Nouveau Premier ministre : comment la classe politique réagit à l'hypothèse d'un gouvernement Lucie Castets sans LFI, évoquée par Jean-Luc Mélenchon

Le leader de La France insoumise a demandé au camp présidentiel et à la droite s'ils renonceraient à censurer un gouvernement du NFP dont son parti serait absent. Une hypothèse rapidement rejetée par de nombreuses personnalités de l'ancienne majorité.
Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Le leader de La France insoumise, Jean-Luc Mélenchon, aux journées d'été du parti à Châteauneuf-sur-Isère (Drôme), le 24 août 2024. (LAETITIA NOTARIANNI / HANS LUCAS / AFP)

Un coup de poker pour tenter de relancer les chances du Nouveau Front populaire d'accéder à Matignon. Devant les menaces de censure immédiate agitées par le camp présidentiel et la droite si La France insoumise devait entrer au gouvernement, Jean-Luc Mélenchon a émis l'hypothèse, samedi 24 août, de laisser Lucie Castets composer un exécutif sans ministres issus de son parti.

"Le gouvernement de Lucie Castets, s'il ne comportait aucun ministre insoumis, est-ce que vous vous engagez à ne pas voter la censure et à lui permettre d'appliquer le programme pour lequel nous sommes arrivés en tête des élections législatives ?", a interrogé Jean-Luc Mélenchon sur TF1, s'adressant "aux chefs des trois partis macronistes et de la droite". "Si vous nous répondez non, on dira que les ministres insoumis, en fait, c'est un prétexte : c'est du programme dont vous ne voulez pas", a résumé le leader du mouvement de gauche radicale.

Une stratégie jugée "habile" par le reste de la gauche

Alors que les consultations se poursuivent lundi à l'Elysée en vue de nommer un Premier ministre, ce coup politique a été unanimement applaudi au sein du Nouveau Front populaire. "La déclaration de Jean-Luc Mélenchon met le camp Macron face à ses responsabilités", a réagi dimanche la cheffe de file des écologistes, Marine Tondelier, auprès de l'AFP. "C'est une stratégie de la part de La France insoumise qui est habile, parce que ça permet de voir que le problème ce ne sont pas les ministres insoumis, mais bien la ligne défendue par le Nouveau Front populaire", a de son côté souligné lundi sur TF1 la députée écologiste Sandrine Rousseau, qui ne se dit cependant "pas fan d'un gouvernement où on fermerait la porte aux ministres LFI".

Avec cette proposition, "le prétexte qui jusqu'ici servait à refuser la nomination de Lucie Castets est levé, et donc je ne vois pas d'obstacle désormais", a abondé sur franceinfo le patron des socialistes, Olivier Faure. "J'attends que le président de la République clarifie sa position, la balle est dans son camp", a appuyé le secrétaire national des communistes, Fabien Roussel, sur France Bleu Hérault.

Au sein de La France insoumise, Eric Coquerel vante une proposition de Jean-Luc Mélenchon qui place "les intérêts de LFI au second plan et les intérêts du pays au premier plan avec l'application du programme". Le député craint toutefois que "la présence ou pas de ministres LFI au sein du gouvernement" ne soit "qu'un prétexte" pour justifier une motion de censure. "Aux membres du gouvernement, de l'exécutif et du camp présidentiel de nous prouver l'inverse", conclut l'élu sur franceinfo. "Une question a été posée au camp présidentiel" et "nous attendons toujours la réponse", s'est pour sa part impatientée la principale intéressée, Lucie Castets, dimanche soir.

Le camp présidentiel dit rejeter un programme autant qu'un parti 

Pour l'heure, ni l'Elysée ni Gabriel Attal, chef du groupe parlementaire du parti présidentiel à l'Assemblée, n'ont commenté cette sortie politique. Une poignée d'élus ont cependant exprimé leur opposition à tout gouvernement du Nouveau Front populaire. "Un gouvernement qui appliquerait le programme complet du NFP serait un gouvernement qui matraquerait fiscalement les Français, qui ferait exploser la dépense publique et qui bafouerait notre laïcité", a fustigé le député Ensemble pour la République (ex-Renaissance) Mathieu Lefèvre. "Contre un tel gouvernement, avec ou sans LFI, je voterais la censure", tranche-t-il sur X.

"Ce n'est pas parce que La France insoumise ne sera pas dans le poulailler que Jean-Luc Mélenchon ne sera pas à la plume ! Ça ne change strictement rien", acquiesce un autre membre du groupe, Karl Olive, sur ce même réseau social. Son homologue Jean-René Cazeneuve va encore plus loin : "Pas de ministre LFI, pas de propositions LFI dans le programme et plus de LFI à [l'Assemblée nationale]. Là, oui, on commence à être bien", écrit le député du Gers sur X.

Chez les alliés du parti présidentiel aussi, l'idée a été rapidement balayée. "C'est une blague et il est parfaitement conscient du tour de passe-passe qu'il essaie de faire", a estimé dimanche François Bayrou sur LCI. Le patron du MoDem a expliqué que son "opposition à la formation d'un gouvernement autour de LFI" n'était pas liée à "des questions d'étiquette, de personnalité, ni même de style", mais "principalement" due au programme du NFP.

"C'est un programme dangereux pour le pays", car il contient "des choses extrêmement lourdes" notamment en matière de dépenses publiques et d'immigration, a insisté François Bayrou.

Même son de cloche du chef des députés Horizons, Laurent Marcangeli, qui affirme que le programme du NFP, "s'il était appliqué, provoquerait une crise". Par conséquent, "nous nous y opposerons avec tous les instruments que la Constitution nous offre", ce qui pourrait "passer par le vote d'une motion de censure", prévient-il dans un entretien au Figaro.

La droite promet de faire "barrage à LFI"

Depuis la Haute-Loire, où il effectuait sa rentrée politique dimanche, Laurent Wauquiez a pour sa part estimé que la formation de Jean-Luc Mélenchon était "sans doute le plus grand danger politique pour notre pays". "C'est notre responsabilité et nous l'assumerons : nous ferons barrage à LFI", a clamé le patron des députés La Droite républicaine, nouveau nom des LR n'ayant pas suivi Eric Ciotti dans son soutien au RN. Il n'a pas précisé, toutefois, s'il censurerait ou non un gouvernement du NFP sans ministre LFI.

"Pour nous, c'est non aux ministres LFI et non à un programme inspiré par LFI", a plus clairement évacué Bruno Retailleau, le patron des sénateurs de droite, dès samedi sur X. "Nous sommes opposés à leur participation à un gouvernement, comme à leurs idées".

Au sein du Rassemblement national, Sébastien Chenu affirme aussi qu'il ne s'agit pas d'"une question d'homme". "On censurera tout gouvernement qui est issu du Nouveau Front populaire et surtout qui applique le programme du Nouveau Front populaire", a assuré le vice-président du parti d'extrême droite lundi sur France 2. Jusqu'à présent, le RN, resté très discret sur sa stratégie politique ces derniers jours, faisait de la présence de LFI et des écologistes au gouvernement sa ligne rouge.

"L'idée d'un gouvernement du Nouveau Front populaire où il n'y aurait pas de ministre insoumis ne change strictement rien", a clarifié Marine Le Pen à la sortie de l'Elysée, où elle était reçue par Emmanuel Macron lundi matin. A ses yeux, "c'est La France insoumise et donc c'est Jean-Luc Mélenchon qui dirigera en réalité ce gouvernement", quelle que soit sa composition.

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