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Référence à un parti collaborationniste, imbroglio sur la marque... Pourquoi le nouveau nom du FN pose déjà problème

Marine Le Pen a proposé dimanche aux militants de rebaptiser le Front national en Rassemblement national. Très vite, les observateurs ont dénoncé des "références historiques malheureuses" ou encore un "air de déjà-vu". 

Article rédigé par franceinfo
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La présidente du Front national, Marine Le Pen, le 11 mars 2018 à Lille (Nord). (PASCAL ROSSIGNOL / REUTERS)

A peine proposé par Marine Le Pen, le Rassemblement national est déjà contesté. La présidente du FN a annoncé, dimanche 11 mars, vouloir rebaptiser le parti qu'elle dirige et qui porte actuellement le nom de Front national, depuis sa création en 1972. Depuis cette annonce, plusieurs observateurs soulignent les problèmes que pose cette nouvelle dénomination : référence à un ancien parti d'extrême droite collaborationniste, étiquette déjà utilisée par Jean-Marie Le Pen, marque déjà déposée à l'Institut national de la propriété intellectuelle. On vous explique pourquoi ça coince.

Parce qu'un ancien parti collaborationniste portait un nom quasi similaire

Fondé en 1941 sous l'occupation nazie, le Rassemblement national populaire (RNP) avait pour principal objet de "protéger la race", souligne le Huffington Post, et de collaborer avec le IIIe Reich. Ce parti a été créé par l'ancien socialiste et ministre du Front populaire Marcel Déat, devenu une figure de la collaboration pendant l'Occupation. Le RNP est resté actif jusqu'en 1944.

La similitude de ce nom avec celui du Rassemblement national souhaité par Marine Le Pen est aussitôt devenue un angle d'attaque pour ses opposants. Alexis Corbière, député La France insoumise, se demande si c'est "une référence voulue". "Le 'Rassemblement national' évoque fâcheusement le 'Rassemblement national populaire' de Marcel Déat, aux pires heures de la collaboration, estime Bruno Dive, éditorialiste à Sud Ouest. On se gardera d'accuser Marine Le Pen et son équipe d'une quelconque nostalgie ; on regrettera seulement leur manque de culture historique..." 

Finie, l'opération de"dédiabolisation" entreprise par Marine Le Pen ? "Avec ces deux lettres assorties d’un logo pérenne, le Rassemblement national ne s’affranchit en aucun cas de son histoire", analyse l’historienne Valérie Igounet, dans une tribune au Monde (article abonnés), qui rappelle que ce nom a "déjà un long et sombre passé". 

Parce que le nom a été utilisé par Jean-Marie Le Pen par le passé

Marine Le Pen a "manqué d'imagination, semble-t-il" : le coup de griffe est signé Jean-Marie Le Pen. Le fondateur du FN rappelle, lundi 12 mars, sur France Inter, que ce nom de Rassemblement national a "déjà été utilisé deux fois [par le FN], une fois aux cantonales de 1985 et une fois aux législatives de 1986". Une "stratégie d'ouverture" assumée à l'époque par Jean-Marie Le Pen et qui lui permet d'envoyer 35 députés sous cette étiquette à l'Assemblée nationale. Trente ans plus tôt, le Rassemblement national avait aussi été le nom d'un parti, alors présidé par l'avocat d'extrême-droite Jean-Louis Tixier-Vignancour.

Dimanche sur BFMTV, Florian Philippot, l'ancien bras droit de Marine Le Pen, n'a pas manqué de dénoncer un nouveau nom qui "symbolise [un] retour en arrière". Même son de cloche pour Alexis Corbière. Ce changement de nom, "c'est un peu, 'Back to the future' [en référence au film Retour vers le futur], on revient un peu en arrière", a ironisé l'élu proche de Jean-Luc Mélenchon, lundi sur franceinfo.

Parce que le nom est déjà déposé à l'Inpi

Dernier souci pour Marine Le Pen, une bataille judiciaire s'annonce autour de l'utilisation du nom Rassemblement national. Plusieurs observateurs ont fait remarquer sur Twitter que cette dénomination a été déposée le 30 décembre 2013 à l'Institut national de la propriété intellectuelle (Inpi) par un certain Frédérick Bigrat. Ce petit parti, qui se revendique gaulliste, a réagi sur son compte Twitter.

"Le Rassemblement national s'étonne de l'amateurisme de la 'première opposante' autoproclamée : le FN ne sera jamais le RN et le RN ne sera jamais le nouveau FN",  s'engage Igor Kurek, président du mouvement. Mais L'Incorrect, site proche de l'extrême droite, assure que Frédérick Bigrat a cédé l'usage du nom Rassemblement national au FN. L'avocat Frédéric-Pierre Vos affirme dans un communiqué que le parti lui a "demandé d'intervenir, à l'effet d'acquérir les droits de la marque". Il assure en être désormais "le seul titulaire". 

Lundi matin, la présidente du FN a par ailleurs affirmé, sur RTL, que son parti avait déposé ce nom en 1986 et annoncé des poursuites pour "utilisation frauduleuse". Et si le nom "Alliance pour un Rassemblement National" était finalement retenu par Marine Le Pen ? C'est en tout cas la marque déposée par Louis Aliot, compagnon de la présidente du FN, en janvier 2012. 

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