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Sarah Voss, la gymnaste allemande dont la combinaison intégrale est un message contre la sexualisation des corps des athlètes

Elle a participé aux championnats d’Europe de Bâle en arborant pour la première fois un justaucorps couvrant intégralement les jambes. Une tenue autorisée par les règles de la fédération mais qu’aucune athlète n’avait osé porter.

Article rédigé par franceinfo, Marion Lagardère
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Sarah Voss, gymnaste allemande lors de la qualification des Championnats d'Europe de gymnastique artistique à Bâle (Suisse), le 21 avril 2021. (FABRICE COFFRINI / AFP)

L’allemande Sarah Voss, 21 ans, a concouru il y a quelques jours aux championnats d’Europe de Gymnastique de Bâle dans une combinaison noire et rouge pailletée lui recouvrant les jambes jusqu’aux chevilles, et dans ce milieu extrêmement codé, c’est une révolution. La meilleure preuve, c’est qu’elle n’a rien remporté, pourtant c’est d’elle que l’on parle, c’est elle qui est partout : dans la presse allemande bien sûr, mais aussi anglaise, italienne, brésilienne, indienne… Des médias qui présentent tous cette combinaison comme une réponse à la sexualisation des corps des sportives.

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"Nous, les femmes, explique Sarah Voss à la radio allemande ZDF, nous voulons simplement nous sentir bien dans notre peau. Or, en gymnastique, plus vous grandissez et quittez votre corps d’enfant, plus cela devient difficile. Quand j’étais petite, je n’avais aucun problème avec le justaucorps et sa coupe échancrée, mais quand la puberté est arrivée, là j’ai senti un inconfort, un malaise croissant." Un malaise qui est loin d’être une exception. Depuis des mois maintenant, le monde de la gymnastique est en plein séisme, la parole se libère : ce qui était gardé secret sort enfin sur la place publique. Abus, harcèlement, viols, que nombre de gymnastes ont décidé de dénoncer, y compris la star de la discipline, la championne du monde Simone Biles.

Les autres nous regardaient avec mes coéquipières portant cette combinaison, à la fois étonnés et admiratifs, avec les pouces en l’air. Maintenant, j’espère que cela va inspirer celles qui ne se sentent pas à l’aise avec la tenue traditionnelle, qu’elles sachent que c’est possible, et surtout que c’est élégant.

Sarah Voss, gymnaste allemande

à la radio ZDF

Sur les réseaux sociaux, et avec le mot-dièse #gymnastAlliance, toutes décrivent les mêmes pressions : contrôle quotidien du poids, régimes permanents et privation de nourriture, commentaires sur leurs cuisses, leurs fesses, leur entrejambe, jusqu’à la nausée, jusqu’à la détestation de leur propre corps. Des corps de mineurs sur lesquels est posé un regard sexualisé, allant parfois jusqu’à l’abus, l’agression. Voilà, il y a tout ça dans la combinaison de Sarah Voss. Ce justaucorps à jambes longues que, le lendemain, ses coéquipières Elli Seitz et Kim Bui ont également adopté pour aborder le concours général.

"C’est assez fou, explique Sarah Voss, les autres nous regardaient, à la fois étonnés et admiratifs, avec les pouces en l’air, maintenant, j’espère que cela va inspirer celles qui ne se sentent pas à l’aise avec la tenue traditionnelle, qu’elles sachent que c’est possible, et surtout que c’est élégant." Parce que Sarah Voss le dit aussi : le but c’est de faire honneur à ce qu’elle appelle "ce grand sport", et faire en sorte que les regards soient focalisés sur la performance, l’art et le dépassement de soi.

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