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De nouveaux droits pour les détenus qui travaillent

Depuis le 1er mai 2022, les détenus qui travaillent ont de nouveaux droits. C'était l'un des engagements d'Emmanuel Macron pour son premier mandat. 

Article rédigé par Philippe Duport
Radio France
Publié
Temps de lecture : 5 min
Le contrat d'emploi pénitentiaire est entré en vigueur le 1er mai 2022.  (KWANCHAI LERTTANAPUNYAPORN / EYE / EYEEM / GETTY IMAGES)

Travailler en prison est-il un droit ? Quel est le lien entre le détenu et son employeur Mathieu Quinquis est avocat au barreau de Paris, spécialiste du droit pénitentiaire, membre de l'association des avocats pour la défense des détenus.

france Info : Pour un détenu, travailler est-il un droit ?

 Mathieu Quinquis : Travailler est un droit pour personne détenue,mais c’est un droit conditionné, d’abord à l’autorisation de l’administration pénitentiaire, et ensuite en fonction de sa situation pénale ou alors de sa minorité, il y a des conditions supplémentaires. Par exemple, une personne incarcérée en détention provisoire devra obtenir plus d’autorisations pour pouvoir travailler.

A l’inverse, peut-on obliger un détenu à travailler ?

Le travail n’est plus imposé aux détenus depuis 1987. On est passé d’une logique afflictive, le travail devait être un accessoire de la peine, au travail comme un élément favorisant la réinsertion.

Pour qui peut travailler un détenu ?

Il y a deux types d’activité. Ce que l’on appelle le service général, c’est-à-dire participer à la vie de l’établissement, son entretien, son ménage, la vie de la cuisine, et le travail dit aux ateliers, effectué au bénéfice d’entreprises privées, qui proposent souvent de la manutention, peu qualifiée, peu intéressante.

Depuis le 1er mai un contrat d’emploi pénitentiaire est entré en vigueur. Quelle était la situation antérieure ?

Auparavant, il n’y avait pas de contrat. Le détenu signait simplement un acte d’engagement unilatéral avec l’administration pénitentiaire qui impliquait plus de devoirs que de droits.

Et aujourd’hui ?

Ce contrat offre des droits au travailleur détenu et clarifie l’ensemble du processus de travail. De sa phase de recrutement – on clarifie les critères pour lesquels on peut recruter une personne et les procédures que l’on suit, les entretiens, les phases de sélection, les phases d’affectation – au travail, et le terme du contrat de travail. 

Est-ce que ça veut dire que le droit du travail est en train d’entrer en prison ?

On peut dire ça. Il y a quelques années, l’ancien contrôleur des lieux de privation de liberté qualifiait le travail pénitentiaire d’âge préindustriel. On peut dire qu’on a fait un saut dans le temps, mais il y a encore beaucoup de choses à découvrir et des droits sociaux à accorder aux travailleurs détenus.

Quelle est la rémunération des détenus ?

Elle est indexée sur le smic, mais ce n’est pas 100% du smic. Selon la nature du travail, on varie entre 20 et 45% du smic, donc des taux de rémunération extrêmement faibles au regard du coût de la prison, car être incarcéré entraîne des coûts pour la personne détenue, qui parfois continuera de payer des loyers à l’extérieur, contribuera à l’éducation et à l’entretien de sa famille, et qui devra avoir accès à certains biens de première nécessité en détention.

On attend une prochaine ordonnance sur le plan social, quel devrait en être le contenu ?

Elle a pour vocation de poser un certain nombre de droits sociaux des travailleurs détenus et à leur offrir des garanties particulières dans l’exercice de leur travail. On parle d’assurance vieillesse, d’assurance chômage, de cotisations à la retraite. Elle doit aussi favoriser un certain nombre de contrôles sur les conditions d’exercice du travail, et notamment à permettre à l’inspection du travail d’avoir un cadre clair d’intervention sur le travail pénitentiaire.

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