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En Inde, le docteur Rakh annule les frais médicaux à chaque naissance d'une fille et organise une fête pour lutter contre la misogynie

Ce médecin célèbre cette année les dix ans du lancement de cette initiative dans son hôpital qui vise à endiguer l’inégalité dès la naissance. Une gratuité des soins qu’il a mise en place après avoir remarqué que les naissances de garçons étaient systématiquement fêtées et celles des filles boudées.
Article rédigé par Marion Lagardère
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Desnouveau-nés à la maternité de Guwahati (Inde). (BIJU BORO / AFP)

C’est un praticien qui révolutionne non pas la médecine, mais la société indienne, et qui touche précisément à sa misogynie intrinsèque. Il s’appelle Ganesh Rakh, il exerce dans un hôpital de la vile d’Hadapsar au sud-ouest de l’Inde et il a fait la une des journaux en cette fin d’année pour son initiative totalement unique : lorsqu’une petite fille naît, le docteur Rakh organise une fête dans sa maternité, il convie les familles, offre des bonbons, des fleurs et des ballons et surtout, il annule tous les frais médicaux liés à la naissance. Les parents ne payent rien.

C’est un principe qu’il a lancé en 2012 et dont il a fêté les dix ans cette année, à grand renfort d’interviews dans la presse nationale pour dire aux familles indiennes que les vies des filles valent autant que celles des garçons. "Quand ma maternité a ouvert, explique-t-il à l’agence de presse ANI, j’ai remarqué que lorsqu’une fille naissait, certaines familles hésitaient à venir la voir. Dans certains cas, la mère ne recevait aucune visite, une situation qui m’a révolté et m’a poussé à trouver une solution, pour rendre justice à ces filles et sensibiliser à l’égalité."

2 400 filles mises au monde gratuitement en dix ans

Effectivement, lorsqu’un garçon naît en Inde, la question de fêter son arrivée ne se pose pas. Ganesh Rakh explique que dans ces cas-là, tout le monde se presse autour du bébé, complimente la mère, apporte des cadeaux. Les filles, elles, ne sont pas fêtées. Synonyme de dot à constituer, et donc de sacrifices à faire, les cas où elles sont abandonnées dès la sortie de l’hôpital arrivent encore, même en 2022. Parfois, en apprenant qu’elles portent une fille, les femmes ne vont pas au bout de leur grossesse. D’après le ministère de la Santé, depuis la généralisation des échographies dans les années 1990, les avortements ont augmenté. Une étude du Pew Research Center a même estimé leur nombre à neuf millions sur les vingt dernières années.

D’où l’initiative du docteur Rakh de jouer à la fois la carte financière, avec la gratuité totale de la prise en charge, et la carte festive pour changer les mentalités, changer de perspective. En dix ans, il a vu naître plus de 2 400 filles et fait sourire autant de familles. Une initiative qui en a inspiré d’autres, ailleurs en Inde, mais aussi en Asie et en Afrique, et qui rappelle que ce n’est pas le genre qui fait la valeur d’une vie, c’est la joie qu’on y met.

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