Déconfinement : "On ne peut pas imaginer que les 5 millions de voyageurs quotidiens dans le réseau d'Ile-de-France se précipitent le 11 mai"
Gilles Dansart, spécialiste des transports du ferroviaire et directeur du site Mobilettre, se projette sur la mise en oeuvre du déconfinement dans les transports en commun.
"On ne peut pas imaginer que les 5 millions de voyageurs quotidiens dans le réseau d'Ile-de-France se précipitent le 11 mai", estime vendredi 24 avril sur franceinfo Gilles Dansart, spécialiste des transports du ferroviaire et directeur du site Mobilettre. Pour lui, il faut que les gestes barrières soient bien respectés, mais aussi que les entreprises et écoles adaptent leurs horaires pour ne pas saturer les réseaux de transports.
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franceinfo : Est-il vraiment envisageable de voir des millions de voyageurs dans les rames du métro en Ile-de-France à partir du 11 mai ?
Gilles Dansart : Dans les niveaux d’offres que promettent aujourd'hui les opérateurs, non, on ne peut pas imaginer que les 5 millions de voyageurs quotidiens dans le réseau d'Ile-de-France se précipitent le 11 mai. Ça, ça donnerait des situations de saturation comme aux plus belles heures des grèves. Il faut vraiment qu'il y ait beaucoup moins de monde dans les modes de transport pour que les distanciations de sécurité soient respectées, qu'il y ait moins de pression. Pour bien comprendre, aux heures d'affluence, il y a 4 à 5 personnes au mètre carré. Si on garde le même nombre de gens, même si on divise par 2 avec 70 % ou 50 % d'offre, on aura encore une pression beaucoup trop forte. Donc il faut vraiment, à la fois, qu’il y ait beaucoup moins de monde, et puis surtout, lisser les pointes du matin et du soir. Qu'il n'y ait pas ces affluences du matin et du soir comme en temps normal. C'est ça qui va faire que les gens retrouveront confiance dans les transports en commun : moins de monde et plus de voyages étalés dans la journée.
Selon vous, ce sont les entreprises qui doivent anticiper en plus des mesures de la RATP ?
Il n'y a pas le choix, c'est-à-dire télétravail, réduire les déplacements au minimum possible. Il faut savoir, par exemple, que 10 % des déplacements, c’est du "études-domicile". Là aussi, il faut faire en sorte que les établissements scolaires modulent les horaires de cours. Il y a tout un ensemble de choses pour faire en sorte que le 11 mai, la pression ne soit pas tout d'un coup trop forte. Parce que là, on se retrouverait avec des phénomènes de saturation. Le 11 mai, dans la première semaine, il faut vraiment se méfier des phénomènes d'affluence parce que là, on perdrait tout l'intérêt du confinement pendant des semaines avec un risque de contamination élevé. C’est vraiment cette montée progressive qui assurera le retour de la confiance chez les voyageurs.
Si les masques sont obligatoires, il faut aussi contrôler le respect de cette obligation, ce qui est compliqué ?
Tout à fait. C'est là où l'Etat hésite, parce que si l'État prescrit les masques obligatoires, cela veut dire qu'il faut envisager une verbalisation en cas de non-port du masque. Et à ce moment-là, tout le monde va se dire oui, mais on prescrit, mais on ne donne pas les masques aux voyageurs. Tout le monde se renvoie la balle. L'Etat, qui n'a pas de masques et qui voudrait bien pourtant, pour des raisons sanitaires, que tout le monde en porte, les entreprises, qui sont un peu responsables du trajet de leurs salariés, mais qui n'ont pas les moyens de donner des masques à tout le monde. Et puis les opérateurs de transport, et c'est normal, qui veulent d'abord privilégier la sécurité de leurs salariés. On voit bien que sur les masques, un mois et demi après le début du confinement, on est encore dans une gestion assez difficile de leur pénurie.
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