Arrêts maladie payés par les employeurs : "Les entreprises ne peuvent pas supporter un accroissement de leurs charges sans contrepartie"
Selon Jean-Jacques Zambrowski, économiste de la santé, les petites et moyennes entreprises "ont tout à fait raison de s'en inquiéter".
"Ni les administrations, ni les entreprises ne peuvent supporter un accroissement de leurs charges sans contrepartie quelconque", a déclaré, jeudi 2 août sur franceinfo, le professeur Jean-Jacques Zambrowski, économiste de la santé et praticien en médecine interne à l'hôpital Bichat à Paris. Le gouvernement a dévoilé, jeudi, une piste de travail pour réduire les dépenses de la Sécurité sociale en faisant payer aux employeurs les arrêts maladie de moins de huit jours de leurs salariés.
franceinfo : Selon vous, est-ce que la recherche d'économies est la seule motivation du gouvernement s'il suit cette préconisation ?
Jean-Jacques Zambrowski : On ne voit pas quelle autre raison pourrait motiver une telle décision. On en voit surtout les limites et les inconvénients. C'est exact - tout le monde le sait - un certain nombre d'arrêts maladie n'ont pas forcément la justification qu'ils devraient avoir, dans le secteur public en particulier. Paradoxalement, on sait très bien que certains se demandent un an à l'avance quand ils vont prendre leurs huit ou quinze jours d'arrêts maladie. Cela étant dit, c'est une mesure qui vise à restreindre le déficit persistant de la Sécurité sociale, mais ce qui ne serait plus à la charge de la Sécu serait à la charge des entreprises. Les entreprises petites ou moyennes et les entreprises artisanales, qui sont déjà en grande difficulté, ont tout à fait raison de s'en inquiéter. Je crois aussi que les instances patronales sont vent debout contre cette mesure.
Si les chefs d'entreprises doivent mettre la main à la poche pour payer les arrêts maladies, est-ce qu'on ne risque pas une chasse aux arrêts maladies dans l'entreprise ?
Il est clair qu'un certain nombre d'arrêts maladie peinent à trouver une véritable justification dans leur déclenchement ou dans leur durée. Il y a aussi de vrais arrêts maladie. La seule théorie qui permettrait de justifier ce désengagement serait de diminuer d'autant les cotisations d'arrêts maladie que payent les entreprises et les salariés. On ne voit pas pourquoi on maintiendrait un taux de cotisations à ce qu'il est, tout en diminuant les versements. Et pourquoi le secteur public serait exonéré de ce nouveau régime ? Qu'il y ait une pensée sérieuse pour sur la nécessité d'arrêts maladie, leur justification, le fait d'accompagner une personne qui ne peut véritablement pas travailler et à l'inverse de stigmatiser ceux qui abusent du système, repenser le système en étant équitable entre le secteur privé et public, parce que ni les administrations, ni les entreprises ne peuvent supporter un accroissement de leurs charges sans contrepartie quelconque.
Des députés de La France insoumise avaient demandé à ce que le burn-out - et plus largement l'épuisement professionnel - soit reconnu comme maladie professionnelle, cette demande a été rejetée, y êtes-vous favorable ?
C'est une véritable maladie professionnelle. Il n'était pas déraisonnable du tout que ces députés souhaitent que cette affection, liée à cette charge de travail et aux conditions de travail, soit reconnue comme une pathologie liée au travail et donc une maladie de type professionnelle. La difficulté est dans le fait de véritablement reconnaître ce qu'est un burn-out authentique d'un autre qui l'est moins. C'est faire le tri qui est difficile mais je pense qu'on peut trouver des moyens et que la revendication de certains parlementaires est légitime.
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