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Voitures électriques : pourquoi l'objectif des 100 000 bornes de recharge n'est-il pas atteint ?

Fin avril, la France comptait seulement 60 000 points de recharge, soit 40% de moins que ce qu'avait promis Emmanuel Macron lors de son premier quinquennat. En cause : des freins techniques et administratifs mais aussi des pénuries de machine. 

Article rédigé par franceinfo, Raphaël Ebenstein
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4 min
Une station de recharge ultra rapide du groupe néérlandais Fastned à Dracé (Rhône). (AURELIEN ACCART / RADIO FRANCE)

Alors qu'Emmanuel Macron a fait de la planification écologique et de la réduction de l'empreinte carbone la pierre angulaire de son second mandat, où en est l'objectif concernant le développement de la voiture électrique ? Lors de son premier quinquennat, le chef de l'État avait promis la mise en place de 100 000 bornes de recharge d'ici la fin de l'année 2021. La question de l'autonomie est en effet l'un des principaux freins à l'achat d'un véhicule électrique. Or, selon les informations de franceinfo, l'ambition en termes de point de recharge n'est pas atteinte.

Troisième pays européen le mieux doté

Fin avril, la France ne comptait que 60 000 bornes de recharges, selon le dernier décompte en date effectué par l'Avere France, l'association nationale pour le développement de la mobilité électrique. Cela représente environ une borne pour 15 voitures électriques ou hybrides en circulation aujourd'hui en France.

Cela paraît peu mais c'est pourtant dans la moyenne haute de l'Union européenne, relève Cécile Goubet, déléguée générale de l'Avere France : "La France se situe plutôt bien en matière de déploiement d'infrastructures de recharge par rapport à ses voisins. On est dans le trio de tête. En plus de ces points de recharge ouverts au public, il faut compter ceux qu'on trouve en entreprise et ceux qu'on trouve à domicile." Selon une étude de l'Association des constructeurs européens d'automobiles (ACEA), l'Allemagne est la mieux dotée, suivie par le Royaume-Uni et la France. Ces trois pays concentrent à eux seuls 75% des points de recharge du continent européen.

Reste qu'il faudrait quatre fois plus de bornes publiques d'ici 2025, selon les projections, pour pouvoir répondre à la hausse attendue des ventes de voitures électriques. Sans surprise, c'est en zone rurale que la couverture est la plus faible. Les possesseurs de voitures électriques ont généralement une borne à domicile, dans le garage de leur maison.

Mais aussi, et ça peut sembler étonnant, les autoroutes sont sous-équipées en bornes à haute puissance, des modèles dix voire vingt fois plus rapides que celles qu'on trouve chez les particuliers. Ces bornes rapides sont également mieux adaptées, évidemment, à un trajet de vacances de plusieurs centaines de kilomètres avec de courtes pauses. 

"Si on a un véhicule qui est capable de prendre de la très haute puissance et qu'on a une borne qui fait de la très haute puissance, on peut faire de 20 à 80 % de son plein en 18 minutes". 

Cécile Goubet, déléguée générale de l'Avere France

à franceinfo

Le tarif du plein est très variable, selon les bornes et les opérateurs mais souvent supérieur à 20 euros. Selon un principe assez simple : plus le rechargement est rapide, plus c'est cher. La Sanef, la société qui exploite l'A13 Paris-Normandie ou l'A1 Paris-Lille, promet d'équiper les 72 aires de son réseau d'ici la fin de l'année avec 500 de ces bornes à haute puissance. Les autres sociétés concessionnaires tablent elles sur 2023.

Des freins techniques et administratifs

En tout cas, c'est une évolution nécessaire pour lever l'un des principaux freins actuels à l'achat des voitures électriques juge Flavien Neuvy, de l'observatoire Cetelem de l'automobile : "L'utilisateur ou l'acheteur d'une voiture électrique veut pouvoir avoir la même facilité à recharger sa voiture électrique qu'il a cette facilité pour faire le plein de carburant. Donc avoir des bornes de recharge dans les aires d'autoroute, c'est absolument stratégique et donc déterminant pour l'évolution de l'achat de la voiture électrique en France."

Entre les contraintes techniques, pour se raccorder au réseau, et administratives, le délai pour l'installation d'une borne se compte en mois plutôt qu'en semaines. Sans même parler de la récente pénurie de semi-conducteurs qui ne simplifie pas les choses. Didier Liautaud, directeur général d'Engie Mobilité Electrique, installe et gère des bornes de recharge pour des collectivités, des supermarchés ou des sociétés d'autoroute : "Quand on installe par exemple une station où il y a quatre, cinq, six bornes de recharge ultra rapide, on est dans un processus de permis de construire."

"Parfois installer des bornes de recharge très rapides peut mettre jusqu'à une année."

Didier Liautaud, directeur d'Engie Mobilité Electrique

à franceinfo

Face à ces freins réglementaires et à la demande grandissante des automobilistes, une start-up italienne s'est lancée sur le marché des recharges mobiles. E-Gap n'a pas de véritable concurrent pour l'instant. Pour bénéficier de ses service, il faut télécharger une application sur son téléphone puis indiquer où est garée sa voiture. Un petit camion, électrique bien sûr, s'occupe du reste, explique Frédéric Courneau, directeur général d'E-Gap France : "On va pouvoir demander la quantité de recharges que l'on souhaite et dans combien de temps on la veut. On clique, on choisit sa carte de crédit - ça peut être la carte de crédit perso, la carte de crédit pro - et c'est parti. Le camion est en route pour venir nous livrer l'énergie. Comme on demande un taxi, comme on commande une pizza, aujourd'hui, on va commander la recharge de son véhicule électrique."

L'une des camionettes de la société italienne E-GAP, spécialisée dans la recharge de véhicule électrique à la demande. (RAPHAEL EBENSTEIN / RADIO FRANCE)

Le service reste limité pour l'instant à trois camionnettes sillonnant Paris et capables chacune de recharger trois véhicules avec une puissance proche de celles des bornes d'autoroute. Ces utilitaires doivent eux-même être rechargés, bien entendu. E-Gap souhaite s'étendre à terme, d'ici quelques années, dans une vingtaine de villes françaises.

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