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POINT DE VUE. Pourquoi EELV, le PS et Génération.s doivent s'unir pour les européennes

Proximité européenne, politique, idéologique, sociologique... Pour Gilles Finchelstein, directeur général de la Fondation Jean-Jaurès, rien ne justifie la désunion des socialistes et des écologistes en vue du scrutin du 26 mai.

Article rédigé par franceinfo - Gilles Finchelstein, directeur général de la Fondation Jean-Jaurès
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Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4 min
Les leaders d'EELV, Yannick Jadot, du PS, Olivier Faure, et de Génération.s, Benoît Hamon. (AFP)

Qu'est-ce qui justifie qu'Europe Ecologie-Les Verts, le Parti socialiste et le mouvement Génération.s de Benoît Hamon abordent les élections européennes du 26 mai plus désunis que jamais ? Pour Gilles Finchelstein, directeur général de la Fondation Jean-Jaurès, la réponse semble claire : rien, à l'exception des postures politiciennes des responsables de ces trois partis de gauche. Dans un point de vue publié sur franceinfo, il donne ainsi raison à l'essayiste Raphaël Glucksmann, qui plaide depuis des mois en faveur d'une union des gauches. Il s'exprime ici librement.


Raphaël Glucksmann a-t-il raison ?

Chacun peut répondre à cette question avec ses convictions. Je suis convaincu que, pour son équilibre, la démocratie française aurait bien besoin d'une gauche de gouvernement plus vaillante. Je suis convaincu par ailleurs que, divisées, les gauches courent le risque de voir leur visibilité proche de zéro – sans parler de celui de voir leur représentation égale à zéro. Je suis convaincu enfin que le rassemblement est possible sur le fond, il suffit simplement de le vouloir – les divergences sont à l'évidence moins fortes que celles qui pouvaient exister sur l'Europe entre le RPR et l'UDF dans les années 1990 ou sur à peu près tout entre le PS et le PC dans les années 1970, et qui n'ont empêché ni une liste commune aux européennes pour les uns, ni un programme commun pour les autres.

Mais l'enquête réalisée par Ipsos pour la Fondation Jean-Jaurès, le Cevipof et Le Monde permet d'aller au-delà des convictions de chacun. Parce qu'elle s'appuie sur un échantillon sans précédent – un panel de 10 000 électeurs et non pas de 1 000 comme dans une enquête traditionnelle –, elle apporte des éléments de réponse à une question simple : les électorats du Parti socialiste, de Génération.s et de Europe Ecologie-Les Verts (EELV) sont-ils proches ou éloignés ?

La réponse est claire, nette et positive : les électorats du PS, de Génération.s et de EELV sont très proches les uns des autres. Dit autrement : Raphaël Glucksmann a raison ! Démonstration.

1) Il y a d'abord une proximité européenne

Les trois électorats disent déterminer leur vote le 29 mai prochain en fonction des questions européennes plutôt que des questions nationales – de 60% à 75% quand, en moyenne, seuls 42% des Français partagent cette opinion.

Plus significatif, les trois électorats partagent le même sentiment pro-européen. A la question de savoir quels seraient leurs sentiments si le projet européen était abandonné, ils répondent, de 74% à 84%, de "vifs regrets" – quand la moyenne des Français s'établit à 50%. Plus significatif encore, les trois électorats sont pro-européens réformistes, c'est-à-dire qu'ils sont, de 64% à 74%, et donc davantage encore que la moyenne des Français, favorables au projet européen "mais pas tel qu'il est mis en place".

2) Il y a, ensuite, une proximité politique

D'une part, les trois électorats sont dans une distance par rapport au mouvement des "gilets jaunes" : ils ne sont ni dans le soutien ni dans le rejet, mais dans une distance à peu près identique – de 41% à 46%.

D'autre part, les trois électorats sont dans la critique par rapport à l'action du président de la République – ils ne sont que de 6% à 13% à en être satisfaits.

3) Il y a, enfin, une proximité idéologique

Invités à positionner le président de la République sur une échelle gauche-droite (0 indiquant très à gauche et 10 très à droite), les trois électorats le classent à peu près au même endroit – entre 7 et 7,3, plus à droite encore que ne le font en moyenne des Français (6,5).

Mieux, invités à se positionner eux-mêmes sur cette échelle gauche-droite, les trois électorats se positionnent dans l'espace traditionnel de la gauche de gouvernement : entre 3,6 et 4,2.

Proximité européenne, proximité politique, proximité idéologique, les trois électorats sont sans doute plus similaires que ce que l'on aurait pu penser.

Gilles Finchelstein, directeur général de la Fondation Jean-Jaurès

Restent, malgré tout deux questions.

a) Sont-ils également proches d'un point de vue sociologique ? La réponse, une nouvelle fois, est largement positive. A l'exception de leur âge – l'électorat du PS étant un peu plus âgé –, ces trois électorats sont plus féminins et plus diplômés que la moyenne, davantage issus de la fonction publique et des professions intermédiaires.

b) Sont-ils différents des électorats de LFI et de LREM ? La réponse est là encore largement positive. L'électorat de LFI est à la fois plus eurosceptique – près du tiers se dit "défavorable au projet européen", moins de la moitié éprouverait des regrets si le projet européen était abandonné – et plus proche des "gilets jaunes" – 68% le soutenant. L'électorat de LREM est plus euro-conservateur – 40% se disant favorable au projet européen "tel qu'il est" - et politiquement plus opposé aux "gilets jaunes" – 73% s'y opposant – et, évidemment, plus proches d'Emmanuel Macron – 65% se déclarant satisfait de son action.

Nul ne peut prédire avec certitude quels seraient les effets électoraux d'un tel rassemblement. Est-ce que 5 + 5 + 8 = 18 ? 15 ? 20 ? Tout serait affaire de dynamique politique.

Gilles Finchelstein, directeur général de la Fondation Jean-Jaurès

Ce qui est certain en revanche, c'est que les conditions de réussite d'un tel rassemblement sont réunies si l'on s'attache à ce qu'ils pensent sur le fond.

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