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Qu'est-ce qu'un "job à la con" ?

Occupons-nous nos journées de travail à faire un "bullshit job", un "job à la con" dont la société pourrait très bien se passer ? L'inventeur du concept des "bullshit job", auteur d'un article qui a été lu dix millions de fois, publie cette fois un livre.

Article rédigé par franceinfo, Philippe Duport
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3 min
David Graeber a défini cinq catégories de métiers inutiles. (ODILON DIMIER / MAXPPP)

Après avoir rédigé un article lu dix millions de fois, l'inventeur du concept des "bullshit job", que l'on peut traduire par "job à la con" en français, publie un livre mercredi 5 septembre en France. David Graeber est un militant, l'un des leaders du mouvement Occupy Wall Street, un mouvement de contestation du capitalisme financier lancé en 2011. Il est aussi professeur à la London School of Economics et a même été accueilli en grande pompe par le collège de France au printemps dernier. À travers ce livre, il théorise un peu plus sa notion dérangeante de "job à la con". Son ouvrage, intitulé Bullshit jobs, est publié aux éditions Les Liens qui libèrent. Les bonnes feuilles ont été sorties par des titres aussi opposés que Marianne et Le Figaro. Et ça décape.

Les "bullshit jobs", ce sont des emplois qui sont tellement inutiles à la société que les salariés qui les occupent ont eux-mêmes du mal à justifier de leur existence. Attention, ce ne sont pas des travaux difficiles, pénibles. Ce sont des métiers de bureau ennuyeux qui provoquent chez ceux qui les exercent le désormais fameux "bore out", le syndrome de l'ennui au travail, qui fait de la concurrence au "burn out" ces dernières années. Et, surprise, selon David Graeber, ces métiers sont plutôt mieux payés que les postes productifs.

Cinq catégories de "jobs à la con"

David Graeber a pour ce livre établi des catégories de ces métiers inutiles, une typologie qu'il classe en cinq grandes familles. La première, ce sont les "larbins", ceux qui ont pour seul but de faire briller quelqu'un d'autre. David Graeber cite l'exemple d'un démarcheur chargé de vendre des actions à des clients, mais de la part d'un courtier, afin de faire croire que celui-ci était trop occupé pour le faire lui-même et qu'il était donc quelqu'un de très important. Deuxième catégorie, les porte-flingues. Le professeur Graeber, pile dans l'actualité, dénonce notamment les lobbyistes et les experts en relations publiques, chargés de convaincre le monde entier de l'excellence de leur organisation.

Il y a aussi les "rafistoleurs" dont le boulot est de réparer les dégâts causés par des supérieurs hiérarchiques négligents. Il identifie également la catégorie des "cocheurs de case", comme cette femme chargée de noter les loisirs préférés d'une maison de repos, alors que les résidents savent très bien qu'il n'est aucunement tenu compte de leurs préférences. Et enfin, il y a les "petits chefs", et notamment ceux chargés de créer des tâches inutiles qu'ils confient à des subalternes. Bref, c'est une vision très noire et acide du monde du travail, mais dont le succès mondial ne peut pas totalement être bâti sur du sable.

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