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"Toujours appeler un chat un chat, même les dictateurs" : la fille de la journaliste assassinée Anna Politkovskaia raconte le combat de sa mère pour la vérité

À 43 ans, Vera Politkovskaia, menacée de mort dans son pays, a fini par quitter la Russie l’an passé, quelques semaines après le début de l’invasion de l’Ukraine. Elle publie cette semaine un livre en Italie pour rendre hommage au combat de sa mère pour la vérité.

Article rédigé par Marion Lagardère
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Anna Politkovskaïa, journaliste d'investigation assassinée le 7 octobre 2006 à Moscou (Russie).
 (EPSILON / GETTY IMAGES EUROPE)

C’est une journaliste, Vera Politkovskaia, qui rend hommage à une journaliste, sa mère Anna Politkovskaia, grand reporter du journal Novaia Gazeta assassinée dans la cage d’escalier de son immeuble le 7 octobre 2006 à Moscou alors qu’elle rentrait de ses courses. Ce jour-là, Vera avait 26 ans et elle n’a pas cru aux menaces : "je m’étais dit ‘elle est tellement populaire, tellement connue, ils ne le feront pas’ et puis j’ai eu tort, les dictateurs s’offrent toujours des sacrifices pour consolider leur pouvoir." Vera Politkovskaia, 43 ans aujourd’hui, dit ces mots dans un livre d’entretiens sorti mardi 21 février en Italie, intitulé Une mère et dont le quotidien Corriere della Sera publie de longs extraits.

Elle décrit une mère à laquelle elle et son grand-père demandaient toujours lorsqu’elle partait "c’est dangereux ?" et qui répondait "c’est nécessaire", une journaliste qui a toujours gêné, Vladimir Poutine bien sûr mais aussi ses lecteurs "parce que ma mère voulait dire la vérité, et la vérité souvent n’est pas une bonne nouvelle, que ce soit le sort des soldats pendant la guerre en Tchétchénie, les morts, les vies des pauvres gens, ou la corruption". En résumé, ce qu’a dit Anna Politkovskaia aux Russes, c’est que beaucoup de problèmes ne sont pas forcément le fait, comme le répétaient et le répètent encore les chaines de télés, de "l’Occident décadent".

"Dire la vérité, coûte que coûte"

En lisant ses lignes, on comprend que 16 ans plus tard, rien n’a changé, sa mort et les alertes qui allaient avec ont été oubliées. Ironie terrible : c’était pourtant l’un de ses grands principes : "la seule façon de protéger la liberté, disait-elle, c’est de combattre le mensonge et de dire la vérité, coûte que coûte, quoi qu’il arrive". Les années ont passées, Vera est restée à Moscou, elle a eu une fille. Et puis l’invasion de l’Ukraine a commencé et le nom Politkovskaia est redevenu dangereux à porter, jusqu’à recevoir des menaces de mort. Alors elle est partie, dans un lieu sûr qu’elle préfère tenir secret.

Un départ comme un crève-cœur. "Je n’ai jamais voulu partir, la Russie est le pays des assassins de ma mère, certes, mais c’est aussi le mien". C’est donc avec l’espoir du retour qu’elle a fait ses valises, pour un exil qui lui a tout de même fait gagner une chose : la possibilité d’écrire plus librement, de parler plus librement et à la fin de pouvoir sortir ce livre "écrit, ajoute Vera, pour honorer la leçon que m’a donnée ma mère : être courageuse et toujours appeler un chat un chat, y compris les dictateurs."

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