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Le décryptage éco. Des tests à la discrimination à l'embauche, quels effets sur les entreprises ?

Des tests à la discrimination à l’embauche, promis par Emmanuel Macron, sont en cours dans des entreprises, selon Julien Denormandie, le ministre de la Ville et du Logement. Que peut-on attendre de ces tests ? Le décryptage éco de Fanny Guinochet ("L'Opinion").

Article rédigé par franceinfo - Fanny Guinochet
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3 min
Julien Denormandie, ministre chargé de la Ville et du Logement, vendredi 1er février 2019. (RADIO FRANCE / FRANCEINFO)

Les entreprises françaises discriminent-elles les candidats lors des entretiens d'embauches ? Selon le gouvernement, oui, la discrimination à l'embauche est encore très présente en France. 10 000 entreprises françaises sont testées en ce moment, selon Julien Denormandie, le ministre de la Ville et du Logement, invité, dimanche 3 février de "Questions politiques", sur France Inter et franceinfo (sur canal 27 de la TNT). Ces tests font partis du plan pour la banlieue d'Emmanuel Macron. 

Est-ce que les entreprises vont pour autant changer leur comportement ?  Est-ce que ces tests auront un effet sur les employeurs comme les radars de vitesse sur les automobilistes ? La discrimination à l’embauche est punie par la loi.

Ces tests sont, selon le gouvernement, la plus grande enquête jamais réalisée dans les entreprises. Les résultats ne tomberont que fin mars, selon le ministre de la Ville et du Logement. À ce-moment-là, il sera possible de voir l’étendue du problème, voir si les entreprises françaises ont un peu changé leur regard sur les jeunes des quartiers.

Un quart de la population au chômage dans les banlieues

Le sujet n’est pas nouveau, il pèse sur l'économie. Le taux de chômage touche un quart de la population, selon Julien Denormandie, alors que c’est 9% en moyenne ailleurs.

Si on regarde plus précisément, dans 1 300 quartiers dits prioritaires de l’Hexagone, le taux de chômage atteint 35% pour les moins de 30 ans. C'est très injuste parce que concrètement cela signifie des jeunes ont fait des études mais qui ne sont même pas reçus par des employeurs. Ils font face à un mur lorsqu’ils cherchent un job ou même un stage juste à cause de leur adresse ou de leur nom de famille. 

Le sexe, les convictions religieuses ou politiques, le handicap, sont tous des critères de discriminations. Un musulman doit envoyer quatre fois plus de candidatures qu’un catholique s'il veut espérer être reçu à un entretien d'embauche. C'est ce qui ressort d'une étude de deux chercheurs, Stéphane Carcillo et Marie-Anne Valfort. Ils ont mené un important travail et ont publié, en octobre 2018, un livre, Les discriminations au travail, aux éditions Les presses de Science-Po. Leurs résultats sont édifiants.

L’âge est aussi un facteur discriminant. Les seniors, par exemple, ont jusqu’à deux fois moins de chances d’avoir un entretien d’embauche. Ces chercheurs montrent aussi qu’une femme en âge d’avoir des enfants a moins de chance qu’une autre d’accéder à un poste.

L’apparence physique est également un critère d'embauche. Les femmes obèses ont moins de chance que les hommes d’être embauchées. Les employeurs acceptent plus facilement l’embonpoint chez les hommes que chez les femmes.   

Le CV anonyme vite oublié

Qu'en est-il du CV anonyme ? En 2006, une loi l’a rendu obligatoire pour toutes les sociétés de plus de 50 salariés. 

La mesure n’a jamais été appliquée, faute de décrets. En 2015, il a été totalement abandonné car un rapport a jugé le CV anonyme "inefficace" et difficile à mettre en place. Il faut aussi "anonymiser" la lettre de motivation. Les entreprises n’étaient pas favorables à cette contrainte.

La sensibilisation et la formation des managers seraient le plus efficace pour changer les représentations qu’on a des uns et des autres, selon plusieurs chercheurs. La sensibilisation devrait même démarrer plus tôt, dès l’école sachant que le coût de la discrimination au travail en France s'élève à 150 milliards d'euros, selon une étude de France Stratégie de 2016. 

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