Rapport du Giec : qu’est-ce que le Giec, total intrus dans l’actualité du jour en France ?
Sans l’actualité des retraites, le rapport du Giec, le plus gros depuis huit ans, aurait certainement fait la Une : 10 000 pages sur un enjeu évidemment planétaire, qui dit que le "+1,5C°" sera atteint en 2030/2035 et que donc la trajectoire actuelle des émissions de CO2 est incompatible avec les objectifs de l’Accord de Paris.
Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (en anglais, IPCC : Intergovernmental Panel on Climate Change) est chargé de collecter les données scientifiques, évaluer la réalité du changement climatique, ses causes et ses conséquences et d'éclairer les décideurs politiques.
Un groupe de pays, créé en 1988 par l’ONU
Ce n’est pas un groupe de personnes mais un groupe de pays, créé en 1988 par l’ONU et par l’Organisation métérologique mondiale, à la demande des dirigeants du G7 alertés par certains scientifiques qui commençaient à dire clairement que l'activité humaine était responsable du réchauffement : l’été 1988 est le plus chaud de l’histoire des Etats-Unis. Et c’est d’ailleurs Ronald Reagan et Margareth Thatcher côté britannique qui, contre toute attente, sont les plus mobilisés au sein du G7. Ils ne sont pas les plus écolos de la bande, mais, ils réclament précisément un organisme hybride qui associe les politiques pour éviter que les chercheurs de l’ONU soient sous influence des écologistes.
Margareth Thatcher a aussi une motivation sociale qui est de contrer les syndicats des mineurs de charbon – des membres de son gouvernement ont confirmé par la suite que c’était aussi pour ça qu'elle pousser pour remplacer le charbon par le nucléaire. Pour être honnête, l'un de ses conseillers au foreign office, Crispin Tickell, avait fait un livre totalement prémonitoire sur le réchauffement 10 ans plus tôt et a joué un grand rôle dans la création du Giec.
195 pays et un tout petit budget
Aujourd'hui le Giec, c’est 195 pays, une trentaine de salariés basés à Genève, en Suisse. Un tout petit budget qui varie entre cinq et huit millions d'euros, issu de contributions volontaires : lorsque les Etats-Unis en étaient sorti sous Trump, la France avait d'ailleurs augmenté sa part. Les chercheurs ne sont pas payés et sont répartis en trois groupes. Le rapport du groupe 1 est chargé des constats : il regroupe des physiciens du climat, les sciences dures. Le groupe 2 travaille lui sur les impacts du changement climatique : ce sont les sciences humaines, des laboratoires qui travaillent sur l'agriculture, la pêche mais aussi sur les migrations par exemple. Le groupe 3, enfin, cherche des solutions, avec des spécialistes de l'énergie, de la foret, des sociologues... Le rapport d'aujourd'hui est vraiment la synthèse de tout ce qui a été publié depuis le dernier en 2014.
Elément important : il est de plus en plus question des "pertes et dommages" dont on a beaucoup parlé à la dernière COP de Charm el Cheikh, tout simplement parce les chercheurs des pays du Sud sont de plus en plus nombreux : 40 % des membres du Giec aujourd'hui.
Son président sud-coréen est totalement inconnu
La voix du Giec en France s’appelle Valérie Masson Delmotte qui en est vice-présidente, mais le président qui a rendu le rapport aujourd'hui est un sud-coréen totalement inconnu. Un réel problème, disait en off un des membres du Giec : Hoesung Lee est un pur aparatchik en poste depuis 2015 par le jeu de l'alternance onusienne entre continents. Mais il est transparent, désorganisé, ce qui complique beaucoup la communication entre les labos. De plus, son mandat arrive à échéance en juillet : il y a un candidat européen, un climatologue belge Jean-Pascal van Ypersele, ainsi qu'une Sud-Africaine et un Américain. Il devrait revenir à l'Europe sauf si l'Afrique réclame la présidence qu'elle n'a jamais eue.
En 2007, le Giec a eu le prix Nobel, mais il est aussi régulièrement remis en question. Même si on les entend moins, les climatosceptiques n'ont en effet pas disparu. Le Giec est soupçonné régulièrement d'être financé par les lobbys : son financement semble pourtant assez clair. En 2009, juste avant la COP de Copenhague, une fuite de courriels d'un grand laboratoires anglais avait été présentée comme une preuve de l'exagération du rôle de l'homme dans le réchauffement climatique. Une enquête indépendante avait fini par tout démentir.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.