Environnement : "On n'a pas d'autre solution que de diminuer la production de plastique", selon Isabelle Autissier, présidente d'honneur de WWF
Le recyclage ne suffira pas, souligne la présidente d'honneur de WWF : elle souhaite que les Etats prennent des engagements contraignants pour réduire la production de plastique, un véritable "fléau" pour la nature comme pour la santé humaine.
"On n'a pas d'autre solution que de diminuer la production de plastique", a souligné la navigatrice et présidente d'honneur de WWF Isabelle Autissier, ce lundi 29 mai sur franceinfo, alors que s'ouvre à Paris le deuxième cycle de négociations pour tenter d'élaborer d'ici fin 2024 un traité juridiquement contraignant sous l'égide des Nations unies pour mettre fin à la pollution plastique.
L'enjeu est de taille alors que la production annuelle a plus que doublé en 20 ans pour atteindre 460 millions de tonnes. "C'est devenu un enjeu absolument colossal et absolument mondial", assure-t-elle.
franceinfo : Le premier objectif du futur traité plastique sera la "réduction de l'usage et de la production de plastique". Faut-il contraindre ou faire confiance aux pays dans la réduction de la production du plastique ?
Isabelle Autissier : On va être obligé d'arriver à des engagements contraignants. On ne peut pas juste faire confiance à la bonne volonté. La contrainte peut porter sur les producteurs, la contrainte peut aussi être en termes de taxation de certains produits. Aujourd'hui, pour les Etats, un kilo de plastique coûte dix fois plus cher en dépollution qu'en production. L'enjeu, il est tellement fort que oui, il va falloir convaincre, mais il va falloir convaincre que c'est l'intérêt de tous les États de se débarrasser de ce fléau.
Plusieurs pays, dont les pays européens et la France, paraissent volontaires sur la question avec en priorité le fait d'arrêter de produire du plastique et non plus en mettant en avant le recyclage, qui lui est et plutôt poussé par les professionnels du secteur…
On s'aperçoit que le recyclage fonctionne extrêmement mal parce qu'on a du plastique multiple. On n'arrive pas à refaire un "plastique neuf" avec du vieux plastique. On est toujours obligé de réintroduire en partie du plastique neuf. Avec le recyclage, l'objectif de diminuer les plastiques en circulation n'est donc pas tenu. Et puis, la production de plastique double à peu près tous les 20 ans.
Là, le focus doit être sur les plastiques à usage unique parce que pour quelques secondes d'utilisation, c'est plusieurs centaines d'années dans l'environnement et dans nos corps. On n'a pas d'autre solution que de diminuer la production de plastique car on en retrouve de plus en plus dans la nature.
Vous qui êtes navigatrice, voyez-vous au plus près les ravages du plastique sur les océans ?
Moi, quand j'ai commencé à naviguer, il n'y avait pas de plastique sur les plages. C'était quelque chose qui était rarissime. Aujourd'hui, quand je vais dans des endroits comme le nord du Spitzberg, le nord du Groenland, des endroits théoriquement complètement vierges, où il n'y a pas d'humains, tout est absolument jonché de plastique. C'est vraiment une horreur et ça fait mal au cœur.
Sans parler évidemment de tous les microplastiques qu'on ne voit pas à l'œil nu, mais qui sont à l'œuvre, qui rentrent dans la chaîne alimentaire. On absorbe tous environ l'équivalent d'une carte de crédit par semaine en termes de plastique, soit cinq grammes. Or, évidemment, ce sont la plupart du temps des produits extrêmement nocifs pour notre santé. C'est devenu un enjeu absolument colossal et absolument mondial. Il n'y a pas un seul État qui puisse dire le contraire.
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