A Argenteuil, le gros coup de com' d'Alain Juppé
Contrairement à Nicolas Sarkozy en 2005, le candidat à la primaire n'a pas été chahuté, mercredi. Mais sa visite matinale n'a suscité que peu d'enthousiasme.
Il est venu, il a vu, il n'a rien reçu - ni projectiles, ni insultes. Le candidat à la primaire à droite Alain Juppé a réussi son pied de nez à Nicolas Sarkozy, mercredi 2 novembre, en s'offrant une visite tranquille sur la dalle d'Argenteuil (Val-d'Oise), là même où son rival avait été chahuté et pris pour cible en 2005.
A son arrivée au pied des tours, Alain Juppé assure qu'il est simplement venu "rencontrer les habitants" et que sa présence n'est due qu'à une "invitation" par le maire de la commune, Georges Mothron, qui lui a apporté son soutien en vue de la primaire la semaine précédente. Le nom de Nicolas Sarkozy est soigneusement évité, de même que toute référence aux propos polémiques de l'ancien ministre de l'Intérieur, il y a onze ans, sur ce quartier qu'il faudrait "débarrasser" de la "racaille".
Loin des micros, Boubacar Sabaly, animateur du comité local de soutien à Alain Juppé, concède que cette visite est "symbolique". "Nicolas Sarkozy a sali Argenteuil, on veut repasser derrière pour apporter une note positive, glisse ce conseiller municipal. C'est comme le discours de Dakar, c'est bien que d'autres reviennent derrière."
"Cette visite, il la fait pour lui, pas pour nous"
Sur l'Esplanade de l'Europe, l'artère commerçante du quartier, Alain Juppé joue la carte de la décontraction en sifflotant et multiplie les haltes à la médiathèque, à l'épicerie, au salon de coiffure... A chaque fois, pour lui permettre d'entrer dans les locaux, son équipe doit jouer des coudes face aux dizaines de journalistes couvrant la visite.
A la boulangerie, la patronne des lieux prend soin d'éviter au maximum le candidat et obtient ainsi son départ précipité. "Je n'avais rien à lui dire, explique-t-elle ensuite. Cette visite, il la fait pour lui, pour les sondages, pas pour nous."
Dans la rue, la présence d'Alain Juppé ne suscite guère plus d'enthousiasme que d'hostilité. Ses partisans tentent bien de lancer quelques "youyous" et des slogans "Juppé président", mais l'indifférence l'emporte en ce milieu de matinée, dans un quartier encore endormi. "En venant à 10 heures, il ne risque rien, les jeunes sont au lit", sourit Romuald, un habitant de 50 ans. En 2005, la visite de Nicolas Sarkozy avait eu lieu à 22h30.
"Il est entouré de caméras"
Après une heure de déambulation, l'ancien Premier ministre est attendu par des élus locaux et des militants dans un café, pour y évoquer la question des quartiers. A l'entrée, un membre de son staff tente de limiter l'accès des caméras à la salle. "Depuis tout à l'heure, il est entouré de caméras, ça ne donne pas une image proche des gens", lance-t-il, inquiet, à l'un des organisateurs de la rencontre.
Difficile en effet pour les habitants d'aborder le candidat, assailli par les journalistes conviés par son service de presse. La plupart des passants gardent leurs distances, même si certains le soutiennent. "Il est calme, c'est pour ça qu'il n'aura jamais de soucis dans les quartiers", estime Farid, la trentaine. "J'admire Juppé, il a des paroles justes", avance une femme se faisant appeler Mamma.
#JuppéArgenteuil Mamma : "J'admire Juppé, il a des paroles justes. Il respecte tout le monde. Sarkozy, il a eu beaucoup de mots." pic.twitter.com/qbHwm4k55f
— Yann Thompson (@yannthompson) 2 novembre 2016
Dans le café, avant même de prendre le micro, Alain Juppé remercie un militant qui l'a "protégé" pendant la visite. "Je n'étais pas menacé, s'empresse-t-il de préciser, comme pour se démarquer de Nicolas Sarkozy, mais ça poussait." Le candidat déroule ensuite son programme, rêvant d'un "sentiment de paix civile" dans les quartiers, rejettant le "communautarisme" et appelant à la "fin des zones de non-droit en France". "Ne renonçons pas à retrouver le bonheur de vivre ensemble", conclut-il.
Avant de remonter dans sa voiture, le candidat fait un crochet par le poste de police de la dalle. Le lieu, fermé au public jusqu'à 13 heures, lui est malgré tout ouvert. Le bâtiment remplace les précédents bureaux de la police nationale qu'avait visités Nicolas Sarkozy en 2005 et aujourd'hui détruits. Alain Juppé ne s'y éternise pas et quitte Argenteuil. La dalle retrouve son calme, après avoir servi, deux heures durant, les ambitions d'un candidat aussi pressé que matinal.
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