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Sarkozy endosse l'habit de "gestionnaire responsable"

Nicolas Sarkozy a adressé mardi à tous les parlementaires une lettre dans laquelle il leur demande de dépasser les "intérêts partisans" au nom de l'équilibre des finances publiques
Article rédigé par Catherine Rougerie
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Nicolas Sarkozy, à Beaume-de-Venise, le 28 juillet 2011. (AFP - Eric Feferberg)

Nicolas Sarkozy a adressé mardi à tous les parlementaires une lettre dans laquelle il leur demande de dépasser les "intérêts partisans" au nom de l'équilibre des finances publiques

Convoquera ? Ne convoquera pas ? Officiellement, le Président n'a pas tranché. Il hésite à convoquer le Congrès pour tenter de faire inscrire dans la Constitution une "règle d 'or" qui impose l'équilibre des comptes des finances publiques ". La majorité des 3/5èmes, requise au Congrès, est en effet loin d'être assurée, le parti socialiste ayant déjà fait savoir qu'il s'opposait à une telle mesure.

Or à 10 mois de l'élection présidentielle et alors qu'il enregistre une embellie dans les sondages, le rejet de la mesure casserait la dynamique dont bénéficie le chef de l'Etat depuis plusieurs semaines.

Pourquoi alors lancer une telle proposition ?

Gêner les socialistes et rassurer les marchés
Plus que jamais en campagne, le Président cherche à affaiblir les socialistes et les mettre face à leurs contradictions. Le projet du PS prévoit en effet le rétablissement des comptes publics et les deux favoris des sondages pour la primaire, François Hollande et Martine Aubry, se sont prononcés pour réduire le déficit à 3 % dès 2013. Expliquer aux électeurs les raisons d'un vote négatif, devient dès lors plus délicat.

En plein tourmente économique, une telle annonce vise aussi à rassurer les marchés financiers.

Pour autant, cette proposition est-elle bien réaliste ?

"Cela n'a aucune justification sur le plan économique", répond Henri Sterdyniak, chercheur à l'Observatoire Français des Conjonctures économiques. D'une part, et selon "la règle d'or des finances publiques" telle qu'énoncée par Paul-Leroy-Beaulieu dans son traité de la science des finances en 1891, "il est légitime de financer les investissements publics par l'emprunt". Selon ce point de vue, c'est le budget de fonctionnement des administrations publiques qui doit être en équilibre.

Par ailleurs, "un certain niveau de dette publique est nécessaire : les institutions financières (assurances, fonds de pension), les banques centrales et certains ménages, veulent détenir des actifs financiers sans risque, que seuls les Etats peuvent émettre", ajoute encore l'économiste.

Autre argument, "on ne peut pas demander à un gouvernement de prendre des engagements sans tenir compte des événements futurs". "C'est complètement utopique", souligne le spécialiste. Comment imposer aux gouvernements futurs de se fixer un objectif d'équilibre du solde public alors que celui-ci repose sur une croissance potentielle, dont découlent recettes et dépenses?.

"On a l'exemple du pacte de stabilité et de croissance (PSC)" (impose aux États de la zone euro de limiter leur déficit budgétaire en-dessous de la barre des 3%., ndlr) "qu'on n'a pas respecté depuis 1999", souligne M. Sterdyniak. "Faut-il ajouter d'autres règles contraignantes?", s'interroge-t-il.

Cliver le débat

Répondant à la porte-parole du gouvernement, Valérie Pécresse, qui a comparé mercredi Nicolas Sarkozy à Barack Obama, le premier secrétaire par intérim du PS n'a pas mâché ses mots évoquant une "publicité mensongère". "La seule comparaison possible, c'est qu'il y a un déficit aussi abyssal en France qu'aux États-Unis", a déclaré Harlem Désir. Mais "la différence, c'est qu'en France c'est le président de la République qui refuse de mettre à contribution les hauts revenus pour faire face à la crise".

Autre citrique émise, le maintien de la TVA à 5,5% dans la restauration, une confirmation que le Président a faite en personne mardi aux professionnels du tourisme lors d'un déplacement à Agde (Hérault). Or "C'est l'une des niches fiscales les plus coûteuses", soulignent les opposants du chef de l'Etat qui voit là comme une contradiction entre les différentes annonces.

C'est un mauvais procès rétorque la majorité qui fait bloc derrière le Président et soutien l'idée d'une "règle d'or". "Ce calendrier est une déclinaison de la crise, ce n'est pas un choix tactique du président de la République, ce n'est pas une malice du gouvernement (...) c'est une conséquence de la crise, a expliqué mercredi le ministre de l'Économie, François Baroin sur France 2. "L'affaire grecque a changé la donne en Europe. Tous les pays européens ont dit qu'ils allaient se doter d'une règle stricte de retour à l'équilibre budgétaire", a renchéri Valérie Pécresse.

Même l'ancien Premier ministre Dominique de Villepin a jugé que l'idée d'une règle d 'or constitutionnelle sur les déficits était bonne. "Il faut saluer la décision du chef de l'Etat et il faut le prendre au mot : le grand bénéficiaire, ce sera la France (...), a-t-il déclaré mercredi sur France inter.

"L'intérêt national c'est que, pour l'avenir, cette règle soit appliquée", a-t-il encore dit.

Passer des paroles aux actes. C'est bien là, tout le problème.

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