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Coronavirus : les chiffres liés à la mortalité et aux contaminations au Brésil, en Chine et en Inde reflètent-ils la réalité ?

Dans le club des correspondants, franceinfo passe les frontières pour voir tout ce qui se fait ailleurs dans le monde. Aujourd'hui, nous vous proposons de regarder les statistiques liées au coronavirus au Brésil, en Chine et en Inde.

Article rédigé par franceinfo - Anne Vigna, Stéphane Pambrun, Côme Bastin, édité par Pauline Pennanec'h
Radio France
Publié
Temps de lecture : 6 min
Une infirmière auprès d'un patient en service de réanimation (DOUGLAS MAGNO / AFP)

L'épidémie de Covid-19 repart dans le monde mais les chiffres de mortalité et de contamination reflètent-ils la réalité des différents pays de la planète ? Franceinfo vous propose de s’attarder sur trois pays : le Brésil, la Chine et l'Inde.

Au Brésil, le gouvernement brouille les chiffres pour embrouiller les médias

C'est une véritable guerre des chiffres qui a eu lieu en juin dernier. Devant l’augmentation des cas de Covid-19, le ministre de la Santé brésilien a opté pour un méthode radicale : ne plus divulguer le nombre total de décès, et donner le nombre quotidien de décès très tard, après le journal télévisé. L’idée du gouvernement était de dire : si on ne compte plus les morts, ils deviennent moins visibles. Le 11 juin dernier, les statistiques sur le nombre total de décès ont donc brusquement disparu du site du ministère de la Santé. Le ministre annonce qu’il ne va désormais donner que le nombre quotidien de décès à 22h, au lieu de 19h auparavant.

C’est un vrai défi qui se pose alors à la presse, qui craint de perdre le fil du nombre de décès et doute des informations données par le ministère. Les médias décident de travailler ensemble, via leurs correspondants locaux. Ils font remonter l’information des morts dans chaque État du Brésil, via les secrétariats à la santé. L’information est alors centralisée puis diffusée par tous les médias en même temps.

Aujourd’hui la presse a gagné la bataille, puisque le site du ministère redonne le chiffre total des décès mais la confiance est brisée avec les autorités et les médias ont décidé de continuer leur collaboration pour avoir la certitude de publier toujours les bons chiffres. Le consortium de la presse a donc indiqué jeudi 3 septembre 4 041 638 cas confirmés et 124 614 décès, alors que le ministère de la Santé annonce 3 247 610 de personnes guéries du Covid-19.

La Chine sur-communique sur sa gestion de l'épidémie

Après avoir caché les chiffres au début de l’épidémie, la Chine a totalement changé sa stratégie de communication. Dès le printemps, le gouvernement a fait un effort de transparence : chaque jour, les autorités sanitaires chinoise organisent un point pour la presse, diffusé à la télévision, qui donne avec une grande précision les chiffres des dernières 24 heures. Par exemple, vendredi 4 septembre, le gouvernement annonce 25 nouveaux cas confirmés de contamination au coronavirus, qui concernent tous des personnes venues de l'étranger.

La Chine distingue clairement dans son bilan les cas domestiques des personnes dépistées positif au coronavirus à leur descente d’avion, c’est-à-dire lorsqu’ils reviennent de l’étranger, et sont systématiquement isolés et testés. Le pays connaît d'ailleurs le 19e jour consécutif sans une seule transmission locale et plus de trois mois sans un seul décès.

Un bilan exceptionnel, et c’est aussi pour ça que la Chine communique beaucoup. Les médias officiels font d'ailleurs le point parallèlement à la Chine de la situation aux États-Unis et critique l’attitude américaine dans sa gestion de l’épidémie. Ce qui distingue aussi la Chine, c’est son traitement des clusters identifiés.Un seul cas détectés et c’est le branle-bas de combat, les quartiers sont verrouillés et tout le monde est testé. Les tests systématiques, c’est la grande politique actuellement de Pékin. Les tests et le traçage électronique des déplacements via les QR code santé sont désormais indispensables alors que le port du masque ne l’est plus en extérieur, même si les gens le portent toujours.

En Inde, le gouvernement sous-estime la réalité

En Inde, les statistiques flambent alors même qu’elle pourraient largement sous-estimer la réalité. Le pays fait la une pour enregistrer le plus grand nombre de contaminations quotidiennes, devant les États-Unis et le Brésil. Ainsi, on compte 78 761 nouveaux cas le 30 août, la plus forte hausse jamais observée sur la planète.

Quatre millions d’Indiens auraient été infectés par le coronavirus mais ces statistiques pourraient être bien plus élevées. "Ce qu’on appelle le nombre de cas totaux regroupe deux statistiques, explique Jayaprakash Muliyil, épidémiologiste au Christian Medical College. Les personnes qui sont malades du Covid-19 à l'hôpital et les personnes qui après avoir été testées sont déclarées positives. Mais en réalité, un large pourcentage de la population Indienne est déjà infectée. Prenez les statistiques officielles, multipliez les par 20, et vous aurez les chiffres de la pandémie !" L’Inde a augmenté sa capacité de tests pour arriver à 30 tests pour 1 000 habitants. Mais cela reste bien en dessous d’un pays comme les États-Unis, à 232.

Cette sous-estimation de la réalité est une menace pour le contrôle de la pandémie, d'autant que l’épidémie gagne les campagnes, bien moins dotées en hôpitaux. Mais il y a un espoir : une large partie de la population indienne est asymptomatique. On compte seulement seulement 70 000 morts en Inde, un chiffre peut-être sous estimé, mais sûrement moins que le nombre de cas. À Bombay, une étude a estimé que 57% des habitants des bidonvilles auraient déjà contracté le Covid-19, souvent sans complications. Quoi qu’il en soit, il faudra attendre avant de voir la pandémie refluer en Inde, le tout avec des données à prendre avec des pincettes.

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