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Comptes de campagne de J.-L. Mélenchon : "Plus on facture, plus on est remboursé" explique l'association Anticor

Jérôme Karsenti, l'avocat d'Anticor, a réagi ce vendredi l'enquête de la cellule investigation de franceinfo sur les comptes de campagne de Jean-Luc Mélenchon durant la présidentielle 2017.

Article rédigé par franceinfo
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Jean-Luc Mélenchon, lors d'une conférence de presse le 30 mai 2017. (THOMAS PADILLA / MAXPPP)

"Plus on facture, plus on est remboursé", a déclaré vendredi 19 octobre sur franceinfo, Jérôme Karsenti, avocat d’Anticor, après l'enquête de la cellule investigation de franceinfo qui révèle que la justice soupçonne l'existence de surfacturations lors de la campagne présidentielle de Jean-Luc Mélenchon.

La société de la communicante Sophia Chikirou aurait facturé très cher certaines prestations. Des factures qui ont été remboursées par l'État et qui intéressent les enquêteurs. Mediascop faisait par exemple payer 250 € la simple mise en ligne d'un discours.

franceinfo : Quel serait l'intérêt pour un candidat de surfacturer ses dépenses électorales ?

Jérôme KarsentiAfin de favoriser l'égalité entre les candidats dans le cadre d'une campagne électorale, il y a un système de financement public. Quand les candidats obtiennent 5% des suffrages ils peuvent bénéficier du remboursement de leurs frais de campagne. On imagine bien que si on surfacture des dépenses, l'argent public viendra contribuer à ce remboursement des dépenses effectuées. Plus on facture, plus on est remboursés dans le cadre d'un plafond. Sur un premier tour, c'est autour de 16 millions d'euros, pas l'intégralité car de mémoire, c'est autour de 47% de leurs frais globaux que les candidats sont remboursés. Il y a une participation de l'État et plus on facture, plus l'argent public vient rembourser les factures effectuées.

Les tarifs pratiqués par cette société vous surprennent ?

Je n'ai pas compétence pour dire quels sont les tarifs, mais s'il apparaît qu'ils sont surévalués, on voit bien qu'il y a une utilisation de l'argent public qui n'est pas acceptable de quelque candidat que ce soit. Vous savez qu'Anticor ne s'est pas contenté de déposer plainte seulement contre Jean-Luc Mélenchon [mais aussi contre Marine Le Pen, Emmanuel Macron et Benoît Hamon, des plaintes qui ont été classées sans suite]. La réponse de M. Molins [procureur de la République de Paris] est assez circonstanciée. Elle explique que le président de la commission des comptes de campagne, dans le cadre uniquement des comptes de campagne de Jean-Luc Mélenchon, a saisi le procureur pour dire qu'il y a des dépenses qui ne sont pas des dépenses électorales et qu'il faut enquêter. Pour les autres candidats, le procureur de Paris a dit que la commission des comptes a examiné les comptes qui ont été considérés valides donc vous ne pouvez pas dire autre chose que ce qu'a dit la commission des comptes de campagne.

Cet argument a été brandi par Jean-Luc Mélenchon ?

Ces comptes n'ont pas été validés totalement, puisqu'une partie de ses dépenses (autour de 400 000 euros qui n'ont pas été considérées comme des dépenses électorales) font l'objet d'une enquête préliminaire auprès du procureur de la République. Rappelons qu'un des rapporteurs qui s'est occupé des dépenses de Jean-Luc Mélenchon avait estimé à 1,5 million d'euros les dépenses qui n'étaient pas justifiées. On voit que dans ce dossier, selon les investigations que vous avez menées, l'entreprise Mediascop était dans les locaux de l'Ère du peuple, l'association des comptes de campagne de Jean-Luc Mélenchon. Il y avait une imbrication totale.

La commission des comptes de campagne a-t-elle les moyens de travailler aujourd'hui et dans quelles conditions travaille-t-elle ?

On est aujourd'hui dans un délire absolu avec une commission qui est composée de 9 membres, un président nommé en conseil des ministres, qui n'a pas de pouvoirs d'investigations et qui se contente de recevoir des quantités inimaginables de factures. C'est un contrôle qui est superficiel. Donc il n'y a pas de moyens. Il y a une enquête contradictoire : lorsqu'une dépense apparaît infondée, on interroge le candidat pour qu'il se justifie. Il n'y a pas de réflexion sur le bien-fondé. Comment un contrôleur peut-il dire qu'une dépense est justifiée ou non ? Songeons aux caisses de champagne de Marine Le Pen qui ont été considérées comme justifiées, tout comme le voyage au Tchad en jet privé. Il y a des dépenses qui ne peuvent pas faire l'objet d'investigations sérieuses parce qu'il n'y a pas de moyens.

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