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50 milliards d'euros d'économies : y a-t-il une erreur dans l'addition ?

Depuis six mois, le gouvernement martèle ce chiffre. Une partie de la gauche le juge excessif, d'autres estiment que les économies nécessaires sont sous-estimées.

Article rédigé par Camille Caldini
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Le Premier ministre, Manuel Valls, et le ministre des Finances, Michel Sapin, lors d'un point presse à l'Elysée, le 16 avril 2014. (PHILIPPE WOJAZER / AFP)

Le gouvernement veut assainir les comptes sans augmenter encore les impôts. Le Premier ministre, Manuel Valls, veut donc trouver 50 milliards d'euros d'ici 2017 et réduire le déficit public à moins de 3% du PIB d'ici 2015, en freinant les dépenses de l'Etat. Le gouvernement a de nouveau promis de rentrer dans les clous, mercredi 23 avril. Mais les 50 milliards promis et brandis comme objectif pour 2017 sont-ils vraiment nécessaires ? Si oui, sont-ils suffisants ?

Francetv info reprend l'addition à trous de Manuel Valls.

50 milliards, 50 milliards, 50 milliards

Ce nombre rond, facile à retenir, est devenu une obsession. Mais d'où vient-il exactement ? François Hollande avait promis, pendant sa campagne, de ramener le déficit public sous les 3% du PIB, comme l'exige Bruxelles. Objectif non tenu, plusieurs fois repoussé, comme l'explique luiprésident.fr. En décembre 2013, Jean-Marc Ayrault, encore Premier ministre, invité de RTL, chiffre les économies nécessaires à 50 milliards d'euros d'ici 2017, dernier carat.

La mission revient à son successeur, Manuel Valls. L'équation du nouveau Premier ministre semble simple : l'Etat devra économiser 18 milliards, les collectivités locales 11 milliards, l'assurance-maladie 10 milliards et la gestion du système social 10 milliards. On arrive ainsi à 49. Seulement 17 milliards ont été détaillés, selon les calculs de L'Expansion.

Reste à atteindre l'objectif. Ce plan repose sur une perspective de croissance que le président de la Cour des comptes, Didier Migaud, juge trop optimiste : 1,7% en 2015 et 2% en 2016 et 2017. Ces hypothèses sont elles-mêmes calculées avec l'espoir que le pacte de responsabilité, qui comprend des allègements de cotisations patronales et des mesures fiscales, permette de "majorer la croissance de 0,5%" entre 2014 et 2017.

Faut-il pousser le curseur à 80 ou 90 milliards ?

Entre l'annonce de Jean-Marc Ayrault et les calculs de Manuel Valls, sur la base de 50 milliards, François Hollande a promis le pacte de responsabilité et de solidarité, en janvier 2014. Destiné à relancer l'emploi, le pacte de responsabilité doit coûter autour de 20 milliards d'euros, qui viennent s'additionner aux 50 milliards d'euros d'économies promis. "A cela s'ajoutent les 2,5 milliards pour le pacte de solidarité et 8,5 milliards d'allègements fiscaux pour les entreprises", précisait l'économiste Eric Heyer, sur francetv info, début avril. Soit un total théorique de 81 milliards d'euros. Le magazine Challenges arrive même à plus de 90 milliards d'économies nécessaires, en rappelant que les dépenses de l'Etat augmentent mécaniquement chaque année, en raison du vieillissement de la population et malgré le gel de certaines prestations sociales.

L'exécutif refuse de lâcher ce qui est devenu son chiffre fétiche. "Je ne veux pas casser la croissance, sinon nos déficits ne diminueront pas et le chômage ne sera pas réduit", a justifié Manuel Valls, dans son discours de politique générale.

Et si, finalement, 35 milliards d'économies suffisaient ?

Pour l'aile gauche du PS, l'objectif des 50 milliards, en l'état, n'est ni tenable ni crédible. Des députés socialistes proposent d'abaisser l'objectif à 35 milliards d'euros. "Au-delà, nous croyons que reculs sociaux et mise à mal des services publics sont inéluctables", justifient les parlementaires. Ils rejettent donc le gel des prestations sociales et l'effort de 11 milliards d'euros demandé aux collectivités locales. Ils prônent en revanche "un effort supplémentaire" de 5 milliards d'euros en faveur du pouvoir d'achat.

Comment financer tout cela ? Selon eux, "l'objectif de passer sous la barre des 3% pourrait être maintenu mais décalé dans le temps". Un nouveau report donc, que le gouvernement préfère éviter, pour ne pas froisser Bruxelles. Serait-il néanmoins encore possible de gagner un peu de temps ? Paris, qui n'a plus tenu l'objectif des 3% depuis 2007, n'a encore jamais été sanctionné, malgré de nombreuses mises en garde.

Mais les récents échanges entre l'exécutif français et la Commission européenne laissent penser qu'un nouveau délai est hors de propos. Le ministre des Finances, Michel Sapin, a renoncé à le réclamer, et l'UE comme le FMI surveillent Bercy.

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