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En Inde, des femmes musulmanes proposées aux enchères sur internet

Une application qui proposait des femmes indiennes musulmanes à la vente a été fermée. La police a arrêté les premiers suspects. Mais ce n'était pas la première initiative du genre dans un pays où l'islamophobie grandit.

Article rédigé par franceinfo - Sébastien Farcis, édité par Ariane Schwab
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2 min
Une femme indienne musulmane (illustration). (NOAH SEELAM / AFP)

L’Inde a été secouée cette semaine par une horrible campagne islamophobe diffusée sur internet. L’application Bulli Bai présentait les photos, parfois retouchées et dégradantes, d’une centaine de femmes musulmanes et proposait de les vendre aux enchères. Aucune transaction n’a eu lieu avant qu’elle soit retirée d'internet.

L’objectif était surtout d’humilier des femmes musulmanes connues. Les profils comptaient en effet des militantes, avocates, une pilote de ligne ainsi que beaucoup de journalistes.   

"Nous avons été ciblées car nous sommes des femmes, nous sommes musulmanes, nous avons un esprit libre et indépendant, et nous réussissons dans la vie."

Sayema Rahman, journaliste

à franceinfo

"Nous parlons au nom des oppressés, essayons de lutter contre les injustices, et ceci est une campagne organisée pour nous faire taire", dénonce Sayema Rahman, l’une des journalistes ciblées.  

Ce n'était pas la première action du genre. En juillet dernier, quasiment le même système avait été utilisé contre 80 femmes, en utilisant une autre application appelée Sulli Deals. Des plaintes avaient été déposées, mais ses inventeurs n’ont pas été identifiés et personne n’avait alors été arrêté. Ceci alors qu’au même moment, un internaute avait été arrêté  quelques jours après avoir simplement insulté la fille d’un joueur de cricket célèbre. Cela avait montré à quel point l’islamophobie était peu combattue, voire tolérée par la police et les autorités, qui sont dirigées par les nationalistes hindoues. Et cette impunité aurait incité ces criminels à récidiver, ou d’autres à suivre leurs traces.  

Des étudiants arrêtés    

Cette fois, dans l’État du Maharashtra où se trouve Bombay, une député fédérale de l’opposition a poussé la police à se saisir de cette affaire et à agir sur les nombreuses plaintes déposées depuis le 1er janvier. Et en quelques jours, quatre personnes ont été arrêtées : ce sont des Hindous, âgés entre 18 et 21 ans, certains étudiants en ingénierie. Et l’une des personnes suspectées d'avoir participé à cette campagne misogyne est une femme.  

En attendant le procès, un autre combat débute : celui que mènent en ce moment les femmes attaquées pour garder la tête haute et ne pas être forcées à se taire, par peur ou sous pression de leur entourage. C’est ce que confie Sayema Rahman. "Les familles et proches ne doivent pas dire à ces femmes de se taire pour éviter d’être ciblées. Il ne faut pas restreindre leur liberté. Au contraire, elles sont ciblées car elles ont un impact sur la société, alors il faut les soutenir", insiste la journaliste.  

Le zèle déployé dans cette nouvelle enquête a également permis d’arrêter le créateur supposé de la première application de la sorte, lancée en juillet dernier. Cela donne l'espoir à ces femmes que cet horrible harcèlement ne soit pas laissé complètement impuni.   

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