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La chaîne L’Équipe a 25 ans : "On est petits mais ambitieux", assure son patron Jérôme Saporito

Le budget de l’antenne du canal 21 de la TNT ne lui permet pas d’avoir de grandes compétitions internationales. Elle a donc fait le pari de miser sur des épreuves moins prestigieuses et des sports peu médiatiques mais où les Français brillent souvent. Et le succès est au rendez-vous.
Article rédigé par Célyne Baÿt-Darcourt
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 9min
Jérôme Saporito, directeur de la chaîne L'Équipe. (franceinfo)

Jérôme Saporito dirige le pôle télévision du groupe L'Équipe. Il est donc le directeur de la chaîne du même nom, sur le canal 21 de la TNT. Elle s'appelait L'Équipe TV à sa création en 1998, il y a 25 ans, puis L'Équipe 21 au moment de son passage sur la TNT. Elle s'intitule désormais, tout simplement, L'Équipe.

franceinfo : Comment est-ce que vous définissez cette chaîne aujourd'hui ?

Jérôme Saporito : C'est une chaîne feel good de sport. On parle passionnément de sport, on a une équipe de passionnés et donc on doit transmettre cette passion à travers des moments forts du sport. Parfois, ils sont tristes, mais souvent, ils sont joyeux. On doit être dans cette idée-là, d'avoir ce côté feel good.

L'Équipe a gagné plus de 40% d'audience en cinq ans, avec un mois de novembre historique, selon Médiamétrie avec 1,6% de part d'audience. Pourtant, vous n'avez pas la Coupe du monde de foot, ni celle de rugby, ni le Tour de France, ni Roland-Garros et pas de J.O. Finalement, les sports de niche ont un public plus large qu'on ne l'imaginait ?

Oui, parce qu'on a le biathlon, on a le triathlon, on a le tennis de table, on a beaucoup de football. Mais, par exemple, tous les week-ends, là, jusqu'à la fin mars, on va être à la montagne. Les samedis ou les dimanches, vous allez avoir neuf heures de montagne, entre du freestyle, du biathlon, et du ski, par exemple, ce week-end à Val d'Isère. Donc, là, on n'est pas vraiment dans le sport de niche. On a juste fait ce pas de côté d'essayer d'ouvrir les chakras, autour du sport.

"Ce n’est pas juste du foot, du rugby ou de la Formule 1. On va un peu plus loin et ça, c'est notre mission et on adore ça."

Jérôme Saporito, directeur de le chaîne L'Équipe

à franceinfo

Vous avez choisi aussi des sports où les Français brillent ? Ça aide aussi.

Ça fait toujours partie de ce qu'on recherche. C’est-à-dire qu'il faut absolument qu'un Français joue quelque chose. On est toujours cocardiers, on est français, et on est fiers de l'être. Ça ne veut pas dire qu'il doit tout gagner, ça signifie qu'on doit placer le Français par rapport à l'autre. On a annoncé le renouvellement des 24 Heures du Mans l'année prochaine. Alpine revient en force. Ça va être notre histoire. Est-ce qu’Alpine peut aller battre Toyota ou Ferrari ?

Quand on a une chaîne de sport, qui plus est gratuite, donc accessible à tous, ce n'est pas terriblement frustrant de ne pas pouvoir diffuser les JO de Paris l'été prochain ? C'est France Télévisions qui a les droits pour les chaînes en clair.

Mais ils sont en clair et donc c'est très bien. Notre travail, ça va être quelque part d'acculturer les Français. On a sept mois avant les Jeux et il y a plein de sportifs et sportives qui vont représenter la France qu'on va découvrir sur la chaîne L'Équipe et qui j'espère, vont briller à partir du 26 juillet.

Vous êtes une rampe de lancement pour France Télévisions ?

C'est chouette de se dire ça. On a une mission. J'ai entendu la ministre des Sports parler de l'année 2024. Ça doit être l'année du sport et le sport doit être une grande cause nationale. On s'inscrit là-dedans. On fait la promotion du sport et la promotion des JO Et après, on regardera France Télévisions ou Eurosport pendant 17 jours.

Vous n'avez pas essayé de négocier avec France Télévisions pour qu'ils vous donnent ou revendent quelques épreuves ?

Les Jeux olympiques ne font pas partie de notre modèle économique. Je pense que le succès vient aussi du fait qu'on sait exactement qui on est, où on doit se placer. On ne regarde pas avec aigreur ou jalousie les grosses chaînes qui ont des budgets vraiment beaucoup plus conséquents.

Vous êtes une petite chaîne ?

