Guerre en Ukraine : face à la pénurie, une vingtaine de pays se cotisent pour acheter des obus
Puisque l'Union européenne n'a pas été capable de tenir sa promesse et de produire un million d'obus pour Kiev avant la fin mars, comme elle s'y était pourtant engagée, la République Tchèque a pris les choses en main.
Les autorités de Prague, très engagées dans le soutien à l'Ukraine, ont d'elles-même listé les stocks de munitions existant dans le monde. Elles ont identifié il y a plusieurs mois déjà 800 000 pièces d'artillerie, disponibles à l'achat en dehors du continent europée : en Afrique du Sud, en Corée du Sud ou en Turquie.
Levée de fonds internationale
N'ayant pas les moyens d'acheter seuls une telle quantité (Selon le Financial Times, l'achat de ces 800.000 obus coûterait 1,5 milliard de dollars - c'est une estimation basse), les Tchèques ont donc organisé une levée de fonds internationale. Et mené quantité de discussions pour convaincre leurs partenaires de s'engager dans cette aventure, destinée à pallier la pénurie de munitions sur le terrain.
Ce mardi 16 avril, le premier ministre, Petr Fiala, annonce qu'au final une vingtaine de pays s'engagent à mettre au pot. Dont la France, l'Allemagne, la Norvège et le Canada. Cette cagnotte a permis de passer une première commande groupée de 500 000 obus, livrables dès le mois de juin. Une vraie bouffée d'oxygène pour les soldats.
Car sur le terrain, la pénurie de munitions met les troupes de Kiev en difficulté. "Quand nous tirons un obus, les Russes, eux, en envoient sept, huit... voire dix en certains endroits du front, là où les combats sont les plus intenses" confie ce mardi 16 avril à franceinfo l'un des représentants des Forces armées (ZSU), qui souhaite garder l'anonymat.
La conséquence, c'est que les Ukrainiens ne sont plus en capacité de protéger leurs infrastructures énergétiques, pilonnées de manière systématique depuis plusieurs semaines par les forces russes. La semaine dernière, la centrale thermique de Trypillia, à 50 kilomètres de Kiev, a été complètement détruite par quatre missiles, que la défense anti-aérienne n'a pas pu intercepter. "On a abattu les sept premiers", expliquait mardi le président ukrainien Volodymyr Zelensky. "Mais les quatre autres sont passés... tout simplement parce qu'on n'avait plus de roquettes" pour les arrêter.
70.000 combattants russes de plus
Autre sujet sur lequel le rapport de force est largement défavorable aux Ukrainiens: le nombre de combattants. La Russie dispose d'une manne quasi-inépuisable. D'après la ZSU, elle a d'ailleurs engagé sur le terrain 70 000 hommes de plus qu'il y a six mois.
"Les Russes ont malheureusement un énorme privilège. Ils se moquent complètement des pertes. Ils n'en ont rien à faire de la vie de leurs soldats. Rien à faire de leur santé rapporte à franceinfo Olexandr Lytvynenko, Secrétaire génral du Conseil National de défense et de sécurité ukrainien depuis le 26 mars 2024.
"Pour Moscou, comme Poutine a dit, en reprenant une citation : 'mieux vaut mourir sur le front qu'à cause du froid ou de la vodka'". Mais nous, nous nous battons pour notre avenir et pour celui de nos enfants. Pour qu'ils grandissent et qu'ils participent au développement de ce pays. C'est ça, la vraie différence entre nous et les Russes".
La loi de mobilisation critiquée
Affaiblie par sa contre-offensive ratée de l'été 2023, mais aussi par une aide occidentale qui s'épuise, l'armée ukrainienne essaye comme elle le peut de contenir des assauts russes en de multiples points du front.
Pour tenter d'enrayer le rapport de forces, Kiev voudrait engager plus d'hommes. Mais décréter une deuxième mobilisation générale serait une mesure impopulaire, contre-productive sur le plan politique. Alors le gouvernement avance par petites touches.
Mardi 16 avril, Volodymyr Zelensky a promulgué la loi sur la mobilisation, texte controversé qui prévoit plus de sanctions pour les réfractaires, mais pas de démobilisation pour ceux qui se battent depuis plus de deux ans. Une mesure en ce sens ayant été retirée du texte à la dernière minute.
Chronique réalisée dans le cadre d'un déplacement en Ukraine organisé par le groupe de réflexion Eastern Circles
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