formes dures. Ce sont les phobies scolaires, les enfants qui ne peuvent plus aller à l'école, les phobies sociales, les burnout graves ou les gens qui ne peuvent plus retourner travailler. Il y a au Japon une épidémie qu'on appelle hikikomori. Ce sont de gens qui ne sortent plus de chez eux depuis plus de six mois ou un an. On les appelle les hikikomoris. Ils sont 600 000 aujourd'hui. Ce n'est pas une petite épidémie. Il y a aussi des formes douces qui se sont développées, c'est-à-dire des gens qui sortent, puis qui rentrent chez eux, qui regardent des vidéos en boucle, des séries qui jouent à des jeux vidéo, etc. Cela existait déjà avant que le Covid-19 arrive et il amplifie totalement ce phénomène. C'est comme s'il y avait une allergie qui se développait, qu'on trouvait que le monde était de plus en plus toxique, que les autres étaient de plus en plus toxiques et qu'on avait du mal à retourner dehors. Évidemment, le confinement accentue tout cela. Ce n'est pas seulement des gens qui vivent seuls, mais c’est aussi des gens qui vivent en couple, qui d'ailleurs peuvent faire un cocon avec leur couple, faire un cocon avec leur famille et qui, effectivement, vont avoir beaucoup de mal à ressortir.

Faut-il se forcer à ressortir ?

Je crois qu'il ne faut pas rester à la maison parce que l'être humain n’est pas fait pour rester tout seul, isolé chez lui. Mais il ne faut pas non plus trop se forcer parce que c'est trop difficile. Il faut y aller avec douceur, avec tendresse. Je trouve qu'on n'utilise plus assez de nos jours ces mots. Cela veut dire que quand on a quelqu'un autour de soi, dont on voit qu'il a du mal à ressortir, il va falloir y aller très doucement. ‘Tu nous manques. On va aller faire une petite promenade cinq minutes dehors, juste retrouver un petit soleil ou quelques gouttes de pluie. Ensuite, on va s'asseoir à une terrasse’, quelques jours après. Il faut vraiment y aller tout doucement. Il faut entendre que ce sont des angoisses et que c'est de la souffrance. Ce ne sont pas des gens qui ne veulent plus sortir. Ce sont des gens qui ne peuvent plus sortir. C'est tout à fait différent. 

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.