"Je commenterai jusqu'à mon dernier souffle" : Patrick Montel, dont le retour est réclamé par une pétition, garde un "espoir fou" pour les Jeux de Paris 2024

Tous les jours, une personnalité s'invite dans le monde d'Élodie Suigo. Aujourd’hui, le journaliste sportif, Patrick Montel. À la fin du mois d’août, une pétition a été lancée sur les réseaux sociaux afin qu’il puisse trouver un média et une accréditation pour les Jeux olympiques 2024 à Paris.
Article rédigé par Elodie Suigo
Radio France
Publié
Temps de lecture : 5 min
Patrick Montel lors du Meeting national de Colmar (Haut-Rhin) le 3 juin 2023 (JEAN-FRANCOIS FREY / MAXPPP)

Patrick Montel est sans conteste l'une des voix les plus emblématiques du milieu du journalisme sportif français, indissociable des plus grandes épreuves mondiales, et ce depuis la création des championnats du monde d'athlétisme en 1983. Il a toujours accompagné les plus grands, et beaucoup d'athlètes l'associent à leur évolution et aussi à leurs trophées, comme Ladji Doucouré qui l'a remercié et lui a rendu hommage, il y a peu.

Il a passé 33 ans à France Télévisions avant de décider de prendre sa retraite en 2020. Une retraite bien rapide puisqu'il a décidé de créer Radio Montel. Depuis quelques jours, une pétition de soutien est née sur les réseaux sociaux pour lui permettre d'obtenir un micro, une accréditation pour les J.O. de Paris en 2024.

franceinfo : Comment avez-vous pris connaissance de cette pétition ?

Patrick Montel : Totalement par hasard, en revenant des championnats du monde de Budapest. J'étais encore sous le coup de l'émotion des compétitions et ce n'était pas la première fois qu'on me proposait ce genre de démarche. D'habitude, je ne répondais pas trop et là, j'ai donné mon aval et je dois dire que je ne le regrette pas aujourd'hui.

Vous avez atteint environ 30 000 signatures.

Presque 38 000. Ce n'est pas tellement le nombre qui est important, c'est ce soutien global venu de ce grand public, dont on ne parle pas beaucoup et qui a vécu les mêmes émotions que moi.

Je voudrais que vous me racontiez vos débuts. Vous étiez prof d'éco et d'un seul coup, vous avez décidé de devenir journaliste et de tout quitter.

C'est le 15 mars 1982. J'étais en train d'enseigner l'économie lorsqu'on m'a appris la mort de mon ami Dominique Duvauchelle, qui était journaliste à Antenne 2, au service des sports. Ça a été le drame de ma vie, en fait. Et de deux choses l'une, soit je devenais fou, soit je le remplaçais. Donc j'ai choisi de le remplacer avec mes petits moyens. J'ai donc démissionné de l'Education nationale. J'ai fait le siège d'Antenne 2, à l'époque, j'ai été trois ans stagiaire d'été et au bout de trois ans, je suis rentré dans cette belle maison. Mais ça a été vraiment un parcours initiatique très compliqué, très douloureux, qui aujourd'hui a débouché sur cette carrière de passion incroyable. Il a fallu la mort de quelqu'un pour me permettre de vivre ça.

Si vous me racontiez 1983, vos premiers championnats du monde.

C'était assez particulier parce qu'à l'époque, il y avait Thierry Roland qui était le numéro un sur l'athlétisme. Le foot évidemment, mais l'athlétisme également. Et Thierry... Moi, j'avais son poster dans ma chambre quand j'étais gamin. C'était assez étrange de vivre ces championnats à la fois comme petit stagiaire à Antenne 2 et en même temps sous la coupe de Thierry. C'était très étonnant et il y avait quand même un côté assez groupie à cette époque.

Votre voix va évidemment marquer très vite, mais surtout votre dynamisme. D'où vient ce dynamisme ?

Mes parents m'ont raconté que dès l'âge de trois ans, je coupais le son du téléviseur et je commentais à la place de ceux qui parlaient à la télé sur des événements en direct. J'avais forcément un vocabulaire un peu plus pauvre, mais j'ai toujours aimé commenter. Je pense que c'est le fait d'être un peu solitaire.

"Enfant, pour combler ma solitude, il fallait toujours que je parle et que je parle de plus en plus vite pour remplir l'espace."

Patrick Montel

à franceinfo

Vous avez ce côté "alors peut-être" que vous avez totalement assumé et qui est, d'ailleurs, venu au fil du temps. C'est devenu votre marque de fabrique.

Est-ce que vous connaissez une meilleure expression pour définir, pour résumer une vie ? Moi non ! Dans "alors peut-être", il y a toute la vie, il y a les espoirs, il y a les drames, il y a les peines, il y a les résilience, les rédemptions. Tout est contenu dans ces mots-là, ce qui fait que la langue française est incroyablement riche et "alors peut-être" qu'on tient tout, quoi.

Vous avez énormément de fans sur les réseaux sociaux. Vous avez aussi des gens qui disent qu'à 70 ans, il serait de bon ton que vous preniez définitivement votre retraite. Le métier de commentateur sportif est-il une drogue ?

C'est une drogue très dure parce que vous me dites que j'ai 70 ans et vous avez raison si on s'en réfère à l'état civil, mais en réalité, j'en ai 29. Franchement, j'aurais envie de partir en guerre contre ça parce que je me dis : comment juger les gens uniquement sur une date de naissance ? C'est juste hallucinant. On juge les gens sur ce qu'ils peuvent apporter, sur leurs compétences, mais sur une date de naissance, je trouve que c'est incroyablement réducteur.

"Jusqu'à mon dernier souffle, je commenterai. Peut-être que je commenterai tout seul pour mon chat Nicole, c'est possible, mais je commenterai parce que c'est ma vie, parce que c'est mon souffle et on ne peut pas me l'enlever."

Patrick Montel

à franceinfo

Alors, peut-être qu'on ne me donnera pas mon accréditation pour les Jeux olympiques et à ce moment-là, je serai en-dehors du Parc olympique, mais je commenterai dans un Ehpad, dans un commissariat, dans une école, je ne sais pas. Moi, c'est ma vie. C'est comme ça que je vis et c'est comme ça que j'ai envie de mourir. J'ai quand même le droit de choisir la façon dont j'ai envie de mourir ! J'ai envie de mourir, comme Thierry Roland, qui s'est éteint un soir de France-Ukraine de football. Moi, c'est mon souhait le plus cher.

C'est quoi la suite alors ?

La suite, ce sont les Jeux olympiques. C'est cet espoir fou. Juste me mettre dans un petit coin et dire : "Mesdames, mesdemoiselles, messieurs, bonsoir, Ici, au Stade de France, c'est la finale du 100 mètres dans quelques instants !" Je crois que ça va être un moment exceptionnel. C'est ça que je veux. 

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