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Espagne : l’extrême droite entre pour la première fois dans un gouvernement régional

Pour la première fois depuis la fin de la dictature, en 1975, l'extrême droite est aux commandes en Espagne : le parti Vox fait son entrée dans un gouvernement régional.

Article rédigé par Isabelle Labeyrie
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Juan Garcia Gallardo, du parti d'extrême droite Vox en Castille-et-León, lors d'une conférence de presse à Valladolid (Espagne), le 14 février 2022 (CESAR MANSO / AFP)

Grâce à son alliance avec les conservateurs, Vox abandonne les seconds rôles : le parti d'extrême droite va participer au gouvernement de Castille-et-León, grande région rurale au nord de Madrid. Le parti d'extrême droite y obtient trois ministères, la présidence du Parlement et le poste de vice-président.
"Un jour historique", a salué jeudi 10 mars à Valladolid son candidat, Juan Garcia Gallardo.

Fin 2018, Vox avait déjà créé la surprise en entrant au Parlement d'Andalousie, terre de gauche. Il avait aussi atteint les marches du pouvoir en Murcie et dans la communauté de Madrid mais jusqu'ici jamais il n'avait fait partie d'un exécutif local. C'est d'autant plus important qu'en Espagne, pays décentralisé, chaque région dispose de pouvoirs considérables.

Une alliance "légitime"

Le parti politique Vox est arrivé au pouvoir parce qu'en février 2022, le président sortant de Castille-et-León, bastion de la droite depuis 30 ans, a engagé des élections anticipées avec l'espoir d'obtenir la majorité absolue. Pari perdu ! Alfonso Fernández Mañueco s'est retrouvé sans majorité et – ce qu'il n'avait pas prévu non plus – face à une extrême-droite en plein essor : au Parlement régional, Vox est passé de un à 13 députés (17,6 % des suffrages) sur un total de 81.

Pour rester au pouvoir l'ancien patron n'avait pas d'autre choix que de faire alliance. Il promet grâce à elle un programme au service du peuple qui permettra un "gouvernement stable": "nous avons conclu aujourd’hui un accord sensé, sans gagnants ni perdant" dit-il. L'attelage a d'ailleurs été finalement jugé "parfaitement légitime" par la direction nationale de son parti et le candidat à la présidence du PP, Alberto Núñez Feijóo.

La formation conservatrice est malgré tout parfaitement consciente qu'un tel pacte pourrait devenir un problème si le Parti Populaire (PP) veut former des alliances avec des partenaires modérés dans d'autres régions ou au niveau national.

"Une mauvaise nouvelle pour la démocratie"

Le Premier ministre Pedro Sanchez, un socialiste, qui est jusqu'au 11 mars à Versailles pour le sommet européen sur l'Ukraine, parle de "pacte de la honte" et dénonce les conservateurs qui ouvrent grand leurs bras à l'extrême droite. C'est, dit-il, "une très mauvaise nouvelle pour la démocratie espagnole", 47 ans après la fin de la dictature de Franco.

Vox, parti ultra-nationaliste et anti-immigration, que ses détracteurs accusent d'être nostalgique du franquisme, ne cache pas vouloir faire de la Catille-et-León un laboratoire pour ses idées. Il veut notamment abandonner la loi sur la violence conjugale (car selon ses dirigeants, il n’y a pas de violence spécifique contre les femmes) et revenir sur une loi mémorielle qui prévoit de réhabiliter les victimes du franquisme. Des risques que pointent déjà les militants féministes de la Communauté autonome.


Né en 2014, marginal à ses début, le parti est aujourd'hui en plein développement; il espère renouveler ce hold-up dans d'autres régions, mais il vise surtout les prochaines élections générales, prévues au plus tard en janvier 2024. Il est déjà la troisième force politique du pays (avec 52 députés sur 350 au Parlement espagnol). De récents sondages lui prédisent de faire encore mieux lors du prochain scrutin.

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