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Résultats des municipales 2020 : EELV s'affirme comme nouvelle force politique après sa percée dans les grandes villes

Le mouvement écologiste termine en tête du premier tour à Lyon, Grenoble et Strasbourg. Il réalise également de très bons scores à Nantes, Rennes et Lille, dans la lignée de ses résultats aux dernières élections européennes.

Article rédigé par Valentine Pasquesoone, Clément Parrot
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4 min
La candidate écologiste à Strasbourg, Jeanne Barseghian, devant son local de campagne, le 15 mars 2020. (ABDESSLAM MIRDASS / HANS LUCAS / AFP)

Des grandes villes bientôt vertes ? Le mouvement Europe Ecologie-Les Verts, porté par son avancée historique lors des élections européennes de mai 2019, a poursuivi sa progression lors du premier tour des élections municipales, dimanche 15 mars. Les écologistes arrivent en tête notamment à Lyon, Besançon ou Strasbourg"De ce que je perçois, il y a une poussée des écologistes par rapport à 2014 et 2019, c'est un jalon, s'est réjoui Julien Bayou, le secrétaire national du parti, sur France 2. D'ores et déjà c'est un progrès en score, en voix et en ancrage territorial."

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"On est dans un contexte difficile pour les écologistes avec ces élections, entre la prime au sortant et la forte abstention. On voit que, malgré tout ça, la question environnementale a pesé dans cette élection", a poursuivi sur France 2 Eva Sas, porte-parole d'EELV. "Dans les 25 plus grandes villes, j'observe une dynamique très forte des écologistes. Ils battent pratiquement leur record dans toutes les grandes villes et confortent leur score des européennes, analyse pour franceinfo Simon Persico, professeur de sciences politiques à sciences-po Grenoble. Il y a une installation, une stabilisation du socle électoral."

"Les Verts captent le potentiel de l'alternance"

A Grenoble (Isère), ville déjà dirigée par un écologiste, le maire sortant Eric Piolle est largement en tête du premier tour avec 46,67% des voix. "Il plie la partie, je pense que c'est le maire sortant de gauche qui obtient le meilleur score dans les grandes villes", commente Simon Persico. Mais EELV briguait aussi d'autres municipalités dans cette élection, et notamment la mairie de Rouen (Seine-Maritime), marquée par le violent incendie de l'usine Lubrizol. Le candidat écologiste Jean-Michel Bérégovoy y arrive en deuxième position (23,15%) derrière le socialiste Nicolas Mayer-Rossignol (29,51%).

Les Verts visaient également Strasbourg où la candidate Jeanne Barseghian arrive en tête du premier tour (27,87%) devant le candidat soutenu par LREM, Alain Fontanel (19,86%). A Bordeaux, l'avocat et candidat écologiste Pierre Hurmic fait quasiment jeu égal (34,38%) avec le LR Nicolas Florian (34,55%), poulain d'Alain Juppé. Quant à Lyon, les écologistes triomphent lors de ce premier tour avec 28,46% pour Grégory Doucet, loin devant le candidat LR, Etienne Blanc (17,01%). Enfin à Besançon, ville dirigée par les socialistes depuis bientôt 70 ans, l'écologiste Anne Vignot est en tête avec une liste d'union de la gauche (31,19 %) devant le candidat LR, Ludovic Fagaut, (23,59%).

"Quand il y a un maire sortant de gauche, les écologistes arrivent souvent en deuxième position, comme à Nantes, Rennes ou Lille. Mais dès qu'il y a un maire de droite, ce sont les Verts qui captent le potentiel de l'alternance, ce sont vers les Verts que se tournent les électeurs pour battre la droite", analyse Simon Persico. "Même dans les endroits où les écologistes ne sont pas en tête de la gauche, ils sont devenus le deuxième partenaire et désormais les maires de la gauche 'classique' vont devoir arbitrer clairement avec ces électorats", ajoute Vincent Tiberj, politiste à Sciences Po Bordeaux.

Un contexte favorable

La période était propice à une nouvelle percée électorale des écologistes. Avec 13,47% des votes aux dernières élections européennes, soit plus de 3 millions de voix, la liste d'Europe Ecologie-Les Verts était arrivée troisième au niveau national – devenant ainsi la première force de gauche et le parti en tête chez les électeurs de 18 à 24 ans, rappelle Le FigaroDans les mois qui ont suivi le scrutin, de plus en plus de Français ont penché pour un vote vert. Pas moins de 45% des électeurs de villes de plus de 10 000 habitants se disaient prêts, début février, à voter aux municipales pour une liste soutenue par EELV, d'après un sondage Harris Interactive et Agence Epoka pour TF1-LCI et RTL. Ils n'étaient que 29% de Français à l'envisager avant les élections européennes. 

Comment comprendre cette nouvelle base électorale ? "Depuis le début de l'année 2019, avec de nouvelles alertes scientifiques, l'environnement est très présent dans les mentalités. On a donc vu un vote écologiste plus fort", analyse le politologue Daniel Boy, spécialiste de l'écologie politique au Centre de recherches politiques de Sciences Po (Cevipof). "Il y a ce contexte environnemental, et le problème de l'effondrement complet du Parti socialiste", poursuit-il. 

Dans un moment politique "où tous les partis se réclament de l'écologie", Europe Ecologie-Les Verts a tenu, pendant cette campagne, à prouver "qu'ils étaient les premiers", commente Daniel Boy. "Leur stratégie était de dire l'écologie c'est eux, pas les voisins." Forts de ce "contexte environnemental" porteur, EELV a tenté, pendant cette campagne, de décrocher plusieurs grandes villes. Proposant des listes "ouvertes" dans le plus grand nombre de communes, la formation politique a présenté une liste dans 39 des 42 villes françaises de plus de 100 000 habitants, relève Reporterre. L'écart est net par rapport à 2014, où seules 17 listes écologistes y étaient présentes. 

Quelle stratégie pour le second tour ? 

Quelles seront les manœuvres du parti entre les premier et second tour des élections municipales ? Dans les villes où un barrage au Rassemblement national leur semble nécessaire, l'eurodéputé écologiste Yannick Jadot a promis que des listes vertes pourraient se désister. "Les écologistes ont toujours pris leurs responsabilités pour faire en sorte que l'extrême droite ne gouverne ni le pays, ni une région, ni une ville. Il n'y a pas d'ambiguïté", a-t-il déclaré le 9 février, lors de l'émission "Le Grand Jury" de RTL, LCI et Le Figaro. 

Ce dernier a toutefois souligné qu'en 2014 à Perpignan (Pyrénées-Orientales), une telle stratégie contre le candidat frontiste Louis Aliot n'avait pas "amélioré les choses". Sa priorité, désormais, est d'"incarner l'alternative car nous sommes le vote de solution", a-t-il défendu. 

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