Remaniement : le rattachement des Outre-mer au ministère de l'Intérieur est "un recul évident", dénonce l'ancien ministre des Outre-mer, Victorin Lurel
"Le signal envoyé est très mauvais", réagit le sénateur socialiste Victorin Lurel, lundi sur franceinfo, après l'annonce du passage du ministère des Outre-mer dans le giron du ministère de l'Intérieur, au sein du gouvernement Borne 2.
L'ancien ministre des Outre-mer, de 2012 à 2014, et sénateur PS de Guadeloupe, Victorin Lurel, dénonce lundi 4 juillet sur franceinfo, "un recul évident", "une punition" pour les territoires ultramarins après leur rattachement au ministère de l'Intérieur.
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franceinfo : La disparition d'un ministère dédié aux Outre-mer, est-ce une sanction ?
Victorin Lurel : Manifestement c'est une régression. Le ministère des Outre-mer était un ministère d'État avec le général de Gaulle. On s'est tous battus pendant des années pour obtenir un ministère de plein exercice participant au Conseil des ministres. Là, il s'agit d'un recul évident. Mais ça prend l'allure d'une sanction punitive, d'une punition électorale après la raclée électorale infligée au premier et au deuxième tour. Reléguer le ministère à un ministre délégué, cela veut dire que c'est d'abord l'ordre qui va prévaloir et pour le reste, on avisera. Finalement, ce n'est plus le développement, ce n'est plus l'égalité, ce n'est plus l'écoute. C'est d'abord l'ordre. Rien ne peut justifier ce recul. Dire que l'on va dépendre du ministère de l'intérieur, cela veut dire que l'on va nous envoyer le GIGN ou le RAID au moindre mouvement social. Chaque mouvement sera d'abord traité sous le prisme de la répression. Le signal envoyé est très très mauvais. Le président n'a pas tiré les leçons de l'électrochoc électoral et en guise de réponse, il nous fait dépendre du ministère de l'Intérieur qui est celui de la sécurité et de l'ordre d'abord.
D'abord l'ordre selon vous, cela veut-il dire que l'on met de côté tous les autres problèmes comme la santé, le pouvoir d'achat, l'éducation ?
C'est en tout cas le premier signal que retiennent les ultramarins. En guise de réponse à un désaveu cinglant, vous êtes réintégrés au sein du ministère de l'Intérieur. Depuis Nicolas Sarkozy, on n'avait plus fait ça. Ainsi, on revient au statu quo ante, avec probablement une sorte de mépris affiché. Je le dis très clairement, c'est un mauvais signal qui nous est envoyé.
Que pensez-vous de l'arrivée de l'ancien préfet Jean-François Carenco en tant que ministre délégué des Outre-mer ?
Nous connaissons très bien Jean-François Carenco. Il a été préfet de la Guadeloupe, il a entretenu de très bons rapports avec les uns et les autres. Il a su entretenir le dialogue. Même lorsqu'il était président de la Commission de régulation de l'énergie, il a gardé des rapports avec les Outre-mer. Il connaît les problématiques, il connaît les hommes, il connaît les dossiers, il connaît les territoires. Il a été aussi préfet de Saint-Pierre-et-Miquelon. Donc là, il n'y a pas de souci sur l'homme, il sera bien accueilli. Personne ne peut contester sa qualité et son expérience.
Cette nomination de Jean-François Carenco est donc une bonne nouvelle pour les Outre-mer ?
Vous savez, lorsque vous êtes ministre des Outre-mer, si vous n'avez pas l'oreille du président de la République et du Premier ministre vous pouvez être un ministre "rabougri". Si Monsieur Darmanin fait tout et arbitre en dernière instance, quelles que soient les qualités intrinsèques de Jean-François Carenco, on risque d'avoir quelques soucis, en termes de marges de manœuvre, en termes de rattrapage budgétaire et financier, en termes de considération accordée à ces territoires éloignés. Il est certain que ce n'est pas un bon signal.
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