"L'État nous a livrés en pâture, il a abandonné les petites gens" : la peur et la colère des salariés qui continuent à travailler
Les syndicats alertent sur les conditions de travail des salariés face au coronavirus. Exemple à Fleury-Mérogis, dans la société de transport XPO, qui livre une trentaine de magasins. Six cas de Covid-19 ont été recensés et un salarié en est mort.
L’annonce a tétanisé les 230 salariés du transporteur XPO à Fleury-Merogis : une de leur collègue est morte dimanche 5 avril du coronavirus. 48 ans, deux enfants. Elle travaillait depuis 17 ans sur cette plateforme logistique qui alimente une trentaine de magasins Carrefour en produits frais. Six autres salariés ont été testés positifs ou sont suspectés de l’être. L’un deux a contaminé sa famille.
"Mon mari est rentré du travail le vendredi 19 mars, on lui a dit qu'il y a avait un cas de Covid identifié là-bas", raconte son épouse. Le lundi suivant, les premiers signes de la maladie se manifestent : "Il avait tout : courbatures, maux de tête, mal au ventre, vomissements, etc. Une semaine après, j'ai eu les symptômes, c'est moi qui suis tombée malade. Ma maman qui habite chez nous a été contaminée et fin de semaine dernière, ça c'est aggravé, elle a dormi à l'hôpital et elle est sous assistance respiratoire."
Ni gants, ni masque, ni lingette
Selon la CGT, la direction n’a pas réagi suffisamment vite. Elle a attendu l’annonce du premier cas de coronavirus, le 19 mars, et un droit de retrait massif des salariés pour fournir masques, gants et gel hydro-alcoolique. "Avant le 19 mars, on n'avait pas de masque ni de gants, les masques étaient en rupture de stock, raconte David Mondesir, délégué CGT. Donc avec des collègues, on est allés sur le site d'un Auchan qui n'est pas loin pour aller chercher des gants et des lingettes pour désinfecter les claviers et les écrans qu'on utilise assez souvent."
De son côté, la déléguée UNSA Justine Gaubier, a écrit plusieurs fois à l’inspection du travail pour réclamer de l’aide. En vain. Elle laisse éclater aujourd’hui sa colère : "L'État a abandonné les petites gens".
Je suis en pétard. L'État nous a demandé de travailler pendant que tout le monde est en confinement sans nous donner les moyens sanitaires pour aller exercer notre métier et nous a livrés en pâture.
Justine Gaubier, déléguée UNSAà franceinfo
D’après les syndicats, la direction a encore renforcé les mesures : contrôle automatique de la température, nouveau nettoyage du site, cellule psychologique. Car d'après la CFDT, les salariés sont traumatisés : plus de la moitié d’entre eux sont arrêtés ou confinés et l’entreprise a fait appel à de nombreux intérimaires.
XPO Logistics explique de son côté avoir étendu le télétravail "pour toutes les personnes dont les activités le permettent". Et assure avoir pris "des mesures de prévention pour assurer la santé et la sécurité de [ses] salariés et de leurs familles, en suivant les recommandations de l'Organisation mondiale de la santé, ainsi que [ses] propres protocoles internes". "Nous avons demandé à nos salariés de rester chez eux s'ils sont malades ou pensent avoir été exposés au Covid-19, explique l'entreprise dans un communiqué, et de signaler toute éventuelle exposition, tout problème de santé ou tout déplacement dans des zones à haut risque."
La CGT appelle à une grève généralisée dans les activités de commerce et de services à partir de mercredi 8 avril. Le syndicat dénonce le manque de protection des salariés face à l'épidémie de coronavirus.
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