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Le débrief politique. La droite et la gauche face à la tentation Macron

Trois Premiers ministres en marche ou presque, une coupe de cheveux pour le président élu, Marion Maréchal-Le Pen s'en va... Tout ce qu'il ne fallait pas rater dans l'actualité politique de mardi 9 mai avec Yael Goosz.

Article rédigé par franceinfo, Yaël Goosz
Radio France
Publié
Temps de lecture : 5 min
Le président élu Emmanuel Macron, lors de la célébration de sa victoire à l'élection présdientielle, le 7 mai 2017 devant la Pyramide du Louvre, à Paris. (PATRICK KOVARIK / AFP)

La tentation Macron pour trois Premiers ministres

J+2 après l'élection, la droite et la gauche face à la tentation Macron. Mardi 9 mai, trois anciens Premier ministres sont en marche, ou presque. Il y en a même un qui court et pourrait finir par trébucher, c'est Manuel Valls"Moi je serai candidat de la majorité présidentielle. Et je souhaite m'inscrire dans ce mouvement qui est le sien, La République en marche, a déclaré l'ex-Premier ministre sur RTL ce mardi matin. Ce Parti socialiste est mort, il est derrière nous". Mais cela ne veut pas dire qu'il est accueilli à bras ouverts, au contraire.

Le deuxième Premier ministre, c'est Bernard Cazeneuve. Lui, ne court pas. C'est une petite marche raisonnable vers Macron, à petits pas. Le Premier ministre sortant a livré, ce mardi après-midi, sa feuille de route aux candidats PS aux législatives : "Je suis venu leur dire que le rôle des socialistes était de faire en sorte que le quinquennat qui s'ouvre, celui du président Emmanuel Macron, soit un quinquennat de réussite pour la France, pour pouvoir apporter notre contribution." 

Et le troisième, c'est Alain Juppé. Un pas, lui aussi, vers Macron. Non à l'opposition stérile. "Je pense que les Français n'ont pas envie aujourd'hui qu'on laisse planer l'idée qu'on va s'engager dans une obstruction systématique et dans une opposition totale. Il faut faire réussir la France."

Cette bienveillance n'arrange pas les affaires de François Baroin, engagé pour imposer une cohabitation LR/UDI au nouveau président. Des mots doux, au moment où Les Républicains viennent d'acter un projet beaucoup moins radical que celui de François Fillon pour les législatives. Derrière les mots d'Alain Juppé, on entrevoit l'entrée au gouvernement de certains de ses amis. Le nom de l'actuel député maire du Havre, Edouard Philippe, juppéiste de la première heure, revient toujours avec insistance.

Réponse des marcheurs : pas de "amen"

Décidément, les planètes s'alignent pour Emmanuel Macron. Mais cela ne veut pas dire qu'il dit "amen" à tout le monde. Ses porte-paroles se transforment en porte-flingues quand il s'agit d'étudier le cas Valls. "Il devra formellement déposer sa candidature. Les privilèges doivent être derrière nous", a rappelé Christophe Castaner, ce mardi matin sur franceinfo.

Pourquoi tant de réticences ? Parce qu'En Marche a besoin de clarté avant les législatives. Une seule étiquette, sauf pour le Modem, allié de la première heure. Une seule étiquette La République en marche, pour bénéficier aussi à fond du financement public des partis politiques : 1,60 euro par an et par voix récoltée, plus de 40 000 euros par parlementaire. En Marche a besoin d'autonomie financière pour jouer dans la cour des grands. Et puis, accessoirement, Manuel Valls incarne aussi un peu trop les années Hollande pour un héritier qui chercher à s'émanciper.

Macron, jour 2

Qu'a fait Emmanuel Macron, depuis 24 heures ? Il a commencé la journée par un petit tour par son salon de coiffure habituel, Studio Vice Versa, boulevard Haussmann, dans le 8e arrondissement. Le président élu a ensuite déjeuné à son QR, avec son équipe. Il y est resté tout l'après-midi entre réunions, entretiens et coups de fil à l'international. On a vu passer Bertrand Delanoë, l'ancien maire de Paris, qui l'a soutenu dès le mois de mars 2017. Jean-Paul Delevoye, le président de la commission des investitures, a fait pas mal d'allées et venues. La composition du gouvernement est aussi au menu de la semaine mais tout se déroule dans le plus grand secret. "Il travaille sur ce sujet sans faire partager", a indiqué Christophe Castaner, ce mardi. Puis, Emmanuel Macron est rentré chez lui, rue Cler dans le 7e arrondissement. 

