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Parrainage d'élus : le FN peut-il faire aboutir son recours au Conseil d'Etat ?

La vice-présidente du FN, Marie-Christine Arnautu, va déposer un recours et une question prioritaire de constitutionnalité aujourd'hui contre la règle des 500 parrainages. Explications.

Article rédigé par franceinfo
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La vice-présidente du Front national, Marie-Christine Arnautu, le 16 juin 2011, à Paris. (LIONEL BONAVENTURE / AFP)
La vice-présidente du Front national, Marie-Christine Arnautu, a annoncé jeudi 22 décembre qu'elle déposerait dans l'après-midi un recours au Conseil d'Etat afin de contester la constitutionnalité de la règle des 500 signatures d'élus nécessaires pour se présenter à l'élection présidentielle.

• Sur quoi porte exactement le recours ?

"Initialement, les parrainages ne sont que des actes administratifs, mais aujourd'hui, ils sont assimilés à un soutien"
, a déclaré Marie-Christine Arnautu à L'Express.
Elle a déposé dans l'après-midi un recours en Conseil d'Etat pour "excès de pouvoir", ainsi qu'une question prioritaire de constitutionnalité (QPC).
 
La QPC porte, d'une part, sur les "graves dérives de la loi organique 76-528 du 18 juin 1976 (qui exige 500 parrainages pour valider une candidature à la présidentielle), qui s'est départie de son côté apolitique", indique Marie-Christine Arnautu, puisqu'elle estime qu'aujourd'hui, les parrainages sont devenus des "soutiens politiques" ; et d'autre part sur les "pressions" que subissent les maires, notamment dans les petites communes rurales.

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Pourquoi ne pas l'avoir déposé avant ?

Parce que cette démarche ne peut être recevable sans l'introduction préalable d'un contentieux, explique Didier Maus, professeur de droit constitutionnel.

Or, en novembre, Marine Le Pen a écrit une lettre (PDF) au Premier ministre François Fillon, lui demandant l'anonymat des élus qui parrainent un candidat à la présidentielle. Marine Le Pen, qui peine à rassembler les 500 signatures nécessaires pour se présenter à l'élection, affirme que la publication des parrainages dissuade les maires de donner leur soutien au Front national.

Dans sa lettre, la candidate demande l'abrogation de l'article 7 du décret du 8 mars 2001, portant application de la loi organique de 1962 sur l'élection du président de la République au suffrage universel, qu'elle considère "inconstitutionnel". Selon elle, la publicité des parrainages crée "une rupture d'égalité entre les candidats".

Or, le Premier ministre a rejeté le 28 novembre la demande de Marine Le Pen, invoquant une "exigence de transparence" et affirmant que les élus doivent assumer "pleinement (leur) responsabilité en rendant leur décision publique".

Il rappelle par ailleurs à la candidate qu'une disposition "organique" ne peut être modifiée ou abrogée que par un vote du Parlement, et non par lui en sa qualité de Premier ministre. Ainsi, en contestant aujourd'hui le refus de François Fillon, Marine Le Pen crée ce contentieux qui mène au dépôt de la question prioritaire de constitutionnalité.

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La requête a-t-elle des chances d'aboutir ?

Si le Conseil d'Etat pourrait décider de saisir le Conseil constitutionnel sur le sujet, comme le fait remarquer Didier Maus, il est "impossible de soulever une question prioritaire de constitutionnalité contre des dispositions validées par le Conseil constitutionnel". Sauf "en cas de changement de circonstances, mais il faudrait prouver que ce qui était constitutionnel hier ne l'est plus aujourd'hui".
 
Mais, tel que le rapporte Sénat.fr, "le Conseil constitutionnel suggère la diffusion sur son site Internet de tous les (parrainages)" au lieu des 500 tirés au sort et publiés dans le Journal Officiel. En outre, depuis 1988, le Conseil constitutionnel affiche, dans ses locaux parisiens, tous les noms des parrains de chaque candidat pendant quatre jours.
 
Difficile donc d'imaginer que le recours du Front national ne reste pas lettre morte. "C'est une opération politiquement intéressante, mais juridiquement très peu fondée", estime Didier Maus.

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