Un ancien gendarme rwandais comparaît devant la justice française pour génocide
Trois décennies après la guerre civile au Rwanda et le génocide des Tutsis qui a fait des centaines de milliers de morts, un ancien gendarme rwandais est jugé, à partir de mercredi 10 mai, par la cour d'assises de Paris. Naturalisé français en 2005, l'ex-militaire aujourd'hui âgé de 66 ans est accusé de crimes qu'il nie formellement.
Avant d'acquérir la nationalité française, cet homme s'appelait Philippe Hategekimana. Il était adjudant-chef à la gendarmerie de Nyanza, une petite ville à une centaine de kilomètres au sud de la capitale Kigali. L'accusation le soupçonne d'être impliqué dans le meurtre du bourgmestre d'une localité voisine et dans l'assassinat de dizaines de Tutsis, des crimes qu'il nie formellement.
Réfugié en France puis naturalisé en 2005 sous le nom de Philippe Manier, il était parti pour le Cameroun en 2017 avant d'y être interpellé puis extradé. L'ancien sous-officier, aujourd'hui âgé de 66 ans, n'est pas le premier Rwandais à être jugé dans l'hexagone pour des faits liés à la guerre civile au Rwanda et au massacre des Tutsis en 1994. Un capitaine de la garde présidentielle rwandaise et deux bourgmestres ont été condamnés en France respectivement à 25 ans de prison et à la perpétuité. Un ancien préfet et un ex-chauffeur d'hôtel ont fait appel de leur condamnation.
Un contexte historique sensible entre la France et le Rwanda
Près de 30 ans après les faits, le procès de Philippe Manier s'est ouvert mercredi 10 mai devant la cour d'assise de Paris, il est jugé pour "génocide" et "crime contre l'humanité". Ses avocats avancent que les preuves sont difficiles à établir et insistent d'abord sur le chaos régnant dans le pays à l'époque après des années de guerre civile, un affrontement principalement ethnique entre Hutus et Tutsis. Ils affirment que leur client a fait de son mieux dans cette période troublée et qu'il n'a rien à se reprocher.
Les défenseurs de l'ancien gendarme rwandais insistent également sur la disparition de certains survivants trois décennies plus tard. Les parties civiles estiment au contraire que le temps long permet d'évaluer la fiabilité des témoignages.
Ce procès s'inscrit dans un contexte historique sensible entre la France et le Rwanda. Des relations diplomatiques rompues par le Rwanda entre 2006 et 2010 car la justice française avait mis en cause l'entourage de l'actuel président rwandais Paul Kagamé dans l'attentat qui a coûté la vie à l'un de ses prédécesseurs Juvénal Habyarimana pendant la guerre civile en 1994. Il avait tué dans l'explosion de son Falcon touché par un missile. La justice française ayant renoncé à cette piste, les relations ont été rétablies.
Désormais la France multiplie les gestes pour s'attirer les bonnes grâces du président rwandais, un dirigeant assez sourcilleux, au pouvoir depuis 23 ans.
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