Édito
Pourquoi tant de sollicitude pour les agriculteurs ?

On assiste depuis quelques jours à une "opération déminage" de la part du gouvernement, à l’approche du Salon de l’Agriculture
Article rédigé par Agathe Lambret
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Le Premier ministre Gabriel Attal en visite dans une ferme d'Indre-et-Loire le 28 janvier 2024 (HLEGUELLEC / MAXPPP)

Gabriel Attal à la ferme, épisode 99... On n’en finit plus de voir l’exécutif au chevet des agriculteurs, entre déplacements sur le terrain et réunions qui se multiplient en coulisses. Il faut dire que le gouvernement s’est arraché les cheveux avec les 1 001 revendications des paysans : éleveurs, céréaliers, bio , maraîchers, haies, gazole non routier, et le toujours impossible curage des fossés, métaphore d’un gouvernement à son tour embourbé, noyés sous des règles kafkaïennes. N’en jetez plus !

Gabriel Attal a du s’y reprendre à trois fois : il avait déjà fait des annonces, feuilles nonchalamment posées sur une botte de paille opportunément placée... La stratégie ayant montré ses limites, il a fallu recommencer, une première fois puis une deuxième avec la conférence de presse d’hier. Mais cette fois on ne promettait pas le grand soir à Matignon, cette crise est une formation accélérée à l’humilité. 

Le Salon de l'Agriculture de tous les dangers

L'enjeu de cette valse à trois temps était de préparer le terrain à la visite d’Emmanuel Macron au Salon, samedi 24 février. L’exécutif est fébrile à l’idée d’images d’un président hué, sifflé, qui tourneraient en boucle sur les chaînes d’info, inquiet à l’idée du contraste avec la visite d’une Marine Le Pen qui progresse chez les agriculteurs. Facile d’être applaudie quand on est dans l’opposition : il suffit de souffler sur les braises et de proposer des choses frappées au coin du bon sens, personne ne vous demandera des comptes.

Le président, lui, est attendu au tournant : un "grand débat" avec les agriculteurs pourrait avoir lieu avant la déambulation entre les stands samedi. Si tout n’est pas réglé sur le fond, c’est aussi pour laisser Emmanuel Macron entrer dans la danse et faire lui-même des annonces. Cette visite doit avoir des airs de reprise en main.

Le poids électoral du monde agricole reste important 

Si leur part dans la population active a fondu, l’électorat agricole, lui, représente 8%, et symboliquement bien plus : neuf Français sur dix ont une bonne opinion d’eux. Pas étonnant que tout le monde se les arrache, à moins de quatre mois des européennes : les LR ont recruté une agricultrice sur leur liste, quand le RN veut surfer sur le ras-le-bol des normes.

Et puis il y a le spectre des "gilets jaunes" : mouvement populaire, difficulté à calibrer la réponse pour l’exécutif... Malgré les points communs, il faut que la grogne des paysans reste circonscrite, et que l’histoire ne bégaye pas. Ce Salon de l’Agriculture est l’occasion de la dernière chance pour apaiser enfin la colère des paysans, avec cette difficulté : non seulement la France doit composer avec l’Union européenne, mais en plus Bruno Le Maire vient de siffler la fin de la récré côté dépenses : dix milliards d’euros d’économies à trouver, ça n’est pas totalement compatible avec la politique du chéquier.

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