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Jacques Chanut (FFB) : concernant les travailleurs détachés, "il faut plus de contrôles sur les chantiers !"

Le président de la Fédération française du bâtiment Jacques Chanut était l'invité de "L'interview éco", mardi sur franceinfo, pour évoquer l'avenir des travailleurs détachés en Europe.

Article rédigé par franceinfo, Jean Leymarie
Radio France
Publié
Temps de lecture : 4min
Jacques Chanut, président de la Fédération française du bâtiment, le 13 juin 2017, sur franceinfo. (FRANCEINFO / RADIOFRANCE)

Emmanuel Macron hausse le ton sur les travailleurs détachés. La France veut que la directive européenne soit révisée plus durement que prévue. Ce statut permet à un salarié, envoyé par son employeur à l'étranger, de conserver la couverture sociale de son pays d'origine. Il est accusé de favoriser le dumping social entre les entreprises. Les membres de l’Union européenne sont très divisés. Les 28 ministres du Travail ont rendez-vous, jeudi 15 juin, à Luxembourg pour débattre de cette question. Sur franceinfo mardi 13 juin, Jacques Chanut, président de la Fédération française du bâtiment, attire l'attention sur le "dévoiement" qui est fait de la directive européenne. Il dénonce "un sentiment d'impunité" qui s'est installé "dans la tête des entreprises et des clients". Il réclame "plus de contrôles et de sanctions", car le problème "est la non-application" de cette directive.

franceinfo : Est-ce que vous apportez votre soutien à la démarche d'Emmanuel Macron ?

Jacques Chanut : Nous sommes pour le marché européen et pour l'Europe. Sur les bas salaires, si la directive est respectée, il y a un écart de 5 à 7% avec les pays d'Europe de l'Est. Aujourd'hui, les écarts sont de 30 à 50%. Cela ne s'explique en rien. La règle du détachement n'est donc pas le sujet. C'est la non-application de cette directive qui est de la seule responsabilité de l'État français. Il n'y a pas suffisamment de contrôles et de sanctions. Le problème est la fraude massive que l'on a laissé s'installer depuis des années. Il y a un sentiment d'impunité qui s'est mis dans la tête des entreprises et des clients. Ces derniers se sont habitués à avoir des coûts moindres du coût horaire d'un ouvrier français.

Quel est le plus urgent à faire pour le secteur du bâtiment ?

Revoir la directive est une bonne chose. Elle est sujette à interprétation. Il faut aller plus loin sur la possibilité de contrôle de la mise en œuvre de cette directive, notamment en terme de déclaration sur la feuille de paie du salarié détaché, de la prise en charge du logement, de la nourriture, ou du voyage. Si cela apparaissait sur la fiche de paie du salarié, faite par le patron dans le pays d'origine, cela permettrait aux forces de contrôle d'aller plus loin, comme pour les déclarations de sécurité sociale. Le secteur du bâtiment est mis en danger par cette concurrence déloyale. Pour autant, il faut distinguer ceux qui travaillent de manière tout à fait légale, dans les conditions légales de la directive. Nous contestons le dévoiement.

Concernant la réforme du droit du travail, est-ce que le début des discussions vous convient ?

Nous ferons des commentaires avec des éléments précis. Nous rappelons l'attachement de notre secteur à ce que les règles sociales soient bien communes à tout un secteur. Il faut faire attention à ce qu'il n'y ait pas des différences sociales trop fortes entre les entreprises françaises. L'entreprise est le sujet central, mais il y en a une multitude. Certaines grandes entreprises ont des structures pour discuter, échanger et signer des accords. Et puis il y a une kyrielle de petites entreprises où le chef d'entreprise est le directeur financier, le directeur commercial et le DRH.

Avez-vous peur que la réforme soit faite pour les grandes entreprises et pas pour les petites ?

Je n'ai peur de rien. J'attends les éléments. Il faut ramener le plus possible les discussions dans l'entreprise. Dans l'organisation du travail, cela parait essentiel. Par contre, sur le taux de rémunération des heures supplémentaires ou sur la protection sociale, je suis beaucoup plus dubitatif. Mais attendons le document officiel de négociation. On saura faire porter notre voix par le Medef et la CPME.

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