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Gabriel Boric ou le triomphe de la gauche au Chili

Au Chili c’est le candidat de gauche Gabriel Boric qui devient président. Élu avec 56% des voix, score sans appel face à son rival d'extrême droite. Qui est donc ce très jeune président ?

Article rédigé par Isabelle Labeyrie
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Le nouveau président du Chili, Gabriel Boric à Santiago (Chili), le 20 décembre 2021. (MARTIN BERNETTI / AFP)

Il est jeune, 35 ans, ce qui fait de lui l'un des plus jeunes dirigeants du monde. Il avait d'ailleurs tout juste l'âge pour être candidat à la présidentielle. Gabriel Boric, en rupture avec la tradition centriste de ces dernières années, aspire à transformer son pays de manière radicale.

Veste sombre, chemise blanche sans cravate, il a promis dimanche 19 décembre toute une série de réformes en matière de santé, d'éducation et de retraites : autant de secteurs entièrement ou partiellement privatisés sous la dictature de Pinochet et qui laissent de côté les moins aisés.

"Ensemble, dit-il, nous ferons du Chili un pays plus juste et plus digne. Notre gouvernement aura les pieds dans la rue, les décisions ne seront pas prises à l'intérieur de quatre murs mais avec la population".

Héritier d'une politique ultra-libérale menée jusqu'en 1990, le Chili est devenu l'un des pays les plus inégalitaires au monde. 1% de la population capte plus de 25% des richesses. Gabriel Boric veut tourner la page du néo-libéralisme, instaurer un État-providence qui, dit-il, "parait assez évident vu d'Europe : garantir que chacun ait les mêmes droits sociaux, quel que soit l’argent qu’il a dans son portefeuille”.

Aura-t-il les moyens de ses ambitions ? Ce sera difficile, d'abord sur le plan politique : le parlement est très fragmenté, aucun camp n'a la majorité, pas même sa coalition qui compte dans ses rangs le Parti communiste. Il va devoir beaucoup négocier avec l'opposition. Sur le plan économique il ne sera pas aidé non plus : l'an prochain la croissance s'annonce faible, encore impactée par le coronavirus.

Leader étudiant

Gabriel Boric porte l'espoir de tous les Chiliens qui se sont massivement soulevés contre le gouvernement il y a deux ans pour réclamer une société plus juste. Ceux de la classe moyenne notamment, qui n'acceptent plus de devoir s'endetter pour payer leur retraite, leurs médicaments et la scolarité de leurs enfants. Il sait de quoi il parle : il y a dix ans, quand il était encore sur les bancs de la fac de droit à Santiago, avant d'être élu député, il avait pris la tête de la Fédération des étudiants et participé au grand mouvement pour une réforme du système éducatif.

Face au duel inédit de ce scrutin, qui opposait deux candidats aux projets de société diamétralement opposés (le représentant de la droite, José Antonio Kast, est un nostalgique de la dictature de Pinochet), les Chiliens se sont massivement mobilisés : la participation dépasse les 55%, un plus haut historique depuis que le vote n'est plus obligatoire en 2012.

Le retour de la gauche en Amérique latine 

La victoire de Gabriel Boric est évidemment saluée par toutes les figures de gauche, en Argentine, au Pérou, à Cuba, au Venezuela, mais aussi par les présidents de droite et de centre-droit. L'ancien président du Brésil, Luiz Inacio Lula da Silva (Parti des travailleurs, gauche), que les sondages donnent vainqueur de la présidentielle en 2022 dans un éventuel duel avec le président d'extrême droite Jair Bolsonaro, s'est dit "heureux d'une nouvelle victoire d'un candidat démocratique et progressiste dans notre Amérique latine, pour la construction d'un avenir meilleur pour tous". 

Gabriel Boric, qui a tatoué sur son bras le dessin d'un phare éclairant une île déserte, rappelle souvent qu'il vient de la ville de Punta Arenas, au sud de la Patagonie, dans le détroit de Magellan, "là où le monde commence, là où toutes les histoires et l’imagination se rejoignent". Il prendra officiellement ses fonctions le 11 mars.

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