Traité transatlantique: quand de Gaulle dit non à Kennedy (1962-1963)
Retour le 4 juillet 1962.
Le président John F. Kennedy est à Philadelphie pour y célébrer le Jour de l’Indépendance. La situation économique des Etats-Unis n’est pas brillante. Depuis quelques années, l’Europe de l’Ouest affiche une croissance très supérieure à celle des Etats-Unis –on a du mal à le croire aujourd’hui.
Une réalité qu’il faut bien garder en tête en écoutant ce discours du président américain:
"Nous ne regardons pas une Europe forte et unie comme une rivale, mais comme une partenaire. Nous croyons qu'une Europe unie sera capable de se joindre aux Etats-Unis et à d'autres pays pour abaisser les barrières douanières L'édification de l'association atlantique ne sera achevée ni aisément, ni à bas prix. Mais je dirai ici aujourd'hui, en ce jour anniversaire de l'indépendance, que les Etats-Unis sont prêts à souscrire à une déclaration d'interdépendance ".
Ce "grand dessein", cette alliance atlantique n’est pas que commerciale, mais dans le contexte actuel de négociation du traité transatlantique, il est intéressant de s’arrêter sur cette dimension.
Partenariat ou domination de l'un sur l'autre ?
Le général de Gaulle reçoit avec circonspection cette déclaration d’interdépendance américaine. Il dira à ses proches que lorsqu’il entend partenariat, il sait qu’il s’agit en fait de la domination de l’un sur l’autre. On retrouve cette idée six mois plus tard lorsque De Gaulle refuse l’entrée du Royaume-Uni dans la CEE et enterre avec elle le projet d’une vaste zone de libre-échange transatlantique.
"En définitive, il apparaîtrait une communauté atlantique colossale sous dépendance et direction américaine. Ce n'est pas du tout ce qu'a voulu faire et ce que fait la France : une construction proprement européenne ".
L'Allemagne courtisée
Ces propos du général de Gaulle ouvrent une période de graves turbulences dans les relations entre la France et les Etats-Unis. D’autant qu’au moins de février, de Gaulle fait avancer sa conception de l’Europe, plus distante des Etats-Unis, en signant le traité de l’Elysée avec l’Allemagne.
Pour Kissinger, c’est la stupéfaction à Washington qui va alors tout faire pour courtiser l’Allemagne avec comme point d’orgue ce voyage à Berlin et ces mots si connus de Kennedy (et au passage une succulente faute) :
"Ich bin ein Berliner "
Plus de cinquante ans après, l'issue des négociations actuelles sur le traité transatlantique, le TTIPP ou Tafta en anglais. Le Parlement européen en discute aujourd'hui même.
Alors, Kennedy avait raison d'affirmer en juillet 1962 :
"Tout cela ne sera pas achevé en un an, mais que le monde sache que c'est aujourd'hui notre but "
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