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C'est dans ma tête. Un Grenelle des violences conjugales

Un "Grenelle des violences conjugales" commencera lundi prochain, 3 septembre,  à l’initiative de Marlène Schiappa, Secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations. La psychanalyste Claude Halmos explique aujourd'hui qu'il s'agit d'une prise de conscience essentielle.

Article rédigé par franceinfo, Claude Halmos
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Une manifestation pour réclamer des mesures de lutte contre les féminicides, à Paris, le 6 juillet 2019. (SAMUEL BOIVIN / NURPHOTO / AFP)

Lundi prochain, 3 septembre, commencera, à l’initiative de Marlène Schiappa, chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations, un "Grenelle des violences conjugales", dont le but est d’accroître les moyens d’action par rapport aux meurtres des femmes par leurs partenaires, ou ex-partenaires.

De nombreuses questions vont être débattues, notamment la demande, de certaines associations, que puisse entrer dans le Code pénal, la notion de "féminicide".

franceinfo : Pensez-vous, Claude Halmos, qu’une initiative comme ce "Grenelle" puisse faire changer les choses ?

Claude Halmos : Je ne sais pas ce que ce Grenelle peut changer sur le terrain, mais il participe d’une prise de conscience qui est aujourd’hui essentielle.

Vous pouvez nous expliquer pourquoi ?

Des femmes sont tuées, tous les jours, dans le monde, parce qu’elles sont des femmes. C’est-à-dire dans des situations où des hommes ne seraient pas tués.
On les tue parce qu’elles n’ont pas respecté des règles qui réduisent, spécifiquement, leur liberté (et on baptise cela "crimes d’honneur"). Ou parce que leur dot est jugée insuffisante. Ou on les tue, par dizaines, comme au Mexique, après les avoir violées.

Et puis il y a ce que l’OMS appelle "les violences commises par un partenaire intime", et il faut savoir que 35% des femmes tuées dans le monde, le seraient par leur partenaire.

Et les femmes françaises ne sont pas épargnées ?

Non. Le nombre de ces meurtres a augmenté cette année, de façon terrifiante. Mais ce qui est tout aussi terrifiant, c’est que l’on continue à ne pas entendre que le danger d’être tué par son partenaire, menace spécifiquement les femmes.

Et on ne l’entend pas, parce que la réalité de ces meurtres est trop souvent masquée. Par la référence à la passion, qui excuserait le meurtrier : la notion de "crime passionnel" a servi à cela, jusqu’à ce que, en 1994, la loi pose le fait que le meurtrier soit le partenaire, comme une circonstance aggravante. Ou par l’idée que la séparation, dans un couple, pourrait ne pas être supportable. Idée qui fait écho à des croyances sociales.

De quelle façon ?

Le rêve d’être propriétaire de l’autre, existe chez tous les enfants, et peut, faute d’éducation, persister à l’âge adulte, et devenir une pathologie. Mais l’imaginaire de possession des hommes qui en sont atteints, trouve un écho dans notre société. Car, prônant l’engagement pour la vie, elle accepte toujours mal que l’un des partenaires d’un couple veuille le rompre. Et l’accepte encore moins quand il s’agit d’une femme. Parce que l’idée de l’homme "chef de famille" demeure : on ne part pas sans l’accord du chef.

Et parce que les femmes ne sont toujours pas considérées comme des êtres véritablement majeurs, et libres. On conteste toujours, par exemple, en menaçant l’avortement, leur droit à disposer de leur corps. Et l’on voit mal comment, leur niant la propriété de leur personne, on pourrait trouver légitime qu’elles choisissent leur vie.

C’est pour faire entendre tout cela que des associations demandent que soient reconnue la notion de "féminicide". Et, que l’on approuve ou non ce mot, ce qu’il recouvre est important.

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