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Covid-19 : comment le gouvernement espère ouvrir plus de 2 000 lits de réanimation "dans les prochains jours"

Demandant "un effort des soignants", Emmanuel Macron a fixé, mercredi, un objectif d'un peu plus de 10 000 lits de réanimation, contre 7 665 à l'heure actuelle.

Article rédigé par franceinfo
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Un patient Covid est transféré par le Samu du Nord, le 22 mars 2021, dans une chambre de l'hôpital privé de Bois-Bernard (Pas-de-Calais), qui a ouvert un service de réanimation. (MAXPPP)

Il réclame à tous les Français "un effort supplémentaire". Emmanuel Macron a annoncé, mercredi 31 mars, de nouvelles mesures destinées à lutter contre la troisième vague de Covid-19 dans l'Hexagone. Avant de détailler les restrictions imposées aux citoyens, le chef de l'Etat a demandé "un effort des soignants d'abord, pour augmenter nos capacités en réanimation". Il a fixé un objectif chiffré, qu'il entend atteindre "dans les prochains jours" "un peu plus de 10 000 lits", contre "7 000" à l'heure actuelle, selon lui (7 665 en réalité, dont 7 053 déjà occupés). Mais comment compte-t-il y arriver ?

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En ouvrant de nouvelles unités

Saluant la mobilisation des soignants pour "transformer des salles d'opération en salles de réanimation", Emmanuel Macron a évoqué des initiatives supplémentaires, comme "l'ouverture de nouvelles capacités d'accueil dans certains hôpitaux parisiens". Une nouvelle unité de réanimation doit ainsi ouvrir à l'hôpital Henri-Mondor de Créteil (Val-de-Marne), avec une capacité de 60 lits, a détaillé le ministre de la Santé, Olivier Véran, jeudi, sur France Inter. "On va être capables d'ouvrir plusieurs centaines de lits" en Ile-de-France, a-t-il précisé.

Des "lits éphémères de réanimation" ouvrent dans "les salles de réveil, les blocs opératoires ou les autres secteurs de médecine transformés en soins intensifs", avec du matériel supplémentaire, ajoute Bruno Mégarbane, chef du service de réanimation de l'hôpital Lariboisière à Paris, sur LCI. Il appelle à hiérarchiser les lits disponibles.

"Il sera important de réserver les lits de réanimation pérennes, avec les médecins réanimateurs professionnels et infirmiers de réanimation habituels, aux patients les plus lourds."

Bruno Mégarbane, chef du service de réanimation de l'hôpital Lariboisière

sur LCI

Selon lui, "les autres unités qui s'ouvriraient, principalement pour des soins intensifs sans intubation, pourraient être surveillées par des médecins non réanimateurs" et "des étudiants infirmiers ayant reçu une formation accélérée en soins critiques".

En déprogrammant encore plus d'opérations

Pousser les murs des services de réanimation implique bien souvent de grignoter les lits des autres services, donc de les vider de leurs patients par le biais de déprogrammations d'actes médicaux. Si le chef de l'Etat espère atteindre 10 000 lits "sans trop déprogrammer", cela reste inévitable, comme l'a reconnu le porte-parole de l'exécutif, jeudi.

"On a une capacité à déployer des lits de réanimation supplémentaires, jusqu'à 10 000, mais évidemment cela se fait au prix de reprogrammations d'actes qui devaient avoir lieu."

Gabriel Attal, porte-parole du gouvernement

sur BFMTV

Si le mouvement est enclenché depuis des semaines dans les hôpitaux, désormais, "la marge de manœuvre est sur la fermeture des cliniques qui n'ont pas d'activité de réanimation et qui ne font que de la chirurgie réglée", estime le secrétaire général de la Société française d'anesthésie et de réanimation, Jean-Michel Constantin. Il réclame la "réquisition" du personnel de ces cliniques "afin de venir travailler à l'hôpital ou dans d'autres cliniques où on fait de la réanimation".

En faisant appel à des renforts extérieurs

Le président l'a assuré : les soignants "sont et seront appuyés dans les prochains jours par des renforts supplémentaires". Il a mentionné "les étudiants en médecine, les retraités, le service de santé des armées, tous les volontaires de la réserve sanitaire", sans préciser quelle était l'ampleur du vivier.

"La problématique, au-delà de faire des lits, ce sont les personnes qui vont aider", a insisté Benjamin Davido, infectiologue et directeur médical de crise à l'hôpital Raymond-Poincaré de Garches (Hauts-de-Seine), jeudi, sur Radio Classique. Les profils les plus recherchés sont notamment "les anesthésistes-réanimateurs", qui sont d'ordinaire affectés aux opérations chirurgicales et qui, du fait des déprogrammations, peuvent venir en renfort des réanimateurs. S'il estime que l'objectif de 10 000 lits est "le bon", Benjamin Davido dit redouter "une médecine dégradée, à deux vitesses". 

"Les étudiants ne peuvent pas gérer à eux seuls ces lits et les retraités sont plus fatigués et n'ont pas fait les mêmes études au même moment, avec les mêmes réflexes."

Benjamin Davido, infectiologue à l'hôpital de Garches

sur Radio Classique

Pour éviter d'en arriver là, "des formations d'étudiants, de retraités sont déjà lancées", assure Rémi Salomon, le président de la commission médicale d'établissement de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris, au Parisien (article abonnés).

Quant au service de santé des armées, il est "réduit comme peau de chagrin", déplore Jean-François Timsit, chef du service de réanimation à l'hôpital Bichat à Paris. Tout au plus, espère-t-il, "peut-être qu'ils pourront mobiliser quelques hôpitaux de campagne", comme au printemps dernier, notamment à Mulhouse.

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