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Si j'étais... Claude Guéant

Claude Guéant est condamné en appel à deux ans de prison dont un an ferme dans l'affaire des primes en liquide du ministère de l'Interieur. Karl Zéro s'est imaginé dans la peau de l'ancien conseiller de Nicolas Sarkozy.

Article rédigé par franceinfo - Karl Zéro
Radio France
Publié
Temps de lecture : 5min
Claude Guéant, ancien conseiller de Nicolas Sarkozy, le 14 janvier 2017 à Paris. (THOMAS SAMSON / AFP)

Si j’étais Claude Guéant, je serais combatif. Depuis que Nicolas Sarkozy est en résidence surveillée, je veux dire surveillée par son épouse, au Cap Nègre, la justice s’emballe quelque peu à mon encontre. Lundi, par exemple, j’ai été condamné à deux ans d’emprisonnement dont un an ferme, et l’autre assorti d’un sursis avec mise à l’épreuve.

Je me suis dit : "Allez, va pour l’année au quartier VIP de la Santé, va pour l’amende de 75 000 euros et va pour l’interdiction d’exercer toute fonction publique pendant cinq ans ! De toutes façons, Fillon ne comptait pas me rappeler." C’est quand j’ai compris en quoi consisterait cette année de mise à l’épreuve que j’ai fait appel pour aller en cassation. Ils prétendaient me faire enseigner la morale civique à des délinquants roms en maison de redressement.

Une caisse noire ? Allons !

Tout ça pour une affaire miteuse, de primes en liquide prélevées sur les frais d'enquête des policiers du ministère de l’Intérieur, dont la justice ose affirmer que j’aurais piqué la moitié, soit 105 000 euros, comme un vulgaire aigrefin. Comme si j’allais m’abaisser à ça ! Autant faire l’aumône, surtout dans mon milieu, ça irait plus vite ! De l’argent liquide, j’en ai vu couler à flots, croyez moi ! Au nom de la France j’ai écumé l’Afrique, le Moyen-Orient, le Maghreb, j’ai vendu plus d’avions, de frégates et de sous-marins que l’Armée Rouge n’en possède et j’aurais piqué dans une caisse noire à Bauveau ? Allons !

Chouquettes libyennes

Si j’étais Claude Guéant, je vous dirais en outre que j’ai, dans cette pénible affaire, un alibi en béton fibré haute performance que je réservais à la Cour de cassation, mais dont je vous offre la primeur. Le jour où je suis censé avoir dérobé ces 105 000 euros, figurez vous que je viens de retrouver mon agenda, je ne suis même pas passé place Bauveau ! Le matin, je vois : "Rendez-vous avec Z.T." Il s’agit indubitablement de Ziad Takkiedine. Nous étions à l’Elysée, je m’en souviens parfaitement, en compagnie de Nicolas Sarkozy. Très aimablement, Ziad, avait apporté trois valises remplies de chouquettes. Le péché mignon de Nicolas, mais quand même !

Ces orientaux, hein, d’une prodigalité sans égal ! Il nous a longuement parlé du désir de M. Senoussi, beau-frère du colonel Kadhafi, de nous fournir d’autres viennoiseries, en quantité industrielle, si nous pouvions rendre son honneur à ce dernier, injustement condamné à perpétuité par contumace en 1999, pour l’attentat du DC10 d’UTA. On a vérifié, ce n’était pas lui : M. Senoussi avait une carte de fidélité Air Lybia, et ne volait que sur cette compagnie.

J'ai des alibis !

J’ai ensuite déjeuné au Bristol en compagnie d’un vieil ami, avocat malaisien de son état, pour conclure la vente de deux tableaux hérités de ma mère, des Van Eertvelt, un peintre hollandais un peu surcoté. Au dessert, mon ami m’a remis 500 000 euros, puis il a filé très vite, car il avait d’autres rendez-vous. Curieusement je ne l’ai jamais revu. Peut-être s’est-il noyé dans le Danube, allez savoir !

L’après midi, je vois, toujours dans mon agenda, que j’étais en compagnie de P.B., Patrick Buisson donc, et toujours à l’Elysée. Nous lancions une vaste campagne sondagière, qui s’est étalée sur cinq années, car nous étions extrêmement satisfait du travail de l’institut de Buisson. Toutes ses questions étaient bonnes, les réponses nous plaisaient, mais c’est toujours pareil, quand on veut voir le mal partout !

Puis, la journée terminée, rentrant dans mon appartement situé près de l’avenue Foch, et payé cash 717 000 euros, je suis allé direct chez Adidas m’acheter des chaussures de jogging. Et là je suis tombé, le hasard, sur Bernard Tapie qui faisait les soldes avec Christine Lagarde. Voilà, vous savez tout. La justice appréciera, je pense, ces nouveaux éléments !

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