Rolex, yacht, homard... Ces symboles du luxe qui ont coûté cher aux politiques
François de Rugy, ministre de la Transition écologique, est raillé après la publication par Mediapart de photos des dîners fastueux qu'il organisait lorsqu'il était président de l'Assemblée nationale.
"Moi je n'aime pas le homard, je n'en mange pas. J'ai une intolérance aux crustacés. Et on fait croire que c'est moi qui demande qu'on serve des homards ?" La tirade de François de Rugy, vendredi 12 juillet, sur BFMTV, passerait pour surréaliste si le ministre de la Transition écologique n'était pas, depuis deux jours, pris dans la polémique des dîners luxueux donnés à l'hôtel de Lassay lorsqu'il était président de l'Assemblée nationale.
Et les homards géants des époux Rugy sont en passe de devenir irrémédiablement liés au nom du ministre, en témoigne l'accueil qu'il a reçu lors de son déplacement à Niort (Deux-Sèvres), où des manifestants ont brandi un gros crustacé gonflable... Un boulet qu'il lui sera difficile à faire oublier comme, en leur temps, le yacht de Bolloré sur lequel Nicolas Sarkozy avait digéré son élection à la présidence de la République, les cigares de l'ancien secrétaire d'Etat Christian Blanc ou encore les chaussures cirées de l'ancien conseiller élyséen Aquilino Morelle.
Le yacht de Bolloré pour Nicolas Sarkozy
A peine élu en 2007, Nicolas Sarkozy se retrouve sous le feu des critiques pour s'être accordé quelques jours de vacances en famille à Malte sur le Paloma, un luxueux yacht prêté par son ami milliardaire Vincent Bolloré. Un futur président qui se la coule douce alors qu'il doit officiellement entrer en fonction la semaine suivante ? L'affaire heurte l'opinion, quelques jours après la déjà très commentée soirée au Fouquet's. Durant tout son quinquennat, Nicolas Sarkozy devra composer avec les commentaires sur sa présidence bling-bling. Dans son livre La France pour la vie, paru en 2016, il reviendra sur cet épisode. "Ce fut un cauchemar. Encore aujourd'hui, je me demande comment j'ai pu commettre un tel impair", écrit-il.
La Rolex de Jacques Séguéla
"Si à 50 ans, on n'a pas une Rolex, on a quand même raté sa vie !" La phrase, lâchée en 2007 sur France 2 pour défendre un Nicolas Sarkozy jugé trop bling-bling, est entrée dans la postérité. Des années plus tard, la formule, qui illustre si bien la déconnexion entre les élites et le peuple, poursuit toujours Jacques Séguéla, l'ancien stratège en communication de François Mitterrand. "C'était une connerie. Je ne regrette pas de l'avoir dit mais ce n'est pas ce que je voulais dire", a-t-il expliqué en 2015 à BFMTV. D'autant, a-t-il confié, qu'il ne possédait pas de Rolex au moment de sa sortie tapageuse. Un défaut corrigé par son épouse, qui lui en a offert une pour ses 80 ans.
Les cigares de Christian Blanc
En juin 2010, Le Canard enchaîné révèle que le cabinet du secrétaire d'Etat au Grand Paris, Christian Blanc, a acheté pour 12 000 euros de cigares avec des deniers publics. L'intéressé reconnaît les faits et assure avoir remboursé une somme de 3 500 euros correspondant à sa consommation personnelle. Face au tollé suscité par l'affaire, il est finalement contraint par le Premier ministre François Fillon de rembourser la totalité de la dépense. Mais cela ne suffira pas à sauver le portefeuille de l'ancien PDG d'Air France, qui démissionne du gouvernement début juillet. "L'objet du litige est chargé d'une lourde symbolique : le cigare, dont l'image est associée à l'opulence et à la provocation capitalistes", commente Slate.fr, alors que Nicolas Sarkozy avait promis une République "irréprochable".
