Nicolas Sarkozy président de l'UMP : pourquoi c'est une mauvaise nouvelle pour le parti
L'ancien chef de l'Etat a remporté l'élection à la présidence de l'UMP. Francetv info vous explique pourquoi sa victoire est une mauvaise chose pour sa famille politique.
Fin de partie. Comme prévu, Nicolas Sarkozy est parvenu à s'emparer de la présidence de l'UMP, samedi 29 novembre. Les militants ont décidé d'accorder leur confiance à l'ancien président, plutôt qu'à Bruno Le Maire ou Hervé Mariton. Mais Nicolas Sarkozy dans le fauteuil du président de l'UMP, est-ce vraiment le meilleur des scénarios pour la droite ? Francetv info vous démontre que l'UMP n'a peut-être pas fait le bon choix.
Sarkozyste convaincu, vous n'êtes pas d'accord avec cette analyse ? Pas de problème : comme un peu de mauvaise foi n'a jamais fait de mal à personne, nous vous expliquons dans un autre article pourquoi Nicolas Sarkozy président de l'UMP, c'est une bonne nouvelle pour le parti.
Il ne fera pas l'unanimité dans son camp
Le messie n'a pas fait de miracles. A l'annonce de son retour, les soutiens de Nicolas Sarkozy annonçaient un vaste rassemblement derrière leur champion. Mais le scénario était trop beau. L'ancien président a rencontré l'hostilité d'un nombre conséquent d'élus. Une centaine de parlementaires UMP ont rejoint le camp de Bruno Le Maire ou d'Hervé Mariton dans la bataille pour l'UMP.
Au risque de passer pour des ingrats, certains n'hésitent plus à dire ouvertement du mal de l'ancien chef. Répliquant à une attaque de son ancien leader, son ancien ministre de la Santé Xavier Bertrand lâche froidement : "Qui est-ce qu'il aime, à part lui ?" C'est un fait, Nicolas Sarkozy ne fait plus peur à ses anciens disciples.
Plus grave encore, ses propres troupes osent désormais contredire le chef. "Il y a quand même un problème d'autorité quand je vois ses soutiens exprimer leurs désaccords après le meeting de Sens commun [pendant lequel Nicolas Sarkozy a exprimé sa volonté d'abroger la loi Taubira]", souligne le député Franck Riester, soutien de Bruno Le Maire. Le candidat Sarkozy a promis de rassembler sa famille en mettant fin aux courants et aux chapelles au sein de son parti, mais il reste toujours aussi clivant. "Il prétend dépasser les clivages tout en tenant des discours très à droite", n'a pas manqué de critiquer son rival Hervé Mariton pendant sa campagne.
Il va s'engager dans une guerre des chefs
Nicolas Sarkozy se rêvait en homme providentiel, il reste pour l'instant un chef de clan. Prendre du recul peut s'avérer salutaire dans une carrière politique, mais dans le cas de Nicolas Sarkozy, ses deux ans d'absence ont obligé la droite à se débrouiller sans lui. Ses concurrents se sont organisés et les ambitions ont émergé. L'ancien président doit désormais composer avec François Fillon, Alain Juppé ou même Xavier Bertrand, tous candidats à la primaire 2016, l'élection qui doit désigner le candidat de droite pour la présidentielle de 2017.
"Je ne crois pas au rassemblement derrière lui, on aura la guerre des chefs et l'UMP sera incapable de parler d'une seule voix", prédit ainsi Franck Riester. Une bataille des egos qui menace l'unité de la droite républicaine, selon Jean Petaux, politologue à Sciences Po Bordeaux : "Il ne faut pas exclure un nouvel affrontement fratricide entre deux leaders de l’UMP. Il est possible que la violence soit telle que la situation ne soit pas récupérable." Les souvenirs de la guerre Chirac-Balladur en 1995 restent dans les mémoires de droite. Une telle division face à un Front national en pleine ascension pourrait priver la droite républicaine de second tour.
Le risque de dissensions est d'autant plus fort que le projet de Nicolas Sarkozy pour l'UMP agace certains barons de sa formation. Bruno Le Maire s'oppose catégoriquement au changement de nom du parti, tout comme il rejette l'idée d'une fusion avec l'UDI. "Nicolas Sarkozy doit comprendre qu'il n’est plus le patron incontesté et que s'il tombe dans la dérive d'un pouvoir fort, ça ne passera pas auprès des autres ténors de l'UMP", prévient Jean Petaux.
Il ne sera pas concentré sur le parti
Hervé Mariton et Bruno Le Maire ont tous deux axé leur campagne sur cet argument. Selon eux, Nicolas Sarkozy ne peut pas être un bon président de parti en étant focalisé sur 2017. Difficile effectivement de développer un nouveau projet pour la France tout en s'occupant de la refondation du parti.
"On va se retrouver avec un président de l'UMP ancien président de la République et candidat à la primaire, donc avec une gestion de l'opposition assez difficile", s'inquiète le député juppéiste Benoist Apparu. Concentré sur les primaires de 2016, Nicolas Sarkozy risque de peiner à remettre les mains dans le cambouis de la politique de parti. Difficile, par exemple, de l'imaginer une fois par semaine sur les plateaux des chaînes d'information en continu pour assumer son rôle de chef de l'opposition.
Il pourrait faire perdre la droite
Nicolas Sarkozy serait-il devenu un "loser" ? Pour beaucoup, la défaite de 2012 n'est pas encore digérée. "J’entends beaucoup dire qu'il reste une bête politique, qu'il est incontestable, mais je rappelle qu'on a perdu sur fond d’antisarkozysme en 2012", taclait le député UMP Thierry Lazaro au moment du retour de l'ancien président.
Considéré comme l'homme de la défaite, Nicolas Sarkozy est aussi empêtré dans les affaires judiciaires. Le danger vient surtout de l'affaire des écoutes, dans laquelle l'ancien pensionnaire de l'Elysée a été mis en examen pour corruption active, trafic d'influence actif et recel de violation du secret professionnel.
Usé, Nicolas Sarkozy ? Lui qui avait su imposer une image de modernité politique n'a pas réussi, pendant sa campagne pour la présidence de l'UMP, à se renouveler. "On a assisté à un remake de 2004, de 2007 ou de 2012, c'est le même acteur, le même filon, la même mise en scène un peu vieillotte", regrette le député Franck Riester.
L'ancien champion de la droite n'a pas non plus brillé par la nouveauté de ses idées, ni par la constance de son discours. Il a donné l'impression d'adapter ses propositions en fonction de son auditoire. Très à droite à Nice, il s'est montré plus centriste dans l'Aube, par exemple. "Son côté versatile est frappant. Au meeting de Sens commun, il a peut-être cédé un peu vite devant la foule, ce qui n'est jamais très bon pour l'éthique de conviction", analyse Jean Petaux.
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