Au programme de mercredi : les commémorations de l'abolition de l'esclavage, avec François Hollande et les obsèques de la député PS des Côtes-d'Armor, Corinne Erhel, à Lannion. Elle était l'une des pionnières du mouvement En Marche.

Le chiffon rouge de Pierre Laurent

Le torchon brûle toujours entre les communistes et les insoumis. Ce n'est plus un torchon, c'est un chiffon qu'a agité Pierre Laurent ce mardi. "Je renouvelle, avec gravité et un peu de colère, mon appel à La France insoumise, pour que nous allions, non dans quelques circonscriptions, mais le plus largement et nationalement possible à la bataille ensemble. Nous serions les seuls à ne pouvoir offrir à nos électeurs que le dilemme de la division c'est une folie", a déclaré le patron des communistes. Pas de réponse de Jean-Luc Mélenchon pour l'instant. La France insoumise veut garder intacte, sans alliance, la force de son mouvement qui a recueilli plus de 7 millions de voix au premier tour de l'élection présidentielle.

L'impossible synthèse du PS

Et pendant ce temps-là, le PS cherche l'impossible synthèse. Toute la famille est réunie à la Mutualité, ce mardi soir, avec les candidats aux législatives, investis dans plus de 400 circonscriptions. Il en reste pour les partenaires PRG et écologistes. Une campagne sur un projet revu et corrigé par rapport à celui de Benoît Hamon. Exit la sortie du diesel et du nucléaire. Mais toujours le refus de la réforme du code du travail par ordonnance.

Marion Maréchal-Le Pen abandonne

Et puis, il y a la tentation de Venise. Celle de Marion Maréchal-Le Pen qui devrait bientôt annoncer qu'elle ne se représentera pas aux législatives et qu'elle abandonne aussi la présidence du groupe FN au conseil régional de Provence-Alpes-Côte d’Azur. Besoin de se recentrer sur sa vie privée. Des projets en dehors de la politique. Pas envie de faire revivre la dramaturgie familiale en se posant en future rival de sa tante, qui vient d'échouer en finale d'une présidentielle.

Coup dur pour un FN qui voulait se mettre en ordre de marche pour les législatives, un FN qui marchait sur deux jambes : une jambe souverainiste et plus sociale côté Philippot, une jambe libérale et plus identitaire côté Marion Maréchal-Le Pen. La place est à prendre. Cela devrait créer des remous dans le chaudron frontiste.

La note du débrief : 9/20 pour Emmanuel Macron

C'est la fausse note d'Emmanuel Macron qui sur-joue la bienveillance à l'égard de son ex-mentor François Hollande. Un petit 9/20 pour ses propos tenus à chaud, et factuellement inexacts. Extrait du documentaire Les Coulisses d'une victoire, diffusé lundi soir sur TF1. Emmanuel Macron est à Amiens sur le dossier Whirlpool, le 26 avril dernier. C'est un trou d'air dans la campagne : Marine Le Pen l'a court-circuité sur le parking avec les grévistes.

Le candidat d'En Marche s'agace alors devant ses équipes : "On n'a que des craintes maintenant parce qu'on est des bourgeois. Vous n'avez pas compris : c'est fini. Je ne peux pas paraître planqué. Donc, il faut prendre le risque. Il faut aller dans le cœur de la bête à chaque fois. Donc le cœur de la bête est là, il faut y aller. Parce que si vous écoutez les mecs de la sécurité, vous finissez comme Hollande. Peut-être que vous êtes en sécurité mais vous êtes mort". En creux, et très spontanément, c'est le portrait d'un François Hollande planqué dans sa tour d'ivoire et protégé des Français par ses policiers d'élite.

Emmanuel Macron a la mémoire courte. Le 7 janvier 2015, après l'attentat contre Charlie Hebdo, François Hollande ordonne à ses services qu'on le laisse se rendre sur les lieux de l'attentat, alors que rien n’est encore sécurisé à 100%. Ses services redoutent même le sur-attentat. Même chose au Bataclan en novembre 2015. En tout cas, ce moment de télévision est hyper révélateur du divorce politique, de la rupture, Macron/Hollande.

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