BD, bande dessinée. Parlons peinture
Il n’a pas le regard aimable. Il ne l'est pas, d'ailleurs. Frantz Duchazeau parvient pourtant à rendre fascinant Lazare Bruandet, peintre assassin et révolutionnaire.
Sous son tricorne noir, cintré dans sa veste rouge, le pistolet glissé à la ceinture et l’épée pointée vers le lecteur, il n’a rien d’un artiste et tout d’une canaille. Lazare Bruandet, dont Franz Duchazeau évoque, dans Le peintre hors-la-loi, la figure austère et le comportement furieux, a bel et bien existé.
La vie d’un artiste obscur et remarquable
Il n’a pas laissé une trace marquante, mais on lui doit tout de même d’avoir été l’un des tout premiers à décréter : il faut sortir de l’atelier. On ne peint bien la nature qu’en la saisissant sur le motif. Bruandet est né en 1754. Si sa vie est mal connue, il est avéré que l’homme était bagarreur, jaloux et boiteux. Et aussi solitaire qu’un sanglier, quand il finit par partir se cacher en forêt de Fontainebleau, alors que le vieux monde s’écroule aux alentours.
J’ai flashé sur Lazare Bruandet pour son nom qui me semblait cinglant et coupant. On sait juste qu’il peignait des enseignes à Paris pendant la Révolution française, qu'il a tué sa femme et qu’il fut l’un des tout premiers à arriver à la Bastille.
Frantz Duchazeau
Frantz Duchazeau imagine donc le reste
D’abord, le combat permanent du peintre face à la toile, plus difficile à affronter encore que les brigands de grands chemins et la soldatesque. Et les bois, les futaies, les éperons rocheux, qu’il faut continuer à admirer et qui échappent à votre pinceau.
Tous ceux qui font du dessin doivent, chaque jour, tout remettre en question. Car on n’arrive jamais à ce qu’on veut exactement. Pour Bruandet, qui veut parvenir à la perfection, c’est très douloureux.
Frantz Duchazeau
On l’aura compris : avec cette évocation d’un Lazare Bruandet sauvage et sensible, Frantz Duchazeau, aussi revêche et autodidacte que son modèle, propose un portrait miroir sans concession fort habilement brossé.
Le peintre hors-la-loi, aux éditions Casterman.
Tous les 15 jours, Jean-Christophe Ogier accueille ici la chronique "Info manga" de Lætitia de Germon de la rédaction de franceinfo.fr. Pour vous guider parmi les nombreuses parutions, Lætitia vous livre sa sélection et ses coups de cœur.
Blue Period, de Tsubasa Yamaguchi, chez Pika
Publié depuis 2017 dans le magazine Afternoon (L’Habitant de l’infini, Parasite, BLAME!) de Kodansha, ce seinen a remporté l’édition 2020 du Prix Manga Taishô (grand prix du Manga) mais aussi le non moins prestigieux prix Kodansha du meilleur manga 2020 dans la catégorie générale.
Il n'est pas toujours difficile de trouver sa voie lorsqu'on est lycéen, même si on est bon élève. Yatora est un lycéen studieux à qui tout réussit. Pourtant, il ressent depuis toujours une impression de vide en lui. Jusqu’au jour où, par hasard, il tombe sur un tableau qui le subjugue littéralement… Très vite, Yatora réalise que peindre est le seul moyen de faire passer ses émotions et de se révéler. À partir de ce moment, il va se livrer corps et âme à la peinture pour tenter le concours d’entrée de la plus sélective des écoles de Beaux-arts !
Ce manga donne l'occasion de s'interroger sur ce que l'on veut vraiment, sur les passions qui sommeillent en nous. Tsubasa Yamaguchi, elle-même diplômée de la faculté́ des arts de Tokyo, convoitée par le héros, propose un véritable panorama des arts et techniques de peinture dans de magnifiques planches. Elle donne aussi des conseils théoriques, techniques et institutionnels. Le récit est très rythmé et on suit activement le héros.
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