En Inde, des femmes militent pour que le viol conjugal soit criminalisé

Dans la réforme accompagnant la reconduction de Narendra Modi pour un 3e mandat, les lois relatives aux agressions sexuelles ont été "renforcées" lundi. Mais c'est bien insuffisant pour nombre de militantes de droits des femmes.
Article rédigé par Valérie Crova
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Beaucoup de viols conjugaux ne sont pas signalés à cause de la pression sociale. Photo d'illustration. (SHUBHAM KOUL / AFP)

En Inde, un nouveau Code pénal est entré en vigueur lundi 1er juillet 2024. La réforme avait été initiée avant les élections qui ont porté au pouvoir Narendra Modi pour un 3e mandat. Dans le cadre de cette réforme, les lois relatives aux agressions sexuelles ont été "renforcées". Mais les Indiennes veulent davantage de protection, notamment en portant le viol conjugal au rang d'un crime.

Un Code pénal venu du XIXe siècle qui se modernise trop lentement

Dans le Code pénal indien, hérité de l'ère britannique, il existe une clause d'exception qui stipule qu'un homme qui contraint sa femme à avoir une relation sexuelle n'est pas considéré comme un violeur. Avec la réforme, l'âge minimum, auquel un homme peut abuser de sa femme, est passé de 15 ans à 18 ans. Mais la clause d'exception demeure, ce n'est toujours pas considéré comme un viol.

Pour l'Association des femmes démocratiques de l'Inde, cette clause s'apparente à du colonialisme issu d'une mentalité victorienne. Elle a déposé un recours devant la Cour suprême indienne. Il faut savoir qu'au moment de son indépendance, en 1947, l'Inde a hérité du Code pénal britannique, qui était en vigueur au XIXe siècle, et qui a ensuite été modernisé par ses Parlements successifs.

D'après une étude réalisée entre 2019 et 2021 sur la santé des familles, près d'un tiers des femmes mariées, âgées de 18 à 49 ans, ont déjà subi des violences conjugales. Le plus souvent, ce sont des mariages arrangés. Le problème, c'est que beaucoup de cas ne sont pas signalés à la police en raison des phénomènes de stigmatisation des plaignantes. Malgré les agressions dont elles sont victimes, certaines femmes retournent vivre auprès de leurs maris car la pression sociale est beaucoup trop importante.

Influence des castes et nationalisme hindou

Le gouvernement indien a en projet un nouveau Code civil, censé moderniser des pratiques jugées archaïques. Actuellement, les cohabitations ne sont pas bien acceptées en Inde et les couples non mariés ont souvent du mal à trouver un logement. Les conséquences peuvent être beaucoup plus graves pour les mariages interconfessionnels ou entre deux personnes de castes différentes : désaveu familial, mises à l'écart et parfois crimes d'honneur. Si une femme d'une caste supérieure veut se marier à un homme d'une caste inférieure, ou l'inverse, la femme sera de toute façon considérée comme celle qui a transgressé les normes sociales.

Reste que beaucoup d'Indiens doutent que le nouveau Code civil ne vienne s'opposer à des pratiques sociales profondément ancrées dans la société, surtout avec la réélection de l'ultra nationaliste Narendra Modi. Dans l'Uttar Pradesh, État dans le nord de l'Inde dirigé par un proche de Modi, un musulman qui épouse une femme hindoue risque jusqu’à dix ans de prison. Tout est fait pour empêcher les conversions à l'Islam.

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