Oui, mais on est ambitieux et on s'installe. Vous avez dit 1,6% de parts de marché. Le premier jour, on a été en clair, on a fait 0,1%. Vous voyez le chemin parcouru.

L'Équipe a donc renouvelé les droits des 24 Heures du Mans jusqu'en 2025. Il y aura aussi bientôt le rallye Dakar. Vous venez de racheter les droits. Pourquoi vous êtes vous positionné sur cette course qui n'est plus vraiment tendance ? Elle n'a plus l'aura des années 1980 ou 1990.

On va justement essayer de lui redonner son aura. Ça reste une aventure humaine, la meilleure dans son domaine. On est dans les rallyes-raids et là, c'est le meilleur du rallye-raid et vous avez toujours la même chose, la même histoire. Sébastien Loeb ou Peterhansel vont-ils réussir ? Sébastien Loeb, va-t-il gagner son premier Dakar ? On est dans des paysages fantastiques. Ça va être en hiver. On va passer du Dakar au biathlon et pour moi, c'est un grand écart qui est fantastique en termes d'expérience télévisuelle.

Comment ça va se passer ? On va suivre la course en direct du début à la fin ?

Non, ça, c'est très compliqué parce qu'ils sont sur 600 kilomètres. Donc ça, on n'y est pas encore. Mais en tout cas, on va redonner cet esprit d'urgence à regarder parce qu'on va faire de 12h à 14h les arrivées en direct. Donc on va suivre Sébastien Loeb, ou Stéphane Peterhansel, les voir passer la ligne et savoir s'ils sont devants et ceux qui sont derrière parce que c'est du chronométrage.

Quels sont les droits sur lesquels vous lorgnez désormais ?

J'aimerais bien vous répondre. On se creuse la tête sans arrêt pour se demander ce qu'on pourrait aller chercher. Le Dakar, ça fait huit mois que je discute avec les organisateurs parce que c'est une course qui est patrimoniale. Je me rappelle de La Cinq ou je regardais le Paris-Dakar à l'époque. Ça fait partie de ce qu'on cherche. Après, vous dire ce qui nous intéressera, je suis bien incapable de vous répondre. Peut-être qu'un jour, on aura du tennis et ça me ferait plaisir. On n'a jamais eu l'occasion et ça arrivera peut-être un jour.

Vous n'êtes pas qu'un robinet à compétition sur la chaîne L'Équipe. Il y a aussi des émissions en direct, trois par jour. Ça, c'est essentiel quand on voit que des plateformes de streaming sont désormais en compétition avec les chaînes de télévision pour avoir des droits sportifs. Les talk-shows, c'est ainsi que vous pouvez vous différencier ?

C'est essentiel en deux points. D'un point de vue économique, parce que ça nous donne notre modèle, notre puissance et notre force. Et c'est essentiel aussi parce qu’on est une chaîne où il faut incarner. On a de nombreux talents et c'est de cette façon-là, qu'on les montre à l'antenne. Ces talks sont là pour donner aussi de l'humeur et de l'humour parfois. On doit avoir ce côté feel good parce que je ne veux pas que la chaîne L'Équipe soit un robinet à images. On doit retrouver des caractères, des personnages qu'on aime ou parfois qu'on déteste.

Être une chaîne 100% sport et gratuite, est-ce que ça peut le rester longtemps encore avec la concurrence des plateformes ?

On a diffusé 63 sports l'année dernière, on ne pensait pas qu'on serait capable. Et maintenant on va plus loin puisque, depuis un an maintenant, on parle de bouquets de chaînes. On a créé deux chaînes numériques et donc vous avez 2 500 heures de sport sur la chaîne l'Équipe et 2 500 heures sur le site et l'application avec L'Équipe live 1 et L'Équipe live 2. Tout ça, c'est gratuit. Donc ça aussi, c'est notre mission par rapport aux plateformes.

"Les plateformes vont toujours s'intéresser à ce qu'il y a de meilleur. On va être peut-être dans ce qu'on a juste en dessous."

Jerôme Saporito, directeur de la chaîne L'Équipe

à franceinfo

Vous allez fêter, lundi 11 décembre, à l'antenne les 25 ans de la chaîne pour revoir les meilleurs moments de ces 25 dernières années. Quel est votre meilleur moment à vous ?

La dernière course de Martin Fourcade, parce que pour nous, le biathlon, c'est extrêmement important. Et Martin Fourcade, quand il a décidé d'arrêter, suivre sa dernière course et en plus, il l'a gagnée, ça a été vraiment un très beau moment à vivre.

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