Le jet privé d'Alain Joyandet
Un vol à 116 500 euros. En mars 2010, Mediapart révèle que le secrétaire d'Etat à la Coopération et à la Francophonie, Alain Joyandet, a voyagé en jet privé pour se rendre en Martinique, où se tenait une conférence internationale pour la reconstruction d'Haïti, dévasté par un tremblement de terre. Pourquoi ne pas avoir emprunté un banal avion de ligne ? L'entourage du secrétaire d'Etat se justifie en invoquant des raisons d'agenda. Affaibli par cette affaire, Alain Joyandet démissionne quelques mois plus tard, accusé par Le Canard enchaîné d'avoir bénéficié d'un permis de construire illégal pour agrandir son mas provençal de Grimaud (Var).
Le duplex d'Hervé Gaymard
Un ministre, son épouse et leurs huit enfants logés dans un magnifique 600 m2 dans le très cossu 8e arrondissement de Paris. En février 2015, Le Canard enchaîné révèle qu'Hervé Gaymard, nommé ministre de l'Economie deux mois auparavant, a choisi d'occuper aux frais de l'Etat cet appartement au loyer mensuel de 14 400 euros plutôt que d'occuper le logement de fonction dévolu au ministre à Bercy. Dans un premier temps, Hervé Gaymard se défend en affirmant qu'il ne connaissait pas le montant du loyer au moment de choisir cet appartement. Mais les jours suivants, d'autres articles de presse mettent à mal ses explications. Le coup de grâce intervient le 25 février, lorsque Libération indique qu'Hervé Gaymard est asujetti à l'ISF et qu'il possède plusieurs appartements. Il démissionne alors dans la journée. De ce scandale a subsisté une plaisanterie consistant à dire que le "gaymare" est l'unité de mesure représentant l'équivalent de 600 m2.
Les taxis d'Agnès Saal
En avril 2013, Le Figaro se fait l'écho d'une lettre anonyme accusant la PDG de l'INA, Agnès Saal, de s'être faite rembourser 40 000 euros de frais de taxi en seulement dix mois de fonctions. Le tout alors que la haute fonctionnaire dispose dans le cadre de ses fonctions d'un chauffeur privé. Très rapidement, Agnès Saal est débarquée de son poste par sa ministre de tutelle, Fleur Pellerin, qui saisit par ailleurs la justice. Après avoir remboursé les notes de taxi, elle sera condamnée à 4 500 euros d'amende. Pour des faits similaires lorsqu'elle dirigeait le Centre Pompidou, elle écope de trois mois de prison avec sursis et 3 000 euros d'amende. Après une suspension de la fonction publique, Agnès Saal a été nommée en août 2018 haute fonctionnaire à l'égalité, la diversité et la prévention des discriminations auprès du secrétaire général du ministère de la Culture.
Les chaussures cirées d'Aquilino Morelle
En avril 2014, Aquilino Morelle, conseiller politique de François Hollande à l'Elysée, est contraint de démissionner après des accusations de conflit d'intérêts avec des laboratoires pharmaceutiques révélées par Mediapart. Mais au-delà de ces faits (pour lesquels il a été blanchi par la justice), l'opinion retiendra surtout le portrait au vitriol d'un homme se faisant cirer ses souliers de luxe, tous les deux mois, sous les dorures de l'Elysée. L'image est ravageuse pour cette "présidence normale" que François Hollande voulait incarner. Dans un billet de blog, l'éditorialiste Bruno Roger-Petit (aujourd'hui conseiller d'Emmanuel Macron à l'Elysée), écrivait : "La mémoire collective va imprimer que, sous la présidence Hollande, un conseiller du président, parmi les premiers, s'est conduit tel un Barry Lyndon perdu au XXIe siècle, occupé à ses hautes fonctions tout en contemplant un pauvre hère occupé à cirer et glacer ses précieuses chaussures."
Les costumes de François Fillon
Le tourbillon médiatique créé par l'affaire Pénélope Fillon commence à peine à se calmer quand, le 12 mars, Le Journal du dimanche révèle que François Fillon s'est fait offrir pour près de 50 000 euros de costumes par un "ami généreux", qui se révèlera plus tard être l'avocat Robert Bourgi, agissant dans le but de piéger l'ancien Premier ministre. En pleine campagne présidentielle, ce nouvel épisode des affaires Fillon donne à voir un candidat attiré par l'argent et épris de luxe. Une image qui lui collera à la peau jusqu'à son élimination au premier tour du scrutin.
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