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"La première règle c'est de ne pas contraindre" les enfants. Des parents Youtubeurs témoignent

Une association demande à la justice de se pencher sur les vidéos d'"unboxing", ces vidéos sur YouTube qui mettent en scène des enfants en train de tester des jeux ou des vêtements, filmés par leurs parents.

Article rédigé par Benjamin Illy
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Capture d'écran de la chaîne Démo Jouets sur YouTube (Capture d'écran YouTube Démo Jouets)

Sur internet, ce sont parfois des stars. Leur chaîne YouTube rassemblent des millions d'abonnés et ils ont 8, 10, ou encore 12 ans. Ces enfants sont filmés par leurs parents dans des vidéos d'"unboxing" ("déballage" en anglais). Un phénomène qui vient des États-Unis et qui cartonne en France, depuis quelques années, mais il commence également à inquiéter l'Open, l'Observatoire de la parentalité et de l'éducation numérique.

L'association a envoyé plusieurs courriers à la justice pour lui demander de s'emparer du sujet. Le Conseil national de protection de l'enfance a également été saisi. Mais ces enfants sont-ils vraiment en danger ? franceinfo s'est plongé dans le monde des créateurs de ces chaînes.

Des enfants testeurs

Le plus souvent, ces enfants sont filmés en train de tester des jouets face caméra. Par exemple, dans la vidéo ci-dessous, on aperçoit la jeune Kalys en train d'enfiler une robe Disney. Elle a été vue plus de 21 millions de fois. C'est son papa, Mickaël qui filme pour Studio Bubble Tea, une chaîne YouTube qui compte plus d'1,2 million d'abonnés. Les marques bien sûr ne se font pas prier pour être citées.

Mais Mickaël l'assure, ce n'est pas l'appât du gain qui l'a poussé dans cette aventure. "Ce qui nous a motivé au départ est toujours là, c'est le plaisir de partager des moments en famille", explique le père de famille.

Il affirme avoir pris l'initiative, "il y a plusieurs mois de contacter et rencontrer les services de la protection de l'enfance". À l'époque, ces derniers "ne voyaient aucune objection à continuer ces vidéos, même sur YouTube". Le papa reconnaît néanmoins le manque de cadre juridique, mais il n'est pas forcément convaincu par le terme "travail" quand on parle de la participation de ses deux filles à cette chaîne. Pour lui, il s'agit de "vidéos basées sur le volontariat".

On sort beaucoup, on voyage, on pratique des ateliers créatifs, on joue en famille... et pas toujours avec une caméra.

Mickaël, papa Youtubeur

Quand on l'interroge sur le montant de ses revenus liés à cette chaîne. Impossible de savoir. Le père de famille ne peut pas "contractuellement" communiquer à ce sujet. Mais pour se faire une idée, il déclare : "Ce que la chaîne peut rapporter m'a permis d'acquérir un domicile pour mes filles et moi, lequel domicile appartient déjà à mes filles s'il m'arrivait quelque chose. C'est ma manière de penser et de faire".

Aucune protection juridique

Alexandre est le papa de Démo Jouets, une chaîne qui réunit plus de 900 000 abonnés sur YouTube. Lui, affirme dégager un salaire net de "2 600 euros mensuels" gràce à ses vidéos. Ses deux enfants touchent chacun 10% des bénéfices, un argent déposé sur un compte à leur nom et qu'ils toucheront à leur majorité. "N'ayant pas de cadre juridique, ils ne peuvent pas être déclarés enfants comédiens", rappelle le père.

Le Code du travail n'encadre pas l'activité des mineurs sur internet. C'est pour cette raison que l'Open milite pour que ces Youtubeurs juniors puissent bénéficier du statut d'enfant du spectacle", un statut très protecteur. Il y a urgence pour l'association, car selon elle, ces chaînes d'"unboxing" peuvent nuire à l'équilibre des enfants qui pourraient être "exploités et manipulés par leurs parents" à des fins lucratives.

Des dérives, il peut y en avoir, reconnaît Alexandre qui en appelle à la responsabilité des parents vis-à-vis de leurs enfants. "La première règle, c'est de ne pas les contraindre, ne pas faire cette activité au détriment d'autres activités périscolaires", déclare-t-il. "D'autres parents peut-être moins attentifs, moins scrupuleux, peuvent faire une vidéo par jour voire deux et là pour le coup, c'est beaucoup."

Faut-il interdire aux parents de mettre en scène leurs enfants sur YouTube ? Reportage de Benjamin Illy

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