Européennes 2024 : les partis écologistes en difficulté en Allemagne et en Italie

En Allemagne, les écologistes présentent leur liste pour les élections européennes, en une année où le Pacte vert européen a subi beaucoup d’attaques partout en Europe. À moins d'un mois du scrutin des 8 et 9 juin, où en sont les partis écologistes européens ? Nos correspondants en Allemagne et en Italie témoignent.
Article rédigé par David Philippot, Bruno Duvic
Radio France
Publié
Temps de lecture : 5 min
Affiche électorale du parti vert avec Terry Reineke, première candidat. "Une Europe forte signifie une Allemagne sûre". Münster, Rhénanie du Nord-Westphalie, Allemagne, le 6 mai 2024. (IMAGO/R?DIGER W?LK / MAXPPP)

En Allemagne, le parti écologiste débute lundi 13 mai ses meetings de campagne pour les élections européennes. Les "Grünen" sont en bien moins bonne posture que lors du dernier scrutin de 2019, où ils avaient fini en deuxième position avec plus de 20% des suffrages, et réalisé leur meilleur score historique. Aujourd'hui, le parti a perdu des plumes dans l’exercice du pouvoir et le doublement de leur budget de campagne ne suffira sans doute pas à leur faire remonter la pente.

Mais face aux problèmes d'inflation et à la poussée de l'extrême droite un peu partout en Europe, la situation des écologistes allemands est loin d'être la pire. Le Pacte vert est souvent pris pour cible et les Verts européens pourraient perdre une vingtaine de sièges au Parlement aux élections de juin. En Italie, le parti écologiste ne prévoit pour l'instant même pas d'atteindre les 4% nécessaires pour obtenir un siège au Parlement européen.

En Allemagne, le parti tente de gommer une image d'idéologues face une vindicte populaire

Les écologistes se situent autour des 14% des intentions de vote, ce qui est leur niveau habituel. Mais ils sont sur la défensive et les stratèges du parti misent sur la sécurité, plutôt que sur la peur du changement climatique comme en 2019. Il s’agit d'essayer de gommer l’image d’un parti d’interdiction, de donneurs de leçons.

La loi sur le chauffage entrée en vigueur au 1er janvier, voulant imposer les pompes à chaleur dans les futurs logements a renforcé cette réputation. D’autant que l’Allemagne fait partie des pays où les prix de l’électricité sont les plus élevés en Europe et a beaucoup souffert de la flambée des prix. Beaucoup de consommateurs mettent les factures salées, avec des rattrapages annuels de plusieurs centaines d’euros, sur le compte des écologistes.

Ils sont connus pour avoir poussé à la sortie du nucléaire, achevée il y a un an, et des révélations du magazine Cicero, le mois dernier, tendent à prouver que le ministère de l’Économie, dirigé par le Vert Robert Habeck, a passé sous silence des expertises, des études selon lesquelles la durée de vie des centrales aurait pu être prolongée, ce qui aurait eu pour effet de stabiliser les prix. L’opposition les accuse donc de mensonges. Et depuis, les Verts passent encore plus pour des idéologues qui se soucient peu ou pas des conséquences sociales de leur politique.

La tête de liste est une inconnue, Terry Reintke, députée européenne depuis 2014. Elle fait campagne sur l’aide militaire à l’Ukraine, ce qui ne passe pas forcément bien dans un pays et un parti de tradition pacifiste. La campagne se fait aussi contre le risque fasciste, avec sur leurs affiches une jeune femme dans une manifestation portant une pancarte avec une croix gammée barrée. Le leader extrême droite de l’Alternative pour l’Allemagne (AfD) a dit qu’il voulait voir l’Europe mourir, et les écologistes, qui se présentent comme un parti pro-européen, sont la cible n°1 de la vindicte populaire. Les agressions contre les politiques ont bondi et presque la moitié des attaques recensées par la police, allant de balles trouvées dans le courrier au caillassage de voitures, vise les candidats des "Grünen".

En Italie, des préoccupations autres que l'écologie, malgré les inondations et les sécheresses à répétition

En Italie, la liste écologiste ne remporte pas beaucoup de succès. Si l’on en croit les sondages, elle est créditée de 3,7% d'intentions de votes, un score en dessous des 4% nécessaires pour envoyer des députés à Strasbourg. Ce si faible score s'explique entre autres parce que d’autres formations à gauche, à l’audience beaucoup plus importante, prennent en charge le discours écologique. C’est le cas des sociaux-démocrates, en 2e place dans les sondages.

De plus, l‘écologie n‘est pas un grand sujet de préoccupation en Italie. La campagne se concentre sur des affaires de corruption en région, sur l’exercice du pouvoir par Giorgia Meloni et sur les questions sociales, dans un pays où le salaire moyen est très bas. Lorsqu'il y a eu la protestation des agriculteurs, les formations au pouvoir se sont plutôt élevées contre une politique écologique européenne jugée trop envahissante. Pourtant la Méditerranée est en première ligne face au changement climatique. En Italie, les épisodes extrêmes d'inondations, dus à de très fortes pluies, et de sécheresses se sont multipliés l’an dernier. Et cela continue.

Mais jusqu’à présent, à part un plan de développement des énergies renouvelables, pour lesquelles l’Italie n’est pas si mal placée, Giorgia Meloni n’a pas mobilisé ses troupes pour réduire davantage la dépendance aux énergies fossiles. Il est question du retour du nucléaire dans un pays qui l’a abandonné après Tchernobyl et Fukushima. Mais ce n’est pas pour demain. Et sur la question du logement ou de l’automobile par exemple, la priorité est plutôt à la protection des intérêts sectoriels qu’à l’imposition de nouvelles règles face au changement climatique.

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