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"Neuf meufs", la série d'Emma de Caunes : "J'avais envie d'écrire des portraits de femmes qui me touchent, qui me ressemblent"

Tous les jours, une personnalité s'invite dans le monde d'Élodie Suigo. Aujourd'hui, c’est l’actrice et réalisatrice Emma de Caunes.

Article rédigé par franceinfo - Elodie Suigo
Radio France
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Temps de lecture : 6min
Emma De Caunes lors du Festival "Series Mania" à Lille en mars 2019. (FRANCOIS LO PRESTI / AFP)

Actrice, animatrice, réalisatrice, scénariste, c'est avec son rôle dans le film Un frère de Sylvie Verheyde qu’Emma de Caunes se fait connaître du grand public et reçoit dans la foulée le César du meilleur espoir féminin en 1998 pour celui-ci. Elle est aussi la fille d'Antoine de Caunes. Depuis le 15 février 2021, elle est maman d'une série qui s'appelle Neuf meufs, diffusée sur Canal Plus.

Elodie Suigo: Neuf meufs, neuf histoires, neuf caractères, neuf sexes a priori identiques et pourtant pas du tout.

Emma de Caunes: Tout est parti de mon envie de filmer des actrices. J'avais envie d'écrire des portraits de femmes qui me touchent, qui me ressemblent. Des femmes que je connais, que j'ai pu connaître ou qui peuvent graviter un peu comme ça autour de moi et que je ne trouvais pas toujours représentées forcément à l'image. Et parler de leur rapport au désir.

Ces neuf femmes habitent dans le même immeuble mais ce n'est pas ce point commun que vous êtes allée explorer, c'est vraiment leur intimité. On a l'impression d'être avec elles et qu'il n'y a pas de caméras.

C'est très intime un appartement. Quand on rentre chez quelqu'un, on découvre des choses. J'ai beaucoup travaillé à la déco, on a vraiment essayé de trouver le détail, de donner à chacune une couleur et du coup, parce que 10 minutes c'est court, d'apprendre le maximum de choses d'elles par rapport à leur environnement. Et c'est vrai qu'en termes de filmage, j'avais très envie d'une caméra qui était un peu intrusive, qui ne les lâchait jamais.

Je voulais révéler leur sensualité, je voulais qu'elles soient belles. J'avais envie de les filmer belles comme je les vois d'ailleurs parce qu'elles sont toutes très belles. Du coup, voilà, c'était important pour moi qu'on soit proche d'elles, qu'on soit avec elles pour justement maximiser ce sentiment de promiscuité et puis d'être avec elles, de ressentir ce qu'elles ressentent et d'avoir une caméra qui ne les lâche jamais.

Vous avez ce côté féministe mais "posé". On le voit d'ailleurs à travers cette série, où à aucun moment vous accablez les hommes. Ce n'est pas du tout ça l'idée, c'est simplement de remettre au centre de l'image des femmes qui méritent de l’être.

Il n'y a pas de discours féministe dans cette série, c'est-à-dire que je ne traite pas de sujets de société aussi graves que les femmes battues, les femmes violées... Il y a une femme agressée quand même mais on n'explique pas vraiment pourquoi. Je n'ai pas eu envie de me situer à cet endroit-là, c'était vraiment plutôt sur le jeu des comédiennes, aller dans le ressenti de certaines choses dont on ne parle pas suffisamment finalement, comme le désir féminin.

Après, pour moi, le féminisme... Il faut faire attention aujourd'hui puisque ça peut être un peu galvaudé, mal interprété mais en tout cas, à aucun moment je suis contre les hommes, au contraire, on a même fait très attention avec Diastème à soigner nos personnages masculins. Ce sont des hommes qui sont aussi fragiles, en contradiction, sensibles aussi et j'ai essayé de leur donner de la féminité. Finalement, ils sont assez féminins ces personnages masculins mais il n'y a pas de discours féministe derrière cette série. C'est plutôt une jolie palette de portraits de femmes sans revendication forcément politique derrière.

On sent que cette série va faire avancer les choses, le regard qu'on peut porter sur les femmes. En pleine séquence Duhamel, Matzneff ou Weinstein, malheureusement vous avez subi cela, il y a quand même un positionnement par rapport à ça, celui de faire avancer les choses, en tous cas le regard qu'on peut avoir sur le désir des femmes. Ce n'est pas une honte d'avoir du désir quand on est une femme.

Bien sûr et d'en parler et d'avoir les mots. Il n'y a pas de tabou en fait. Libérer la parole.

Avec Weinstein, mon témoignage, je n'aurais jamais imaginé en 2017 l'ampleur du mouvement #MeToo aujourd'hui, donc formidable si ça libère la parole !

Emma de Caunes

à franceinfo

Ça vous va bien d'être derrière la caméra, on sent que vous avez trouvé aussi un rôle qui vous convient, qui était ancré en vous depuis cette section A3.

Ce bac que j'ai eu grâce au cinéma parce que j'ai été quand même virée du lycée à trois mois du bac. J'étais un peu une élève dissipée et j'étais dans cette section qui n'existe plus malheureusement qui s'appelait A3 Cinéma. J'avais des profs géniaux, j'ai adoré ça et j'ai beaucoup appris.

J'ai une passion pour les acteurs, les actrices et j'avais envie de leur rendre justice, j'avais envie d'aller les chercher et de les filmer sous toutes les coutures

Emma de Caunes

à franceinfo

Ce qu'on ressent dans cette série, c'est que vous vous faites enfin confiance.

Tout à fait. C'est vraiment ça. C'est que j'ai cruellement manqué de confiance en moi pendant longtemps et là, je me sens à ma place.

Il y a également Croods 2 avec papa. On sent que vous vous éclatez aujourd'hui et que chacun profite de l'autre mais d'une façon juste, que vous prenez enfin le temps de profiter l'un de l'autre.

Oui, exactement, c'était très marrant à faire. Mon père adore et moi aussi. C'est drôle parce que lui l'avait déjà fait la voix de la petite souris avec une voix complètement con pour un film qui s'appelait Stuart Little. Et moi, j'avais fait Souris City dans lequel je jouais une petite rate, loubarde des égouts de Londres et je m'étais éclatée. Là, on ne fait plus des souris mais des humains pas comme les autres, les Betterman, espèce de bobos de la Préhistoire, c'est hyper drôle. Franchement, on s'est éclatés à le faire et le film est vraiment très réussi.

Heureuse aujourd'hui?

Mais vachement !

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