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À Mayotte, "nous ne sommes pas en situation de déconfiner", prévient la directrice de l’ARS Dominique Voynet

Avec 3 nouveaux décès en 24 heures et un hôpital saturé, l'archipel n'est pas en situation de se déconfiner en même temps que le reste du pays, avertit la directrice de l'ARS. 

Article rédigé par franceinfo
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Dominique Voynet, directrice de l'ARS de Mayotte. Ici le 31 janvier 2017 à Paris.  (LUC NOBOUT / MAXPPP)

"Nous ne sommes pas en situation de déconfiner", a prévenu ce mardi 5 mai sur franceinfo l’ancienne ministre Dominique Voynet, directrice de l’Agence régionale de santé (ARS) de Mayotte. "Les chiffres sont implacables, avec plus de 30 à 40 cas par jour, une augmentation du nombre des hospitalisations en médecine et en réanimation et une augmentation du nombre des décès", a-t-elle souligné. Selon elle, il serait "déraisonnable" de sortir du confinement "avant la fin du ramadan, vers le 25 mai", d'autant que Mayotte doit également faire face à une épidémie de dengue. Dominique Voynet a par ailleurs jugé "scandaleux" les propos du député LR Mansour Kamardine qui a récemment évoqué un "abandon coupable" de la part de l’État.

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franceinfo. Le début du déconfinement à Mayotte n’aura pas lieu en même temps qu’en métropole. Pour quelles raisons ?

Dominique Voynet. Tout simplement parce que la progression de l'épidémie nous y contraint. Nous avions, depuis le début, six à sept semaines de retard sur la métropole. Les chiffres sont implacables, avec plus de 30 à 40 cas par jour, une augmentation du nombre des hospitalisations en médecine et en réanimation et une augmentation du nombre des décès.

Nous ne sommes pas en situation de déconfiner, mais au contraire de convaincre la population que le confinement seul protégera la vie des plus fragiles et des plus âgés. 

Je ne doute pas que les Mahorais comprendront, soutiendront l'idée de ne pas déconfiner trop rapidement, trop brutalement. Pour ma part, je pense que ce serait déraisonnable de le faire avant la fin du ramadan, vers le 25 mai.

Dominique Voynet, directrice de l'ARS de Mayotte

à franceinfo

C'est quelque chose, évidemment, qui va se faire par étapes, avec le souci aussi de ne pas laisser décrocher de l'école trop d'enfants.

Combien de personnes sont actuellement en réanimation à Mayotte ? Combien de personnes sont décédées ?

Aujourd'hui, les chiffres rendent imparfaitement compte de la dynamique. On a eu trois nouveaux décès en 24 heures, ce qui est évidemment tout à fait préoccupant, ça n'était jamais arrivé jusqu'ici. Et nous avons en réanimation cinq, six, sept personnes selon les jours qui sont atteintes par le Covid-19.

Mais ce qui est plus préoccupant encore, c'est que nos services de médecine se sont remplis fortement ces derniers jours. On considère qu'il y a ce matin 44 personnes atteintes du Covid au sein de l'hôpital de Mayotte, dont les capacités sont limitées. C'est un hôpital qui est saturé tous les jours de l'année et nous sommes donc contraints à la fois d'augmenter nos capacités dans cette période, mais aussi de prévoir des évacuations sanitaires vers le CHU de La Réunion.

Combien y a-t-il de lits de réanimation ? Sont-ils tous occupés actuellement ?

Nous avons d'habitude 16 lits de réanimation. Nous sommes passés à 24 et nous pouvons aller jusqu'à 38 lits avec nos propres moyens. Nous travaillons actuellement avec les services de santé des armées pour renforcer encore ces moyens. L'installation d'un module militaire de réanimation d'une dizaine de lits va être effectif avant la mi-mai et nous verrons si c'est suffisant ou si nous devons installer 10 lits supplémentaires avant la fin du mois de mai.

L'épidémie de dengue est-elle une complication supplémentaire ?

L'épidémie de dengue était préexistante à l'épidémie de Covid-19 et elle a tué à Mayotte jusqu'à présent plus que le Covid-19. C'est une préoccupation très forte pour moi. Cette épidémie a monté en puissance depuis le début de l'année 2020 et touche chaque semaine des centaines de personnes qui sont effondrées de fatigue et de douleurs articulaires dans leurs maisons ou qui sont amenées à être prises en charge à l'hôpital. On a eu déjà 340 hospitalisations pour la dengue, 22 patients admis en réanimation et 16 décès depuis le début de l'année, ce qui est beaucoup, et évidemment préoccupant, dans un département où la population est jeune, et où on a beaucoup de personnes atteintes de maladies qui les fragilisent : de l'obésité, du diabète, de l'hypertension, des insuffisances rénales, des cancers. C'est évidemment des terrains sur lesquels la dengue ou le coronavirus ont un impact tout à fait dévastateur.

Que pouvez-vous répondre au député de Mayotte, Mansour Kamardine, qui a évoqué un "abandon coupable" à l'égard de Mayotte de la part de l'État ?

Je trouve cette réaction scandaleuse. Il est dans son rôle quand il alerte l'État. Il a été pris en charge d’une façon tout à fait tout correcte quand il en a eu le besoin. Mais personne ici n'est abandonné. 

L'État a renforcé très fortement les moyens à Mayotte, on a des soutiens civils, on a des soutiens militaires. La réserve sanitaire est là.

Dominique Voynet, directrice de l'ARS de Mayotte

à franceinfo

Le service de santé des armées s'apprête à déployer 10 lits supplémentaires de réanimation. Franchement, je ne comprends pas ce genre de réactions qui me paraît politicienne, qui me paraît à courte vue et qui ne répond pas du tout aux besoins de Mayotte.

On a besoin d'avoir des élus motivés, présents aux côtés de la population pour l’alerter sur le respect des gestes barrières. Aujourd'hui, ce ne sont pas les gesticulations qui protègent les Mahorais, c'est le fait d'encourager à utiliser de l'eau, du savon pour se laver les mains, à porter un masque quand on est en contact trop rapproché de ses semblables et à respecter chaque fois que c'est possible les gestes barrières.

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