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Manuel Valls : "La Catalogne est dans une impasse préoccupante"

Invité sur franceinfo, l'ancien Premier ministre, Manuel Valls, a estimé qu'il faudrait "beaucoup de temps" pour "essuyer les plaies" en Catalogne, alors que les indépendantistes catalans ont conservé jeudi leur majorité au parlement régional.

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Radio France
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Manuel Valls, ancien Premier ministre, était l'invité de franceinfo. (JEAN-CHRISTOPHE BOURDILLAT / RADIO FRANCE)

"La société catalane est fracturée, fatiguée, par ces mois de campagne. Le résultat ne me surprend pas forcément", a réagi ce vendredi sur franceinfo Manuel, alors que les indépendantistes catalans conservaient, la veille, leur majorité au parlement régional. Les trois formations indépendantistes disposent, avec 70 sièges sur 135 au parlement régional, de la majorité absolue. 

"Les indépendantistes ont perdu des sièges, des voix, explique l'ancien Premier ministre, et dépendent comme pour la législature qui vient de se terminer de quatre sièges d'un parti d'extrême gauche anti-système, anti-marché, anti-Etat, anti-Europe, donc tout cela n'est pas très facile à gouverner."

L'agenda indépendantiste, selon lui, s'est heurté à un mur. Il cite ainsi à l'appui de son propos les quelque 3 000 entreprises qui ont quitté la Catalogne, ou encore la position de l'Union européenne, qui s'est exprimée contre la voie indépendantiste. "Il n’y a pas vraiment de solution, il y a une forme d’impasse, déplore le député apparenté LREM de l'Essonne. Et il faudra sortir de cette impasse, par le dialogue, par le respect, par l'écoute, par le fait qu'on abandonne un agenda indépendantiste." 

Manuel Valls a salué la victoire du parti Ciudadanos, un parti "jeune", "anti-corruption". "C'est la première fois en Catalogne qu'un parti national arrive en tête. Mais c'est une impasse préoccupante et il faudra beaucoup de temps pour soigner les plaies", assure-t-il.  Et il insiste : "Ce qui a mis la Catalogne dans cette impasse, dans cette fracturation, c'est le projet indépendantiste [qui est], c'est ma conviction profonde, il est mort face à la réalité." Aussi appelle-t-il au dialogue et à l'apaisement. Mais après il faut retrouver la voie du dialogue et de l'apaisement. Depuis la Belgique, Carlos Puigdemont a demandé la libération "des prisonniers politiques". "L'Espagne est une démocratie, c'est un Etat de droit, il y a une justice indépendante, il n'y a pas de prisonniers politiques. A la justice d'agir", explique Manuel Valls.

"La Corse, c'est différent"

En Corse, les nationalistes ont remporté les élections régionales avec 56% des voix. "La Corse, c’est différent", ses dirigeants sont "autonomistes, pas indépendantistes", "ils n’ont pas un agenda indépendantiste", insiste Manuel Valls. Même s'il estime que cela n'a rien à voir avec ce qui se passe en Espagne, Manuel Valls rappelle que "toucher aux frontières en Europe, c’est dangereux". 

L’histoire est tragique et que le pire peut se reproduire si nous ne sommes pas attentifs à ce qui se passe.

Manuel Valls

franceinfo

Invité à réagir sur la circulaire du ministère de l'Intérieur du 12 décembre sur le contrôle des migrants dans les centres d’hébergement, très critiquée par des associations humanitaires et des élus, Manuel Valls accorde son soutien au gouvernement. "Je ne comprends pas pourquoi les associations n'acceptent pas pleinement ce débat. Je soutiens pleinement Gérard Collomb parce que je connais la difficulté de l'exercice", a-t-il réagi. "Pour faire vivre le droit d’asile, insiste-t-il, il faut pleinement distinguer ceux qui ont le droit à l’asile, ceux qui sont déboutés du droit d'asile et qui seront normalement renvoyés dans leurs pays et distinguer l'asile de l’immigration économique."

Cette circulaire et le recensement des migrants qui en découle est, à ses yeux, une manière de "faire le travail indispensable pour faire cette distinction, [entre le droit d’asile et l’immigration économique]", pas pour trier, et pour ensuite pour "accélérer les procédures." Il appelle donc au maintien de la circulaire. "Il faut, là aussi, de l’autorité de l’Etat et je trouve que Gérard Collomb l’incarne bien", a-t-il conclu.

En matière d'immigration, les propos de Gérard Collomb et de Nicolas Sarkozy sont assez similaires. Une situation assez logique pour Manuel Valls. "Il y a forcément une continuité. Il s’agit de faire vivre le droit d’asile. Après, il y a des choix qui peuvent être différents."

Rokhaya Diallo, un "mauvais choix"

L'ancien Premier ministre est ensuite revenu sur la polémique autour de l'éviction de la militance antiraciste Rokhaya Diallo, du Conseil national du numérique (CNNum). "Elle parle de racisme d’Etat, c’est-à-dire que l’Etat français, la police, l’administration seraient intrinsèquement racistes, ça c’est insupportable", a-t-il déclaré. "Le choix qui avait été fait" concernant Rokhaya Diallo "était un mauvais choix et à partir de ce moment-là, il y a cette crise qui s'est posée à ce Conseil, mais je pense que chacun d'entre vous s'en remettra." Mercredi sur franceinfo, Rokhaya Diallo avait expliqué son éviction par le fait que "le gouvernement a cédé à une pression qui émanait d'une part de la fachosphère, et d'autre part, d'une frange de la sphère politique qui est assez hostile aux positions que je défends, notamment sur les questions de racisme."

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